La justice pour tous — N’est-ce qu’un rêve?
LES personnes qui visitent le Old Bailey, à Londres, où se réunit la cour d’assises, aperçoivent, au sommet de ce bâtiment historique, la statue d’une femme symbolisant la justice. Dans une main, elle tient une balance, indiquant que les preuves sont ici pesées avec soin; et dans l’autre une épée, pour protéger l’innocent et châtier le coupable. En de nombreux autres endroits, la justice est pareillement représentée par une femme, qui a parfois les yeux bandés en signe d’impartialitéa.
Nous pourrions nous poser cette question: La justice, symbolisée par cette femme, existe-t-elle quelque part à notre époque? Bien sûr, dans tous les pays, il est des lois et des gens pour les faire respecter, des juges, et des tribunaux. Certes, il existe quantité de personnes honnêtes qui essaient de défendre les droits de l’homme et de faire que tous soient égaux devant la loi. Pourtant, à l’évidence, leur action n’a guère de résultats. Presque chaque jour, nous sommes témoins ou entendons parler de corruption et d’injustices.
Considérons l’exemple d’une femme qui fut traduite en justice. Avant son procès, le juge lui fit savoir qu’il “s’occuperait personnellement” des accusations portées contre elle si elle acceptait de le rencontrer dans un hôtel, manifestement pour avoir des rapports immoraux avec lui. Oui, ceux qui sont censés faire régner la justice manquent souvent de probité ou de compétence. Aux États-Unis, la revue Time a révélé que 60 % des juges appartenant à la Cour suprême d’un certain État ont été accusés de conduite indélicate en faveur d’un des leurs.
De plus, en constatant que des délinquants restent impunis, beaucoup sont tout à fait désabusés et se laissent plus facilement aller à enfreindre la loi (Ecclésiaste 8:11). Voici, par exemple, ce que l’on a écrit sur la question aux Pays-Bas: “De nombreux Hollandais accusent la classe politique d’encourager le laxisme, lequel engendre la criminalité. D’autres mettent en cause les tribunaux, et en particulier les juges, (...) qui s’obstinent à imposer des peines minimales et dont les sentences sont parfois ridiculement indulgentes.” Toutefois, ce n’est pas simplement en faisant mieux respecter la loi ou en réformant le système judiciaire qu’on instaurera la justice.
Nul n’ignore que, dans beaucoup de pays, une minorité de personnes ne cessent de s’enrichir, tandis que les plus pauvres vivent dans des conditions déplorables. Cette injustice se rencontre chaque fois que des gens ont de grandes difficultés pour améliorer leur situation ou même gagner leur vie en raison de la couleur de leur peau, de leurs origines ethniques, de leur langue, de leur sexe ou de leur religion. En conséquence, la pauvreté, la faim et la maladie accablent des millions de personnes. Alors que, dans les pays nantis, beaucoup bénéficient de soins médicaux sophistiqués, des millions d’humains dans le monde souffrent et meurent par manque d’eau potable ou de médicaments de première nécessité. Allez parler de justice à ces gens qui, toute leur vie durant, en sont privés! — Ecclésiaste 8:9.
En outre, certains accidents auxquels l’homme n’a pourtant aucune part ne sont-ils pas ressentis comme des injustices? Songez aux maladies congénitales dont sont parfois atteints les nouveau-nés: cécité, retard mental, malformations. Une femme trouve-t-elle juste de mettre au monde un enfant estropié ou mort-né, alors qu’à côté d’elle une autre femme dorlote un beau bébé? Comme nous allons le voir, ces malheurs ressentis comme autant d’injustices vont disparaître.
Malgré tout, eu égard à ce qui précède, ne souscrivez-vous pas à la déclaration consignée en Ecclésiaste 1:15? Dans ce passage, un roi plein de sagesse et d’expérience s’exprime d’un point de vue humain. Il dit: “Ce qui devient tortueux ne peut être redressé, et ce qui manque ne saurait être compté.”
Jésus Christ, dont la célébrité dépasse celle de Salomon, donne en Luc 18:1-5 l’illustration du juge “qui ne craignait pas Dieu et ne respectait pas l’homme”. Une veuve ne cessait de supplier ce magistrat de lui faire justice. Toutefois, nous dit Jésus, ce juge méchant n’est venu en aide à cette femme qu’à cause de son insistance, parce qu’elle l’importunait. Jésus savait donc que l’injustice était abondante. Lui-même ne fut-il pas, par la suite, torturé et mis à mort sur de fausses accusations, ce qui était une autre atteinte grave à la justice?
Beaucoup croient qu’il existe un Dieu préoccupé par l’injustice. Dans un pays d’Amérique centrale, le pape Jean-Paul II a déclaré au cours d’une messe: “Écraser un homme, violer ses droits, le traiter avec une injustice flagrante, le torturer, le prendre en otage ou violer son droit à la vie, c’est commettre un crime et une faute grave contre Dieu.” Ce sont là de belles paroles, mais les injustices se perpétuent dans ce pays. La malnutrition y touche 80 % des enfants de moins de cinq ans, et 2 % de la population détiennent 80 % des terres cultivables.
Y a-t-il donc un Dieu qui se soucie sincèrement de telles injustices révoltantes, un Dieu qui s’intéressera même aux injustices dont vous êtes personnellement victime? Verra-t-on jamais l’instauration de la justice?
[Note]
a En couverture: photographie de la statue ornementale de la fontaine Justitia, à Francfort-sur-le-Main (Allemagne). La statue représentée sur cette page décore un bâtiment municipal de Brooklyn (New York, États-Unis).