Des Philippins couvrent de honte les bigots
À MANGALDAN, dans l’archipel des Philippines, les témoins de Jéhovah avaient pris des dispositions, d’entente avec le maire de la ville, pour utiliser la plaza et le kiosk (emplacement circulaire couvert) pour une série de quatre conférences publiques. La dernière devait avoir lieu le 1er mars 1953 à 17 h et constituer le point culminant de l’assemblée de trois jours des témoins de Jéhovah.
Ayant appris que les témoins de Jéhovah tiendraient une assemblée, le prêtre, Francisco Posadas, prononça un sermon dans lequel il demanda aux catholiques de ne pas les recevoir dans leurs foyers, les avertissant qu’au cas contraire leurs maisons seraient incendiées. Il se rendit lui-même de logement en logement et insista auprès des personnes s’étant déclarées prêtes à loger des témoins de Jéhovah pendant l’assemblée, pour qu’elles ne les reçussent pas. Monsieur Lambino, qui hébergea deux témoins, leur fit un récit de sa conversation avec le prêtre. Il dit :
“ N’est-il pas écrit dans la Parole de Dieu : Aime ton prochain comme toi-même ? Ces témoins sont-ils des bêtes, puisqu’on me dit de ne pas les recevoir ? Sont-ce de mauvaises gens ? Je ne trouve aucun texte disant de n’aimer que les catholiques. Si je me trouvais dans une localité habitée par des témoins de Jéhovah et leur demandais de m’accorder l’hospitalité, je ne crois pas qu’ils me répondraient : “ Comme vous êtes catholique nous vous prions de ne pas rester ici. ” C’est pourquoi les témoins de Jéhovah demeureront chez moi aussi longtemps qu’ils le désireront. ”
Trois jours avant la conférence le maire informa les témoins qu’il avait été décidé que le Comité des fêtes de Mangaldan utiliserait la plaza le 1er mars. Les témoins de Jéhovah s’adressèrent alors au gouverneur de la province et au chef de la police fédérale qui, tous deux, donnèrent des ordres en leur faveur.
Lorsque les témoins arrivèrent sur la plaza, ils y trouvèrent une foule vulgaire armée pour la plupart de gourdins et de bouteilles vides, la police locale et le maire, tous résolus à empêcher la conférence. Le Dr Garcia, qui présidait le Comité des fêtes, menaça de tuer l’orateur s’il se rendait au kiosk qui devait servir de tribune à l’orateur. Un autre fonctionnaire lui rappela qu’un témoin de Jéhovah avait été tué il y a peu de temps dans des circonstances analogues.
Les témoins commencèrent toutefois leur conférence à l’aide d’un haut-parleur portatif. Un orchestre se mit à jouer dans le dessein de couvrir la voix de l’orateur. La police fédérale, arrivée sur les lieux, ordonna à l’orchestre de cesser de jouer. Le gouverneur Rodriguez vint peu après la conférence. Il devait faire le discours inaugural mais, après avoir appris ce qui s’était passé, il préféra commencer son allocution en ces termes :
“ Que s’est-il passé cet après-midi ? Qu’avez-vous fait aux témoins de Jéhovah ? Pourquoi avez-vous troublé leur assemblée ? Ne savez-vous pas que notre Dieu, le Créateur, est un Dieu d’amour et de justice ? Ne savez-vous pas que Dieu a dit d’aimer son prochain comme soi-même ? Les témoins de Jéhovah sont-ils des fauteurs de troubles ? Pourquoi ne leur accordez-vous pas ce à quoi ils ont également droit ? Ne savez-vous pas que ces témoins sont venus de presque toutes les villes de Pangasinan ? Lorsqu’ils rentreront chez eux, que diront-ils à leurs parents et amis ? Les fonctionnaires de Mangaldan sont des fanatiques religieux, diront-ils. À quoi avez-vous donc pensé, cet après-midi ? Vous avez fait une mauvaise impression. Votre conduite envers les témoins de Jéhovah est honteuse. Pensez-vous qu’à votre mort Dieu vous acceptera parce que vous êtes médecin, maire, avocat ou gouverneur ? Non ! Dieu désire des hommes pratiquant l’amour, la justice, la patience et l’amabilité. Votre attitude envers les témoins de Jéhovah est une abomination aux yeux de Dieu. Quelle honte pour vous, fonctionnaires de Mangaldan ! ” Après son discours inaugural le Dr Garcia, qui avait dirigé l’action contre les témoins de Jéhovah, devait prendre la parole. Mais, fort surpris des paroles prononcées par le gouverneur, il demanda qu’on veuille bien l’excuser pour cause de faiblesse. Inutile de dire que — comme le gouverneur l’avait prévu — cet incident est connu dans toute la province de Pangasinan.
De cette manière des hommes de bonne volonté des îles Philippines aident à mettre à nu et à couvrir de honte les fanatiques religieux.