Questions des lecteurs
◼ En Romains 8:27, la Traduction du monde nouveau rend le terme grec phronêma par “pensée”, alors qu’aux Rm 8 versets 6 et 7 ce même terme est traduit par “désir”. Pourquoi?
Parce que, au vu du contexte, il est préférable de traduire de deux façons différentes.
Dans la préface des Saintes Écritures — Traduction du monde nouveau (1963), on peut lire: “Dans la mesure du possible, on a essayé de rendre chaque mot de l’original grec par un seul et même mot de la langue de la présente version.” Phronêma ne figure que quatre fois dans les Écritures grecques, mais certains mots de la même famille sont utilisés plus souvent. L’un d’eux est phronéô, qui signifie “penser”, “tourner ses pensées vers”. (Matthieu 16:23; Marc 8:33; Romains 8:5; 12:3; 15:5.) D’autres mots de la même famille emportent l’idée d’utiliser la sagesse pratique, d’être avisé et d’avoir du bon sens. — Luc 1:17; 12:42; 16:8; Romains 11:25; Éphésiens 1:8.
En consultant la Traduction interlinéaire du Royaume, on constate que les quatre occurrences du mot phronêma se trouvent en Romains 8:6, 7, 27 et que son sens littéral est, à chaque fois, celui de “manière de penser, sentiment”. Les hellénistes Bauer, Arndt et Gingrich lui donnent le sens de ‘façon de penser, disposition d’esprit, but, aspiration, désir’. — A Greek-English Lexicon of the New Testament and Other Early Christian Literature.
En Romains chapitre 8, l’apôtre Paul conseille aux chrétiens, qui sont des humains imparfaits, de ne pas marcher selon la chair. Pour y parvenir, ils doivent se garder des tendances ou des impulsions charnelles, et des raisonnements d’un cœur imparfait. Le fait de ‘désirer’ les choses qui sont en accord avec l’esprit saint de Dieu les aide dans ce domaine. — Romains 8:1-5.
Paul dresse ensuite un parallèle: “Le désir de la chair signifie la mort, mais le désir de l’esprit signifie la vie et la paix; parce que le désir de la chair signifie inimitié contre Dieu, car il n’est pas soumis à la loi de Dieu.” (Romains 8:6, 7). C’est aux humains que s’appliquent ces deux versets. Les humains, et en particulier les chrétiens, ne devraient pas tourner leurs pensées vers les choses de la chair déchue, autrement dit concevoir du “désir” pour elles. Au contraire, ils doivent tourner leurs pensées vers les choses qui sont en harmonie avec l’esprit et que celui-ci inspire; ils doivent nourrir du “désir” pour ces choses.
D’un autre côté, au Rm 8 verset 27, c’est de Dieu que l’on parle. Nous lisons: “Cependant celui [Jéhovah] qui scrute les cœurs sait quelle est la pensée de l’esprit, car il sollicite, en accord avec Dieu, pour des saints.” “Celui” dont il est question ici, c’est Jéhovah, qui entend la prière.
On aurait pu, dans ce verset Rm 8:27, traduire phronêma par “désir”. Toutefois, l’esprit saint n’est pas une personne qui pourrait tourner son esprit vers certaines choses ou éprouver des désirs. En effet, l’esprit est la force agissante de Dieu, qui sait comment Sa volonté s’accomplit par l’intermédiaire de Son esprit saint. En outre, ce verset de Romains chapitre 8 Rm 8:27 n’a pas la même portée que les versets 6 et 7 Rm 8:6, 7, qui montrent la nécessité pour les humains de maîtriser leurs pensées et leurs actions. En ce qui concerne Jéhovah, il n’a pas à lutter pour se maîtriser. De plus, il sait ce que contient la Bible, rédigée sous son inspiration; par exemple, des déclarations indiquant sa volonté à l’égard de ses serviteurs terrestres. À propos de Romains 8:27, Heinrich Meyer écrit: “En toute circonstance, Dieu connaît le dessein de l’Esprit.”
Par conséquent, le choix du terme “pensée” est tout à fait conforme au contexte et à l’esprit de Romains 8:27; de plus, il est autorisé par le grec. La Bible de Darby rend ainsi ce passage: “Celui qui sonde les cœurs sait quelle est la pensée de l’Esprit.”
◼ Pourquoi la Traduction du monde nouveau rend-elle à certains endroits le mot grec pisteuô par “croire”, comme la plupart des versions, et à d’autres endroits par “exercer la foi dans [en]” ou “avoir foi en”?
Parce que le mot grec pisteuô possède différentes nuances de sens qu’il s’agit de rendre.
Ainsi, dans sa Grammaire du Nouveau Testament grec (angl.), James Moulton fait remarquer que les premiers chrétiens percevaient clairement “la différence, importante, entre une simple croyance (...) et une conviction personnelle”. Ces deux notions peuvent être rendues par le mot grec pisteuô.
C’est souvent le contexte qui nous permet de distinguer les différentes nuances de pisteuô. Cependant, il peut arriver que la construction grammaticale utilisée nous aide à saisir ce que l’auteur avait à l’esprit. Par exemple, si pisteuô est simplement suivi d’un nom au datif, et que cela soit en accord avec le contexte, la Traduction du monde nouveau le rend d’ordinaire par “croire”. (Matthieu 21:25, 32; mais voir Romains 4:3.) Si pisteuô est suivi du mot épi, “sur”, on le rend généralement par “croire en [à]”. (Matthieu 27:42; Actes 16:31.) S’il est suivi de éis, “vers”, il est habituellement traduit par “exercer la foi en”. — Jean 12:36; 14:1.
Cette dernière possibilité, qui nous rappelle que pisteuô est à rapprocher du mot grec pistis, “foi”, est conforme à ce qu’écrit Paul Kaufman dans son Introduction à la grammaire du Nouveau Testament grec (angl.). On y lit en effet: “Une autre construction qui est courante dans le Nouveau Testament (surtout dans l’Évangile de Jean) est πιστεύω [pisteuô] suivi de εἰς [éis] et de l’accusatif (...). On doit traduire l’expression complète (εἰς plus accusatif) plutôt que d’essayer de traduire la préposition εἰς comme un mot isolé. La foi est ici considérée comme une action, comme quelque chose que font les humains, c’est-à-dire avoir foi en quelqu’un.”