26ème partie : “ Que ta volonté soit faite sur la terre ”
Selon le onzième chapitre de la prophétie de Daniel, l’ange de Jéhovah prédit que l’empire d’Alexandre le Grand serait, après sa mort, morcelé en quatre empires helléniques ou grecs entre quatre des généraux d’Alexandre. La lignée royale issue de l’un de ces généraux deviendrait le “ roi du nord ” parce que sa domination s’exercerait depuis le nord de Jérusalem. La lignée royale issue d’un autre de ces généraux deviendrait le “ roi du midi ” parce que sa domination s’exercerait depuis le sud de Jérusalem. L’accomplissement de la prophétie prouve que le “ roi du nord ” était d’abord la lignée royale qui dominait depuis la Syrie en tant que descendants du général Séleucus Nicator, tandis que le rival, le “ roi du midi ”, était au début la lignée royale qui dominait depuis l’Égypte en tant que descendants du général Ptolémée Lagus. En 187 av. J.-C., le roi du nord fut représenté par le roi Séleucus IV de Syrie. De son temps, Ptolémée VI Philométor d’Égypte représenta le roi du midi qui avait l’appui de la puissance grandissante de Rome, Italie.
57. Quand cet “ exacteur ” vint-il à passer “ par la gloire du royaume ” ? Quel récit Luc nous fait-il de cet événement ?
57 L’envoi de l’“ exacteur ” eut lieu en l’an 2 av. J.-C. L’historien chrétien Luc rapporte cet événement particulier dans les termes suivants : “ En ce temps-là parut un édit de César Auguste, ordonnant un recensement de toute la terre. Ce premier recensement eut lieu pendant que Quirinius était gouverneur de Syrie. Tous allaient se faire inscrire, chacun dans sa ville. Joseph aussi monta de la Galilée, de la ville de Nazareth, pour se rendre en Judée, dans la ville de David, appelée Bethléhem, parce qu’il était de la maison et de la famille de David, afin de se faire inscrire avec Marie, sa fiancée (qui lui avait été donnée en mariage comme promis, NW ; son épouse, Li), qui était enceinte. Pendant qu’ils étaient là, le temps où Marie devait accoucher arriva, et elle enfanta son fils premier-né. Elle l’emmaillota, et le coucha dans une crèche, parce qu’il n’y avait pas de place pour eux dans l’hôtellerie. ” — Luc 2:1-7.
58. Quand ce Quirinius fut-il gouverneur de la Syrie ? Pourquoi ce recensement fut-il l’un des événements les plus importants du règne d’Auguste, méritant d’être mentionné dans la prophétie de Daniel ?
58 P. Sulpicius Quirinius, sénateur romain, fut deux fois gouverneur de la Syrie, la première fois vers la mort du roi Hérode le Grand, qui avait reconstruit le temple à Jérusalem. Cette période où il exerça ses fonctions alla de 750 à 753 à partir de la fondation de Rome, ou de l’an 4 à l’an 1 av. J.-C.a Le recensement ou l’inscription n’avait pas simplement pour but de faire connaître le nombre des habitants, mais de permettre un prélèvement fiscal et l’enrôlement des hommes par la conscription en vue du service militaire. Ce recensement particulier fut l’un des événements les plus importants qui se produisirent au cours du règne de César Auguste en sa qualité de roi du nord. Il eut l’avantage de faire venir à Bethléhem le charpentier Joseph et sa femme Marie afin que Jésus naquît dans cette ville en accomplissement de Michée 5:2 (Mat. 2:1-11). C’est donc avec d’excellentes raisons que l’ange de Jéhovah mentionna ce fait important dans la vision donnée à Daniel, afin de nous aider aussi à déterminer le moment où le “ roi du nord ” prophétique passerait des rois syriens de la cinquième puissance mondiale aux souverains romains de la sixième puissance mondiale.
59. Comment fut-il, comme roi du nord, “ brisé, non par colère, ni par guerre ” ? Et en “ quelques jours ” ?
59 César Auguste institua la garde du corps de l’empereur dont les soldats sont connus sous le nom de gardes prétoriens, leur nombre ayant été plus tard augmenté par son successeur. Il mourut dans la quarante-cinquième année de son règne, le 19 août de l’an 14 de notre ère. Ce fut “ quelques jours ”, après qu’il eut fait faire l’important recensement au cours duquel Jésus, le Fils de Dieu, naquit dans la ville de David comme son royal héritier. Tel un acteur dans un théâtre, Auguste avait bien gouverné ; il fut au nombre des dieux romains, et des temples et des autels furent érigés en son honneur.
60, 61. a) Qui fut l’“ homme méprisé ” qui se leva ? Comment était-il apparenté à César Auguste ? b) Comment la “ majesté du royaume ” ne lui avait-elle pas été conférée ?
60 La prophétie de l’ange révélait que le successeur d’Auguste aurait aussi des rapports étroits avec la vie terrestre du Fils unique de Dieu : “ Et un homme méprisé s’élèvera à sa place, auquel on ne donnera pas l’honneur du royaume (auquel on n’avait pas conféré la majesté du royaume, JPS) ; mais il entrera paisiblement (il viendra dans un temps de sécurité, JPS), et prendra possession du royaume par des flatteries ; et les forces qui débordent seront débordées devant lui (les bras du flot seront emportés de devant lui, JPS) et seront brisées, et même le prince de l’alliance. ” (Dan. 11:21, 22, Da). Ici, l’“ homme méprisé ” mystérieux, c’était Tibère César, fils de Livie. Celle-ci était la troisième femme de l’empereur Auguste ; comme de raison, Tibère devint le beau-fils de l’empereur. César Auguste n’en voulait pas pour successeur, car il le haïssait pour ses défauts. Ce ne fut pas de bon gré que la “ majesté du royaume ” lui fut finalement octroyée. Auguste fut obligé de l’accepter comme successeur à la dignité de l’empire seulement après que tout autre espoir eut échoué. Comment cela ?
61 L’empereur Auguste n’avait pas de fils. Sa sœur en avait un, Marcellus, mais ce neveu mourut. Sa fille avait deux fils, Caïus et Lucius qu’Auguste désigna comme successeurs. La mort les lui enleva aussi. Il aimait beaucoup son beau-fils, Drusus, jeune frère de Tibère, mais ce bien-aimé mourut de bonne heure, le 14 septembre de l’an 9 av. J.-C. Cela permit à Tibère, qui était un général capable, de devenir le premier soldat de l’empire romain. Ce fut en l’année 12 av. J.-C. qu’Agrippa, le grand général de l’empereur Auguste, mourut à l’âge de cinquante et un ans. Eu égard à cette mort, Livie, mère de Tibère, incita l’empereur, toutefois avec de grandes difficultés, à remplacer le défunt par son fils Tibère. Cependant, pour succéder à Agrippa, il fallut que Tibère devînt le gendre de l’empereur. À son grand chagrin, il fut donc contraint à échanger Agrippine, fille du général Agrippa contre Julie, fille de l’empereur. En l’an 4 de notre ère, l’empereur Auguste adopta Tibère et Agrippa Postumus. Neuf ans plus tard, par une loi spéciale, Tibère fut élevé à la corégence avec l’empereur Auguste. L’année suivante, le 19 août de l’an 14 de notre ère, Auguste mourut, et Tibère fut fait empereur. C’est ainsi que cet “ homme méprisé ” vint à “ s’élever ” ou à assumer le pouvoir à la place de César Auguste qui n’en voulait pas pour successeur.
62. Comment Tibère César “ obtint-il le royaume par des flatteries ” ?
62 Quant au rôle que les cajoleries ou flatteries jouèrent auprès du nouveau roi du nord, Tibère, The Encyclopædia Britannica, tome 26, page 916 (onzième édition), dit : “ Les historiens romains des temps anciens se souvinrent de Tibère surtout comme d’un souverain sous le règne duquel les poursuites pour trahison, pour commencer, furent engagées sous les moindres prétextes, et la race odieuse des délateurs, tout d’abord, fut autorisée à augmenter les profits de l’assassinat légal (...) Mais l’histoire des jugements d’État du règne de Tibère montre d’une manière concluante que la violence faite à la loi découla en tout premier lieu des flatteries empressées du sénat (...) et qu’il accepta à la fin de son règne avec une espèce d’indifférence dédaigneuse, avant de manifester, sous l’influence de ses craintes, un empressement à répandre le sangb. ”
63. Comment les “ bras du flot ” furent-ils alors “ emportés de devant lui ” ?
63 À l’époque où Tibère devint roi du nord, son neveu Germanicus César commandait les troupes romaines sur le Rhin. Sitôt après l’accession au trône de Tibère, une grave mutinerie éclata parmi ces troupes, mais Germanicus empêcha les légions factieuses de marcher sur Rome. En l’an 15 de notre ère, Germanicus mena ses troupes contre le héros des Germains, Arminius (Hermann), le mettant en déroute, s’emparant même de sa femme, Thusnelda, et lui infligeant une défaite l’année suivante. Finalement, la politique étrangère, ou la politique touchant la frontière romaine, devint une politique de paix et obtint un honnête succès. “ À quelques exceptions près, les fonctions des forces romaines aux frontières se bornaient à surveiller les peuples de l’autre côté qui s’exterminaient mutuellementc. ” C’est ainsi que les “ bras du flot ” furent contenus ou “ emportés de devant lui ” et “ brisés ”.
64. Comment le “ prince de l’alliance ” fut-il alors “ brisé ” devant lui ?
64 Même le “ prince de l’alliance ” fut brisé dans la mort. Ce n’était pas un quelconque grand prêtre juif que les représentants politiques de Rome avaient installé dans ses fonctions. C’était le Chef de l’alliance que Jéhovah Dieu avait conclue avec Abraham pour bénir toutes les familles et nations de la terre. C’était la Postérité d’Abraham promise dans cette alliance. C’était Jésus-Christ. Le jour de la Pâque, le 14 Nisan de l’an 33 de notre ère, Jésus se tenait dans le palais du gouverneur (le prétoire) à Jérusalem, devant Ponce Pilate, qui représentait Tibère César et devant qui les prêtres juifs l’accusaient de trahison contre l’empereur. Jésus dit au gouverneur romain : “ Mon royaume ne fait pas partie de ce monde (...) mon royaume n’est pas de cette source. ” Pour que le gouverneur romain ne relâchât pas Jésus, innocent, les Juifs crièrent à Pilate : “ Si tu le relâches, tu n’es pas ami de César. Quiconque se fait roi se déclare contre César (...) Nous n’avons de roi que César. ” Puis, conformément à la loi, toute récente, de laesa majestas (“ lèse-majesté ”), le gouverneur romain livra Jésus pour être “ brisé ”, cloué sur un poteau de supplice. — Jean 18:36, NW ; 19:12-16 ; Marc 15:14-18.
65. Pourquoi la loi de laesa majestas fut-elle établie ? Qu’est-ce qui rendit Tibère César impopulaire ?
65 En effet, extrêmement soupçonneux, l’empereur Tibère avait étendu la loi de laesa majestas aux offenses contre sa personne et encourageait les procédés de dénonciation (délation). Le pays devint comme un État policier et la dernière partie de son règne impérial fut marquée par la terreur. L’auteur romain, Pline l’Ancien, appela Tibère le “ plus ténébreux des hommes ”. Car il était si réservé, si taciturne et si peu expansif que le peuple ne pouvait le comprendre, et cela le rendit impopulaire.
66. Avec qui Tibère César était-il ligué ? Jusqu’à quel point ? Comment devint-il fort “ avec une petite nation ” ?
66 Parlant encore à l’avance au sujet de Tibère, l’ange dit à Daniel : “ Et (après qu’on se sera ligué avec lui, JPS), il agira avec fraude, et il montera, et sera fort avec peu de gens (une petite nation, JPS). ” (Dan. 11:23, Da). Sur le plan constitutionnel, Tibère et le sénat romain étaient ligués ; l’empereur dépendait donc officiellement du sénat. Cependant, en réalité, il dépendait de la “ petite nation ”. Laquelle ? Les prétoriens, que César Auguste avaient constitués en gardes du corps de l’empereur, en l’an 13 av. J.-C., à l’instar de la garde du corps autour de la personne du commandant en chef de l’armée romaine. Jusqu’alors cette garde impériale n’avait été aperçue que dans les environs de Rome en petits détachements. Tibère changea cela. Sur le conseil de son favori, Séjan, commandant des soldats prétoriens, Tibère fit camper ces gardes en permanence et en force près des murailles de la ville. Grâce à ces mesures, il faisait échec à toute révolte du peuple. Cela donnait une grande importance au commandant des Gardes. Les Gardes en vinrent à jouir de privilèges spéciaux et devinrent si puissants à un moment donné qu’ils étaient en mesure d’établir des empereurs ou de les détrôner à leur gré. Grâce aux Gardes, forts d’environ 10 000 hommes, l’empereur Tibère maintint sa force. Sans grandes difficultés, toutes les insurrections contre l’autorité au sein de l’empire romain furent réprimées. Il abolit presque complètement les assemblées du peuple, connues sous le nom de comices.
67, 68. Comment entra-t-il dans la partie la plus riche de la province, faisant ce que ses pères et les pères de ses pères n’avaient pas fait ? Cependant comment mourut-il ?
67 “ En pleine paix il entrera dans les lieux les plus riches de la province, et il fera ce que ses pères et les pères de ses pères n’ont pas fait ; il leur distribuera du butin, et des dépouilles, et des richesses, et il tramera ses desseins contre les places fortes, et cela pour un temps (seulement, Le). ” (Dan. 11:24, Da). C’est ce que Tibère fit, à la manière dont il manifesta sa défiance, en grande partie sous l’influence de Séjan, commandant de la Garde prétorienne, jusqu’au moment où, finalement, Séjan lui-même devint suspect et fut tué.
68 L’empereur Tibère prit constamment soin des provinces romaines. À sa mort, il laissa tous les peuples assujettis à l’empire dans une condition de prospérité qu’ils n’avaient jamais connue sous la domination d’Auguste ou antérieurement et qu’ils ne connaissaient pas encore. Par suite des économies rigoureuses du gouvernement, les impôts étaient légers et Tibère fut à même de se montrer partout généreux quand les temps furent exceptionnellement mauvais. Si les représentants de l’empire, qu’ils fussent soldats, gouverneurs ou autres fonctionnaires, opprimaient un de leurs subordonnés et favorisaient une quelconque irrégularité dans les affaires qu’ils traitaient, ils pouvaient être sûrs de la vengeance de l’empereur. Une prise en mains, ferme, du pouvoir, sauvegardait la sécurité et la tranquillité du public à la fois en Italie et dans les pays étrangers. L’amélioration apportée dans les modes de communication facilitait le commerce. Grâce à ces vertus que les Romains considéraient comme les plus grandes, l’empereur veillait à ce que les affaires fussent administrées convenablement et sagement à l’intérieur et à l’extérieur de Rome. Sous de nombreux rapports les lois furent amendées, et les relations sociales et morales sauvegardées grâce au maintien et au développement des réformes instituées par César Auguste. Cependant, l’historien romain Tacite décrit la personnalité de Tibère comme étant faite de “ dissimulation et d’hypocrisie étudiées dès le commencement ”. Il fut considéré comme un tyran, et après sa mort, au cours de la seconde moitié de mars de l’an 37 de notre ère, on ne l’honora d’aucune déification. Un “ homme méprisé ” !
69. Comment le roi du nord, en Claude, favorisa-t-il un développement de l’empire encore plus grand ? Sous quel empereur l’empire parvint-il à sa plus grande extension ?
69 À Tibère succéda Caïus César, appelé généralement Caligula, lequel, à son tour, eut pour successeur son oncle, Claude, en 41 apr. J.-C. Outre ce que Tibère, en temps que roi du nord, avait fait pour améliorer l’Empire romain, Claude veilla à ce que le développement ultérieur de l’empire se fît selon les idées d’Auguste. Une autorité dit ceci : “ Les États-clients furent absorbés, l’Angleterre méridionale conquise, la romanisation de l’Occident reçut une impulsion puissante, des ouvrages publics furent réalisés à Rome et en Italie, et l’organisation de la bureaucratie impériale fit de rapides progrèsd. ” Un ouvrage d’histoire dit : “ Une importante extension de l’État fut réalisée sous Claude qui envoya une expédition, heureuse, en Angleterre, en 43 de notre ère et ajouta la partie méridionale de l’île en tant que province d’Angleterre. Plus tard, la frontière britannique fut reculée vers le nord et garantie par une ligne de défense. Trajan (de 98 à 117 de notre ère) (...) ambitionnant d’édifier un vaste empire oriental, livra une guerre d’agression au cours de laquelle il défit les Parthes en Perse et ajouta à l’empire, en tant que provinces, l’Arménie, la Mésopotamie et l’Assyrie. Cela représente la limite extrême de l’extension de Rome, mais ces conquêtes réalisées par Trajan en Orient furent abandonnées par son successeure. ”
(À suivre.)
[Notes]
a Voyez Commentat. epigraph. de Zumpt, II, 86-104 ; De Syria romana provincia, 97, 98 ; et Res gestae divi Augusti de Mommsen. Et aussi le Dictionnaire du Nouveau Testament de la traduction biblique française du chanoine A. Crampon, édition de 1939, page 358. Comparez aussi The Bible as History de Werner Keller, édition de 1956, pages 326, 327, qui relate que, d’après le fragment d’une inscription romaine découverte à Antioche, en Syrie, Quirinius avait été le légat de l’empereur Auguste en Syrie aux jours de Saturninus le proconsul avant l’ère chrétienne, et comment Quirinius avait établi le siège de son gouvernement et ses quartiers militaires en Syrie à cette époque-là.
b Voyez aussi The Eighteen Christian Centuries (Les dix-huit siècles chrétiens), par James White (1884), pages 18, 19 ; et Thy Kingdom Come (Que ton règne vienne), de C. T. Russell (1891), page 30, paragraphes 1, 2.
c The Encyclopædia Britannica, tome 26, page 915, paragraphes 2, 3.
d The Encyclopædia Britannica, tome 23, page 651b.
e On the Road to Civilization, de Heckel et Sigman (1937), p. 198, par. 1.