ROYAUME DE DIEU
Expression et exercice de la souveraineté universelle de Dieu envers ses créatures, ou moyen, instrument qu’il emploie à cet effet (Ps 103:19). Le terme est utilisé particulièrement pour parler de l’expression de la souveraineté de Dieu par l’intermédiaire d’un gouvernement royal dirigé par son Fils, Jésus Christ.
Le mot traduit par “ royaume ” dans les Écritures grecques chrétiennes est basiléïa, qui désigne “ tantôt la royauté (dignité du roi [...]), tantôt l’exercice du pouvoir royal : le règne [...], et même le territoire ou les personnes sur lesquels le roi exerce son autorité [...] : le royaume ”. (Notes de lexicographie néo-testamentaire, par C. Spicq, Fribourg, 1982, Supplément, p. 94.) L’expression “ le royaume de Dieu ” est fréquemment employée par Marc et par Luc, et dans le récit de Matthieu figure quelque 30 fois l’expression parallèle “ le royaume des cieux ”. — Comparer Mc 10:23 et Lc 18:24 avec Mt 19:23, 24 ; voir CIEL (Les cieux spirituels) ; ROYAUME.
Le gouvernement de Dieu est, dans sa structure et sa fonction, une théocratie pure (du gr. théos, dieu, et kratos, domination), une domination par Dieu. Le mot “ théocratie ” est attribué à Josèphe, historien juif du Ier siècle de n. è., qui l’aurait forgé dans Contre Apion (II, 164, 165 [XVI]). À propos du gouvernement établi sur Israël au Sinaï, Josèphe écrivit : “ Les uns ont confié à des monarchies, d’autres à des oligarchies, d’autres encore au peuple le pouvoir politique. Notre législateur n’a arrêté ses regards sur aucun de ces gouvernements ; il a — si l’on peut faire cette violence à la langue — institué le gouvernement théocratique [gr. : théocratian], plaçant en Dieu le pouvoir et la force. ” Pour être une théocratie pure, évidemment, le gouvernement ne pouvait pas être constitué par quelque législateur humain, comme l’homme Moïse, mais devait être constitué et établi par Dieu. Le récit des Écritures montre qu’il en fut bien ainsi.
Origine du terme. Le terme “ roi ” (héb. : mèlèkh) entra, semble-t-il, en usage dans le langage humain après le déluge universel. Le premier royaume terrestre fut celui de Nimrod, “ un puissant chasseur en opposition avec Jéhovah ”. (Gn 10:8-12.) Ensuite, durant la période qui s’étendit jusqu’à l’époque d’Abraham, apparurent des cités-États et des nations, et les rois humains se multiplièrent. À l’exception du royaume de Melkisédec, roi-prêtre de Salem (qui fut un type prophétique du Messie [Gn 14:17-20 ; Hé 7:1-17]), aucun de ces royaumes humains ne représentait la domination de Dieu ni n’était établi par Dieu. Les hommes firent également rois les faux dieux qu’ils adoraient, leur attribuant la capacité d’accorder le pouvoir de la domination à des humains. En s’appliquant le titre de “ Roi [Mèlèkh] ”, qu’on trouve dans les Écritures hébraïques (écrits postdiluviens), Jéhovah se servait, par conséquent, du titre que les hommes avaient créé et utilisé. Il employa ce terme pour montrer que c’était lui le “ Roi ” sur qui il fallait compter et à qui il fallait obéir, et non des dirigeants humains présomptueux ou des dieux faits par l’homme. — Jr 10:10-12.
Jéhovah avait bien entendu été le Maître Souverain longtemps avant que n’apparaissent des royaumes humains, en fait avant que les humains n’existent. Parce qu’il était le vrai Dieu et leur Créateur, ses fils angéliques qui étaient des millions le respectaient et lui obéissaient (Jb 38:4-7 ; 2Ch 18:18 ; Ps 103:20-22 ; Dn 7:10). Dès lors, peu importe par quel titre, il fut dès le commencement de la création reconnu comme Celui dont la volonté était légitimement suprême.
La royauté divine dans les débuts de l’histoire humaine. Adam et Ève, les premières créatures humaines, connaissaient de même Jéhovah en tant que Dieu, le Créateur du ciel et de la terre. Ils reconnaissaient son autorité et son droit d’émettre des ordres, de demander aux hommes d’effectuer certaines tâches ou de s’abstenir de certaines actions, de leur attribuer un territoire où résider et à cultiver, ainsi que de déléguer le pouvoir sur d’autres de ses créatures (Gn 1:26-30 ; 2:15-17). Bien qu’Adam eût la capacité de forger des mots (Gn 2:19, 20), rien n’indique qu’il ait inventé le titre “ roi [mèlèkh] ” pour l’appliquer à son Dieu et Créateur, quand bien même il reconnaissait l’autorité suprême de Jéhovah.
Comme le révèlent les premiers chapitres de la Genèse, l’exercice de la souveraineté divine à l’égard de l’homme en Éden était bienveillant et n’était pas inutilement restrictif. Les rapports entre Dieu et l’homme requéraient une obéissance semblable à celle d’un fils à son père (voir Lc 3:38). L’homme n’était pas contraint à se plier à un interminable code de lois (voir 1Tm 1:8-11) ; les exigences de Dieu étaient simples et tendaient à un but. Rien ne laisse non plus penser qu’Adam se sentait gêné par une surveillance constante et critique de ses moindres faits et gestes ; au contraire, il semble que Dieu communiquait périodiquement avec cet homme parfait, en fonction des besoins. — Gn chap. 1-3.
Une nouvelle expression de la royauté de Dieu est prévue. La violation flagrante de l’ordre divin dont se rendit coupable le premier couple humain à l’instigation d’un des fils célestes de Dieu était en fait une rébellion contre l’autorité divine (Gn 3:17-19 ; voir ARBRES [Emploi figuré]). La position prise par l’Adversaire (héb. : satan) céleste de Dieu constituait une contestation qu’il fallait trancher, la question portant sur le bon droit de Jéhovah dans l’exercice de sa souveraineté universelle (voir JÉHOVAH [La question capitale est d’ordre moral]). Cette question sera réglée sur la terre, ce qui est approprié puisque c’est là qu’elle fut soulevée. — Ré 12:7-12.
À l’époque où il prononça le jugement sur les premiers rebelles, Jéhovah Dieu énonça une prophétie dans un langage symbolique qui exposait son dessein de se servir d’un instrument, une “ semence ”, pour procéder à l’écrasement final des forces rebelles (Gn 3:15). Ainsi, la royauté de Jéhovah, l’expression de sa souveraineté, se présenterait sous un nouvel aspect, ou nouvelle expression, en réponse à l’insurrection qui avait eu lieu. La révélation progressive des “ saints secrets du royaume ” (Mt 13:11) montra que ce nouvel aspect impliquerait la constitution d’un gouvernement auxiliaire, une instance dirigeante ayant à sa tête un souverain délégué. La promesse relative à la “ semence ” se réalisera grâce au royaume de Jésus Christ en union avec ceux qui ont été choisis pour être ses associés (Ré 17:14 ; voir JÉSUS CHRIST [Son rôle essentiel dans le dessein de Dieu]). À partir de l’époque de la promesse faite en Éden, l’avancement progressif du dessein divin en vue de produire cette “ semence ” du Royaume devient un thème fondamental de la Bible et une clé pour comprendre les actions de Jéhovah à l’égard de ses serviteurs et de l’humanité en général.
Le fait que Dieu ait délégué une grande autorité et un grand pouvoir à des créatures (Mt 28:18 ; Ré 2:26, 27 ; 3:21) de cette façon est remarquable, dans la mesure où la question de l’intégrité de toutes ses créatures, c’est-à-dire leur attachement de cœur à sa personne et leur fidélité à sa direction, constituait un aspect essentiel de la question soulevée par l’Adversaire de Dieu (voir INTÉGRITÉ [Son rôle dans la question de la plus haute importance]). Que Dieu puisse conférer en toute confiance à une quelconque de ses créatures une autorité et un pouvoir aussi exceptionnels serait en soi un magnifique témoignage à la force morale de sa domination, et cela contribuerait à justifier la souveraineté de Jéhovah et à dévoiler la fausseté des allégations de son adversaire.
Le besoin d’un gouvernement divin devient manifeste. Les conditions qui virent le jour entre le début de la rébellion humaine et l’époque du déluge mirent clairement en évidence que l’humanité avait besoin de la direction divine. La société humaine dut rapidement affronter la désunion, les agressions physiques et le meurtre (Gn 4:2-9, 23, 24). Il n’est pas révélé dans quelle mesure le pécheur Adam exerça durant les 930 années de sa vie une autorité patriarcale sur ses descendants qui se multipliaient. Mais à la septième génération il existait manifestement une impiété choquante (Jude 14, 15), et du temps de Noé (né environ 120 ans après la mort d’Adam) les conditions s’étaient dégradées au point que “ la terre se remplit de violence ”. (Gn 6:1-13.) L’infiltration illicite de créatures spirituelles dans la société humaine, contraire à la volonté et au dessein de Dieu, contribua à cette situation. — Gn 6:1-4 ; Jude 6 ; 2P 2:4, 5 ; voir NEPHILIM.
Bien que la terre soit devenue un foyer de rébellion, Jéhovah ne renonça pas à sa domination sur elle. Le déluge universel attesta que Dieu avait toujours le pouvoir et la capacité d’exécuter sa volonté sur la terre, comme dans n’importe quelle partie de l’univers. Durant la période qui précéda le déluge, il démontra de même qu’il était disposé à guider et à diriger dans leurs actions les hommes qui le recherchaient, comme Abel, Hénok et Noé. Le cas de Noé en particulier illustre comment Dieu exerce sa domination à l’égard d’un sujet terrestre volontaire : il lui donna des ordres et des directives, il le protégea et le bénit ainsi que sa famille, et il montra également que lui, Dieu, est maître des autres créatures terrestres — les mammifères et les oiseaux (Gn 6:9–7:16). Jéhovah établit de même qu’il ne permettrait pas à une société humaine éloignée de lui de souiller indéfiniment la terre ; il ne s’était pas imposé des limites pour ce qui est d’exécuter son jugement juste contre les malfaiteurs au moment et de la manière qu’il juge appropriés. De plus, il démontra sa capacité souveraine de maîtriser les différents éléments de la terre, entre autres son atmosphère. — Gn 6:3, 5-7 ; 7:17–8:22.
La société postdiluvienne primitive et ses problèmes. Après le déluge, la structure de base de la société humaine fut selon toute apparence un système patriarcal, ce qui assura une certaine mesure de stabilité et d’ordre. Les humains devaient ‘ remplir la terre ’, ce qui ne signifiait pas simplement procréer, mais aussi étendre continuellement l’habitat humain sur tout le globe (Gn 9:1, 7). Logiquement, ces facteurs en eux-mêmes limiteraient les problèmes sociaux, les circonscriraient généralement au cercle familial et rendraient improbables les frictions qui se produisent souvent dans les zones à forte densité de population ou surpeuplées. Le projet illicite conçu à Babel prévoyait cependant un processus inverse, c’est-à-dire la concentration des humains pour éviter qu’ils ne soient “ dispersés sur toute la surface de la terre ”. (Gn 11:1-4 ; voir LANGUE, LANGAGE.) Puis, par ailleurs, Nimrod abandonna la domination patriarcale et forma le premier “ royaume ”. (Héb. : mamlakhah.) Koushite de la lignée de Cham, il envahit un territoire sémite, le pays d’Ashour (l’Assyrie) et y bâtit des villes qui firent partie de son domaine. — Gn 10:8-12.
Lorsqu’il confondit le langage humain, Dieu mit un terme à la concentration d’habitants dans les plaines de Shinéar, mais le modèle de domination lancé par Nimrod fut généralement suivi dans les pays où migrèrent les diverses familles de l’humanité. Aux jours d’Abraham (2018-1843 av. n. è.), des royaumes étaient en place depuis la Mésopotamie, en Asie, jusqu’en Égypte, où le roi portait le titre de “ Pharaon ” et non celui de Mèlèkh. Mais ces royautés n’étaient pas gages de sécurité. Avant longtemps, les rois contractaient des alliances militaires, menaient des campagnes d’agression, de pillage et de rapt de grande ampleur (Gn 14:1-12). Dans certaines villes, les étrangers étaient attaqués par des homosexuels. — Gn 19:4-9.
Par conséquent, alors que sans aucun doute ils se regroupaient en communautés concentrées en quête de sécurité (voir Gn 4:14-17), les hommes virent rapidement la nécessité de murer leurs villes et finalement de les fortifier pour parer aux attaques armées. Les plus anciens documents profanes connus, dont beaucoup proviennent de la région de la Mésopotamie où avait existé à l’origine le royaume de Nimrod, regorgent de récits de conflits humains, d’agissements avides, d’intrigues et de meurtres. Les plus anciens recueils de lois non bibliques retrouvés, tels ceux de Lipit-Ishtar, d’Eshnounna et de Hammourabi, montrent que la vie humaine était devenue très complexe, que des frictions sociales provoquaient des problèmes comme le vol, l’escroquerie, les difficultés commerciales, les litiges sur la propriété ou le paiement des rentes, des désaccords sur les prêts et les intérêts, l’infidélité conjugale, les honoraires des médecins et les erreurs médicales, les coups et blessures, et de nombreuses autres affaires. Hammourabi avait beau se présenter comme “ le roi puissant ” et “ le roi parfait ”, sa domination et sa législation, comme celles des autres royaumes politiques de l’Antiquité, étaient incapables de résoudre les problèmes de l’humanité pécheresse (Le code de Hammurapi, par André Finet, Paris, 1983, p. 135 ; Ancient Near Eastern Texts, par J. Pritchard, 1974, p. 159-180 ; voir aussi Pr 28:5). Dans tous ces royaumes, la religion était importante, mais pas le culte du vrai Dieu. La prêtrise collaborait étroitement avec la classe dirigeante et bénéficiait de la faveur du roi, mais cela n’améliorait en rien la moralité du peuple. L’élévation spirituelle ou la direction morale font défaut dans les inscriptions cunéiformes des écrits religieux antiques ; ils révèlent que les dieux adorés étaient querelleurs, violents, lubriques et n’obéissaient à aucune norme ni dessein justes. Pour connaître une vie paisible et heureuse, les hommes avaient besoin du royaume de Jéhovah Dieu.
À l’égard d’Abraham et de ses descendants. Il est vrai que les hommes qui considéraient Jéhovah Dieu comme leur Chef n’étaient pas à l’abri de problèmes personnels et de frictions. Mais cela les aidait à les résoudre ou à les endurer d’une manière conforme aux normes justes de Dieu et sans s’abaisser. Dieu leur accordait protection et force (Gn 13:5-11 ; 14:18-24 ; 19:15-24 ; 21:9-13, 22-33). C’est pourquoi, après avoir déclaré que les “ décisions judiciaires [de Jéhovah] sont dans toute la terre ”, le psalmiste dit à propos d’Abraham, d’Isaac et de Jacob : “ Ils étaient en petit nombre, oui peu nombreux, et résidents étrangers [en Canaan]. Et ils circulaient de nation en nation, d’un royaume vers un autre peuple. [Jéhovah] ne laissa aucun humain les spolier, mais à cause d’eux il reprit des rois, en disant : ‘ Ne touchez pas à mes oints, et à mes prophètes ne faites aucun mal. ’ ” (Ps 105:7-15 ; voir aussi Gn 12:10-20 ; 20:1-18 ; 31:22-24, 36-55). Ce fait également était une preuve que la souveraineté de Dieu sur la terre était toujours effective, qu’il pouvait la faire valoir en harmonie avec l’avancement de son dessein.
Les fidèles patriarches ne s’attachèrent à aucune cité-État, à aucun royaume de Canaan ou d’autres pays. Au lieu de chercher la sécurité dans quelque ville sous la domination politique d’un roi humain, ils vivaient sous des tentes comme des “ étrangers et des résidents temporaires dans le pays ” attendant dans la foi “ la ville ayant des fondements véritables, ville dont Dieu est le bâtisseur et l’auteur ”. Ils acceptaient Dieu pour Souverain, ils attendaient la disposition, ou instrument, céleste qui gouvernerait la terre, solidement fondée sur son autorité souveraine et sur sa volonté, même si la réalisation de cette espérance était encore “ loin ”. (Hé 11:8-10, 13-16.) C’est pourquoi, plus tard, déjà oint par Dieu pour être roi, Jésus put dire : “ Abraham [...] s’est beaucoup réjoui dans l’espoir de voir mon jour, et il l’a vu et s’est réjoui. ” — Jn 8:56.
Jéhovah franchit une nouvelle étape dans l’avancement de sa promesse concernant la “ semence ” du Royaume (Gn 3:15) en établissant une alliance avec Abraham (Gn 12:1-3 ; 22:15-18). En rapport avec cette alliance, il prédit que ‘ des rois sortiraient ’ d’Abraham (Abram) et de sa femme (Gn 17:1-6, 15, 16). Bien que les descendants d’Ésaü, petit-fils d’Abraham, aient formé des communautés dirigées par des cheiks ou des rois, c’est à Jacob, autre petit-fils d’Abraham, que fut répétée la promesse prophétique de Dieu, selon laquelle il aurait des descendants royaux. — Gn 35:11, 12 ; 36:9, 15-43.
Formation de la nation israélite. Des siècles plus tard, au moment prévu (Gn 15:13-16), Jéhovah Dieu agit en faveur des descendants de Jacob, qui étaient à présent des millions (voir EXODE [Nombre des personnes qui participèrent à l’Exode]) : il les protégea pendant une campagne de génocide entreprise par le gouvernement égyptien (Ex 1:15-22) et les libéra finalement de leur dur esclavage sous le régime égyptien (Ex 2:23-25). L’ordre que Dieu adressa à Pharaon par l’intermédiaire de Ses agents Moïse et Aaron fut rejeté par le souverain égyptien, pour qui cet ordre émanait d’une source n’ayant aucune autorité sur les affaires de son pays. Pharaon refusa à plusieurs reprises de reconnaître la souveraineté de Jéhovah, ce qui amena Dieu à démontrer sa force sous la forme de plaies (Ex 7 à 12). Dieu prouva par ce moyen que sa domination sur les éléments et les créatures de la terre surpassait celle de n’importe quel roi de la planète (Ex 9:13-16). Il conclut magistralement cette démonstration de sa force souveraine en détruisant les armées de Pharaon d’une manière qu’aucun des orgueilleux rois guerriers des nations ne pourrait jamais copier (Ex 14:26-31). C’est avec force raison que Moïse et les Israélites chantèrent : “ Jéhovah régnera pour des temps indéfinis, oui pour toujours. ” — Ex 15:1-19.
Jéhovah donna ensuite d’autres preuves qu’il domine la terre, les indispensables ressources en eau, ainsi que les oiseaux, et il montra sa capacité de préserver et de nourrir sa nation même dans un environnement aride et hostile (Ex 15:22–17:15). Après avoir fait tout cela, il expliqua aux Israélites libérés que, s’ils obéissaient à son autorité et à son alliance, ils pouvaient devenir son bien particulier parmi tous les autres peuples, “ car toute la terre m’appartient ”, précisa-t-il. Ils pouvaient devenir “ un royaume de prêtres et une nation sainte ”. (Ex 19:3-6.) Lorsqu’ils déclarèrent formellement vouloir être des sujets de sa souveraineté, Jéhovah agit en qualité de Législateur royal en leur donnant des décrets royaux dans un important code de lois, et il accompagna cet événement d’une manifestation énergique et impressionnante de son pouvoir et de sa gloire (Ex 19:7–24:18). Un tabernacle, ou tente de réunion, et particulièrement l’Arche qui s’y trouverait, devait marquer la présence de l’invisible Chef d’État céleste (Ex 25:8, 21, 22 ; 33:7-11 ; voir aussi Ré 21:3). Moïse et d’autres hommes établis jugeaient la majorité des affaires, guidés par la loi divine, mais il arriva que Jéhovah intervienne personnellement pour énoncer des jugements et appliquer des sanctions à l’encontre de criminels (Ex 18:13-16, 24-26 ; 32:25-35). La prêtrise ordonnée veillait à maintenir de bonnes relations entre la nation et son Dirigeant céleste, aidant le peuple dans ses efforts pour se conformer aux normes élevées de l’alliance de la Loi (voir PRÊTRE). Par conséquent, le gouvernement d’Israël était une authentique théocratie. — Dt 33:2, 5.
En tant que Dieu et Créateur, détenant sur toute la terre le droit souverain d’expropriation, mais aussi étant “ le Juge de toute la terre ” (Gn 18:25), Jéhovah avait attribué le pays de Canaan à la semence d’Abraham (Gn 12:5-7 ; 15:17-21). En tant que Chef de l’exécutif, il ordonnait maintenant aux Israélites de procéder à l’expropriation forcée du territoire détenu par les Cananéens condamnés, ainsi qu’à l’exécution de la sentence de mort qu’il avait prononcée contre eux. — Dt 9:1-5 ; voir CANAAN, CANANÉENS No 2 (La conquête de Canaan par Israël).
La période des juges. Après qu’Israël eut conquis les nombreux royaumes de Canaan, Jéhovah Dieu fut pendant trois siècles et demi l’unique roi de la nation. Durant diverses périodes, des juges, choisis par Dieu, dirigèrent la nation ou des parties de la nation dans les batailles et dans la paix. À la suite de la victoire du juge Guidéôn sur Madiân, le peuple lui demanda de devenir le chef de la nation, mais il refusa, reconnaissant en Jéhovah le véritable chef (Jg 8:22, 23). Son ambitieux fils Abimélek établit une brève royauté sur une frange de la nation, mais il connut une fin désastreuse. — Jg 9:1, 6, 22, 53-56.
La période des juges dans son ensemble est commentée comme suit : “ En ces jours-là, il n’y avait pas de roi en Israël. Oui, chacun avait coutume de faire ce qui était droit à ses yeux. ” (Jg 17:6 ; 21:25). Cela ne veut pas dire qu’il n’y avait pas de contraintes judiciaires. Chaque ville avait des juges, des anciens, pour traiter les questions et les problèmes légaux et pour rendre la justice (Dt 16:18-20 ; voir TRIBUNAL). La prêtrise lévitique avait une fonction de force directrice supérieure : elle enseignait au peuple la loi divine, le grand prêtre ayant l’Ourim et le Thoummim avec lesquels il pouvait consulter Dieu sur les affaires difficiles (voir GRAND PRÊTRE ; OURIM ET THOUMMIM ; PRÊTRE). Par conséquent, celui qui tirait parti de ces dispositions, qui acquérait la connaissance de la loi de Dieu et qui la mettait en pratique, assurait à sa conscience une excellente direction. Dans ces conditions-là, faire “ ce qui était droit à ses yeux ” n’avait pas de conséquences fâcheuses. Jéhovah permettait au peuple d’afficher un état d’esprit et un comportement volontaires ou rétifs. Il n’y avait pas de monarque humain au-dessus de la nation pour diriger le travail des juges de chaque ville, pour ordonner aux citoyens de prendre part à des projets particuliers ou pour les rassembler en vue de défendre la nation (voir Jg 5:1-18). Si donc des conditions mauvaises apparurent, c’était parce que la majorité était réticente à obéir à la parole et à la loi de leur Roi céleste et ne voulait pas tirer parti des dispositions divines. — Jg 2:11-23.
Le peuple demande un roi humain. Près de 400 ans après l’Exode et plus de 800 ans après la conclusion de l’alliance de Dieu avec Abraham, les Israélites demandèrent un roi humain qui les dirigerait, tout comme les autres nations avaient des monarques humains. Leur demande revenait à rejeter la royauté que Jéhovah en personne exerçait sur eux (1S 8:4-8). Il est vrai que le peuple attendait à bon droit que Dieu établisse un royaume conformément à la promesse qu’il avait faite à Abraham et à Jacob, promesse évoquée précédemment. Cette attente s’appuyait de plus sur la prophétie que Jacob avait prononcée sur son lit de mort à propos de Juda (Gn 49:8-10), sur les paroles que Jéhovah avait adressées à Israël après l’Exode (Ex 19:3-6), sur les termes de l’alliance de la Loi (Dt 17:14, 15) et même sur une partie du message que Dieu avait fait prononcer au prophète Balaam (Nb 24:2-7, 17). Hanna la mère de Samuel, une femme fidèle, exprima cette espérance dans une prière (1S 2:7-10). Néanmoins, Jéhovah n’avait pas entièrement révélé son “ saint secret ” concernant le Royaume et n’avait pas indiqué quand arriverait le temps où il avait prévu de l’établir ni quelles seraient la structure et la composition de ce gouvernement, s’il serait terrestre ou céleste. Le peuple agissait donc avec présomption en demandant à présent un roi humain.
C’est sans doute aussi en partie à cause de la menace d’une agression philistine et ammonite que les Israélites désirèrent avoir un commandant en chef royal et visible. Ils trahirent donc un manque de foi dans la capacité de Dieu de les protéger, de les guider et de subvenir à leurs besoins, que ce soit à l’échelle de la nation ou sur le plan individuel (1S 8:4-8). Les mobiles du peuple étaient mauvais ; pourtant, Jéhovah Dieu accéda à leur requête, non par égard pour eux en premier lieu, mais pour accomplir son bon dessein par la révélation progressive du “ saint secret ” de son Royaume futur que dirigerait la “ semence ”. La royauté humaine apporterait cependant à Israël son lot de problèmes et de dépenses, et Jéhovah n’en cacha rien au peuple. — 1S 8:9-22.
Les rois que Jéhovah établit ensuite devaient servir d’agents terrestres de Dieu, sans aucunement amputer sa souveraineté sur la nation. Le trône était en réalité celui de Jéhovah, et ils s’y asseyaient en qualité de rois délégués (1Ch 29:23). Jéhovah ordonna l’onction du premier roi, Saül (1S 9:15-17), et dénonça en même temps le manque de foi que la nation avait manifesté. — 1S 10:17-25.
Pour que la royauté soit bénéfique, il fallait désormais que le roi et la nation respectent l’autorité de Dieu. Si par manque de réalisme ils comptaient sur d’autres pour recevoir direction et protection, le peuple et son roi seraient supprimés (Dt 28:36 ; 1S 12:13-15, 20-25). Le roi devait se garder de se fier à la puissance militaire, de multiplier pour lui les épouses et de se laisser dominer par le désir de richesse. Sa royauté devait s’exercer entièrement dans le cadre de l’alliance de la Loi. Dieu exigeait de lui qu’il écrive une copie personnelle de cette Loi et qu’il la lise chaque jour, afin qu’il entretienne la crainte qui convenait de l’Autorité souveraine, qu’il reste humble et qu’il garde une conduite juste (Dt 17:16-20). Dans la mesure où il agissait ainsi, aimant Dieu de tout son cœur et aimant son prochain comme lui-même, son règne serait bénéfique, il ne donnerait pas de sujet de plainte légitime à cause de l’oppression ou de conditions pénibles. Mais comme il en était du peuple, il en serait maintenant de ses rois : Jéhovah permit aux souverains de démontrer ce qu’ils avaient dans le cœur, leur bonne ou mauvaise volonté à reconnaître son autorité et sa volonté.
Le règne exemplaire de David. N’ayant pas respecté l’autorité supérieure et les dispositions de “ la Supériorité d’Israël ”, le Benjaminite Saül subit la défaveur divine et sa lignée familiale perdit le trône (1S 13:10-14 ; 15:17-29 ; 1Ch 10:13, 14). Avec le règne du successeur de Saül, David de Juda, la prophétie que Jacob avait prononcée sur son lit de mort continua de s’accomplir (Gn 49:8-10). Même si David commit des fautes par faiblesse humaine, son règne fut exemplaire parce qu’il était attaché de cœur à Jéhovah Dieu et qu’il se soumettait humblement à l’autorité divine (Ps 51:1-4 ; 1S 24:10-14 ; voir aussi 1R 11:4 ; 15:11, 14). Au moment où il reçut les contributions pour la construction du temple, David pria Dieu devant le peuple rassemblé, disant : “ À toi, ô Jéhovah, sont la grandeur, la puissance, la beauté, la supériorité et la dignité ; car tout, dans les cieux et sur la terre, est à toi. À toi est le royaume, ô Jéhovah, Celui qui t’élève aussi en chef au-dessus de tout. La richesse et la gloire sont grâce à toi, et tu domines tout ; dans ta main il y a force et puissance, et dans ta main est le pouvoir de rendre grand et de donner de la vigueur à tous. Et maintenant, ô notre Dieu, nous te remercions et nous louons ton nom magnifique. ” (1Ch 29:10-13). Les derniers conseils que David donna à son fils Salomon illustrent également son excellent point de vue sur le rapport entre la royauté terrestre et sa Source divine. — 1R 2:1-4.
Lorsque l’arche de l’alliance, associée à la présence de Jéhovah, fut apportée dans la capitale, Jérusalem, David chanta : “ Que les cieux se réjouissent, et que la terre soit en joie, et qu’on dise parmi les nations : ‘ Jéhovah lui-même est devenu roi ! ’ ” (1Ch 16:1, 7, 23-31). Cela illustre le fait que, si la domination de Jéhovah date du commencement de la création, il peut l’exprimer de manières particulières ou établir certaines structures qui le représentent, ce qui autorise à dire qu’il ‘ devient roi ’ à un moment ou dans une circonstance donnés.
L’alliance pour un royaume. Jéhovah fit une alliance avec David pour un royaume qui serait établi éternellement dans sa lignée familiale ; il déclara : “ À coup sûr, je susciterai ta semence après toi, [...] et, vraiment, j’établirai solidement son royaume. [...] Oui, devant toi, ta maison et ton royaume seront stables pour des temps indéfinis ; ton trône s’établira solidement pour des temps indéfinis. ” (2S 7:12-16 ; 1Ch 17:11-14). Cette alliance en vigueur à l’égard de la dynastie davidique fournissait un témoignage de plus de l’accomplissement de la promesse que Dieu avait faite en Éden, qui annonçait son Royaume dirigé par la “ semence ” promise (Gn 3:15), et donnait un moyen supplémentaire d’identifier cette “ semence ” lorsqu’elle viendrait (voir aussi Is 9:6, 7 ; 1P 1:11). Comme les rois établis par Dieu étaient oints pour occuper leur fonction, le terme “ messie ”, qui signifie “ oint ”, s’appliquait à eux (1S 16:1 ; Ps 132:13, 17). Il est donc clair que le royaume terrestre que Jéhovah établit sur Israël servait de type ou de représentation à petite échelle du Royaume à venir qui serait dirigé par le Messie, Jésus Christ, “ fils de David ”. — Mt 1:1.
Déclin et chute des royaumes israélites. Parce que les voies justes de Jéhovah n’étaient pas suivies, la situation à la fin de seulement trois règnes et au début du quatrième provoqua un vif mécontentement qui déboucha sur une révolte et sur la division de la nation (997 av. n. è.). Un royaume du Nord et un royaume du Sud virent le jour. L’alliance que Jéhovah avait conclue avec David resta toutefois en vigueur en faveur des rois de Juda, le royaume du Sud. Au cours des siècles, les rois fidèles furent rares en Juda, et il ne s’en trouva aucun dans le royaume du Nord, celui d’Israël. L’histoire du royaume du Nord est faite d’idolâtrie, d’intrigues et d’assassinats, les rois se succédant souvent rapidement. Le peuple souffrit de l’injustice et de l’oppression. Au bout d’environ 250 ans, Jéhovah permit au roi d’Assyrie d’écraser le royaume du Nord (740 av. n. è.) en raison de son comportement rebelle envers Dieu. — Ho 4:1, 2 ; Am 2:6-8.
Bien que le royaume de Juda ait connu une stabilité plus grande du fait de la dynastie davidique, la corruption morale du royaume du Sud finit par surpasser celle du royaume du Nord, malgré les efforts de rois qui craignaient Dieu, comme Hizqiya et Yoshiya, en vue d’enrayer le déclin vers l’idolâtrie et le rejet de la parole et de l’autorité divines (Is 1:1-4 ; Éz 23:1-4, 11). L’injustice sociale, la tyrannie, l’avidité, la malhonnêteté, les pots-de-vin, la perversion sexuelle, les agressions criminelles et les meurtres, ainsi que l’hypocrisie religieuse qui avait transformé le temple de Dieu en “ grotte de bandits ”, tout cela fut stigmatisé par les prophètes de Jéhovah dans leurs messages d’avertissement adressés aux souverains et au peuple (Is 1:15-17, 21-23 ; 3:14, 15 ; Jr 5:1, 2, 7, 8, 26-28, 31 ; 6:6, 7 ; 7:8-11). Ni le soutien des prêtres apostats ni aucune alliance politique contractée avec d’autres nations ne pourraient empêcher l’effondrement de ce royaume infidèle (Jr 6:13-15 ; 37:7-10). Jérusalem, la capitale, fut détruite et Juda réduit en solitude par les Babyloniens en 607 av. n. è. — 2R 25:1-26.
La position royale de Jéhovah demeure intacte. La destruction des royaumes d’Israël et de Juda ne portait en aucune façon atteinte à la qualité de la domination personnelle de Jéhovah Dieu ; en aucune façon elle n’était l’indice d’une faiblesse de sa part. Tout au long de l’histoire de la nation israélite, Jéhovah fit clairement comprendre que son souci était qu’on le serve et qu’on lui obéisse volontairement (Dt 10:12-21 ; 30:6, 15-20 ; Is 1:18-20 ; Éz 18:25-32). Il instruisit, reprit, disciplina, avertit et punit. Mais il n’usa pas de son pouvoir pour forcer soit le roi, soit le peuple à suivre une voie juste. Les conditions mauvaises qui apparurent, les souffrances qu’ils subirent et le désastre qu’ils connurent leur étaient entièrement imputables, parce qu’ils avaient endurci leurs cœurs avec obstination et voulu à tout prix suivre la voie de l’indépendance, voie qui nuisait stupidement à leurs propres intérêts. — Lm 1:8, 9 ; Ne 9:26-31, 34-37 ; Is 1:2-7 ; Jr 8:5-9 ; Ho 7:10, 11.
Jéhovah manifesta son pouvoir de Souverain en maintenant temporairement inactives l’Assyrie et Babylone, puissances agressives et avides, jusqu’au temps qu’il s’était fixé, les manœuvrant même pour qu’elles accomplissent ses prophéties par leurs actions (Éz 21:18-23 ; Is 10:5-7). Lorsque Jéhovah retira finalement ses défenses autour de la nation, ce fut une expression de son juste jugement en qualité de Maître Souverain (Jr 35:17). Les serviteurs obéissants de Dieu, avertis par ses prophéties, ne furent pas surpris outre mesure de la désolation d’Israël et de Juda. L’abaissement des souverains arrogants exalta la ‘ splendeur de la supériorité ’ de Jéhovah (Is 2:1, 10-17). Par-dessus tout, cependant, il avait démontré sa capacité de protéger et de préserver les humains qui comptaient sur lui en tant que Roi, même si prévalaient autour d’eux famine, maladie et exécutions en masse, et même si ces humains étaient persécutés par ceux qui haïssaient la justice. — Jr 34:17-21 ; 20:10, 11 ; 35:18, 19 ; 36:26 ; 37:18-21 ; 38:7-13 ; 39:11–40:5.
Le dernier roi d’Israël fut averti qu’on allait lui enlever sa couronne, symbole qu’il était oint comme roi en qualité de représentant de Jéhovah. La royauté davidique ne s’exercerait plus “ jusqu’à ce que vienne celui qui a le droit légal, et vraiment, dit Jéhovah, je le lui donnerai ”. (Éz 21:25-27.) Ainsi, le royaume typique, maintenant en ruines, cessa d’être, et l’attention se porta de nouveau vers l’avenir, vers la “ semence ” qui devait venir, le Messie.
Des nations politiques, telles l’Assyrie et Babylone, dévastèrent les royaumes apostats d’Israël et de Juda. Bien que Dieu dise qu’il les ‘ suscite ’ ou les ‘ fait venir ’ contre ces royaumes condamnés (Dt 28:49 ; Jr 5:15 ; 25:8, 9 ; Éz 7:24 ; Am 6:14), c’était sans aucun doute dans un sens similaire à ce qui s’était passé lorsqu’il avait ‘ endurci ’ le cœur de Pharaon (voir PRESCIENCE, PRÉDÉTERMINATION, PRÉDESTINATION [Concernant des individus]). C’est-à-dire que Dieu ‘ fit venir ’ ces forces assaillantes en leur permettant d’assouvir le désir qui se trouvait déjà dans leur cœur (Is 10:7 ; Lm 2:16 ; Mi 4:11), retirant sa ‘ main ’ protectrice d’au-dessus des objets de leur convoitise ambitieuse (Dt 31:17, 18 ; comparer Ezr 8:31 avec Ezr 5:12 ; Ne 9:28-31 ; Jr 34:2). Étant donné que les Israélites apostats refusaient obstinément de se soumettre à la loi et à la volonté de Jéhovah, il leur donna ‘ une liberté en les laissant à l’épée, à la peste et à la famine ’. (Jr 34:17.) Mais les nations païennes assaillantes ne devinrent pas de ce fait approuvées de Dieu, ni n’eurent à ses yeux les ‘ mains pures ’ lorsqu’elles détruisirent impitoyablement les royaumes du Nord et du Sud, la capitale, Jérusalem, et son saint temple. C’est pourquoi, Jéhovah, le Juge de toute la terre, pouvait à bon droit les accuser d’avoir ‘ dépouillé son héritage ’ et les condamner à subir la même désolation qu’elles avaient infligée au peuple de son alliance. — Is 10:12-14 ; 13:1, 17-22 ; 14:4-6, 12-14, 26, 27 ; 47:5-11 ; Jr 50:11, 14, 17-19, 23-29.
Visions du Royaume de Dieu à l’époque de Daniel. La prophétie de Daniel dans son entier met fortement l’accent sur le thème de la Souveraineté universelle de Dieu et apporte des éclaircissements sur le dessein de Jéhovah. Dieu se servit de Daniel, qui vivait en exil dans la capitale de la puissance mondiale qui avait renversé Juda, pour révéler la signification d’une vision qu’eut le monarque babylonien, vision qui prédisait la marche des puissances mondiales et leur suppression finale par le Royaume éternel que Jéhovah lui-même établirait. Sans nul doute à la stupéfaction de sa cour, Neboukadnetsar, le conquérant de Jérusalem en personne, fut incité à se prosterner devant Daniel l’exilé pour lui rendre hommage, et à reconnaître dans le Dieu de Daniel “ un Seigneur des rois ”. (Dn 2:36-47.) Une autre fois, par la vision que Neboukadnetsar eut en rêve de ‘ l’arbre abattu ’, Jéhovah fit savoir avec force que “ le Très-Haut est Chef dans le royaume des humains, et qu’il le donne à qui il veut, et qu’il établit sur lui le plus humble des humains ”. (Dn 4 ; voir l’examen de cette vision dans TEMPS FIXÉS DES NATIONS.) Par l’accomplissement de ce qui le concernait dans ce rêve, le souverain impérial Neboukadnetsar fut une fois de plus amené à reconnaître le Dieu de Daniel comme “ le Roi des cieux ”, Celui qui “ agit selon sa propre volonté parmi l’armée des cieux et les habitants de la terre. Et il n’existe personne qui puisse arrêter sa main ou qui puisse lui dire : ‘ Qu’as-tu fait ? ’ ” — Dn 4:34-37.
Alors que la position dominante de Babylone sur la scène internationale approchait de sa fin, Daniel vit des visions prophétiques d’empires successifs, comparables à des bêtes par leurs caractéristiques ; il vit également le majestueux Tribunal céleste de Jéhovah en session qui passait en jugement les puissances mondiales et qui les déclarait indignes de la domination ; et il contempla “ quelqu’un de semblable à un fils d’homme ” à qui on donna “ domination, dignité et royaume, pour que les peuples, communautés nationales et langues le servent tous ” dans sa “ domination de durée indéfinie qui ne passera pas ”. Il fut aussi témoin de la guerre menée contre les “ saints ” par la dernière puissance mondiale, ce qui exigeait qu’elle soit supprimée, et de la remise du ‘ royaume, de la domination et de la grandeur des royaumes sous tous les cieux au peuple des saints du Suprême ’, Jéhovah Dieu (Dn 7, 8). Il devint ainsi manifeste que la “ semence ” promise impliquerait un corps gouvernemental ayant non seulement un chef royal, le “ fils d’homme ”, mais aussi des cosouverains, les “ saints du Suprême ”.
À l’égard de Babylone et du royaume médo-perse. Le décret irrévocable de Dieu contre la puissante Babylone fut exécuté de manière soudaine et inattendue ; ses jours furent comptés et menés à leur fin (Dn 5:17-30). Durant la domination médo-perse qui suivit, Jéhovah fit une nouvelle révélation à propos du Royaume messianique : il désigna le moment où le Messie apparaîtrait et annonça son ‘ retranchement ’ ainsi qu’une deuxième destruction de la ville de Jérusalem et de son lieu saint (Dn 9:1, 24-27 ; voir SOIXANTE-DIX SEMAINES). Et, comme il l’avait fait sous la domination babylonienne, Jéhovah Dieu démontra de nouveau sa capacité de protéger ceux qui reconnaissaient sa souveraineté malgré la colère des autorités et la menace de mort en faisant la démonstration de son pouvoir tant sur les éléments que sur les bêtes sauvages (Dn 3:13-29 ; 6:12-27). Il fit en sorte que les portes de Babylone soient ouvertes en grand au moment voulu, permettant que le peuple de son alliance soit libre de retourner dans son pays et d’y rebâtir la maison de Jéhovah (2Ch 36:20-23). En raison de cette action de libération de son peuple, on pouvait annoncer à Sion : “ Ton Dieu est devenu roi ! ” (Is 52:7-11). Après cela, des conspirations fomentées contre son peuple furent mises en échec, les déclarations calomnieuses de fonctionnaires subalternes et les décrets gouvernementaux défavorables furent surmontés, car Jéhovah poussa différents rois perses à collaborer à la réalisation de sa volonté souveraine. — Ezr 4-7 ; Ne 2, 4, 6 ; Est 3-9.
Ainsi, pendant des milliers d’années, le dessein immuable et irrésistible de Jéhovah Dieu progressa. Quelle que fût la tournure des événements sur la terre, Dieu se révéla toujours maître de la situation, constamment en avance sur ses adversaires, hommes ou esprits méchants. Il ne laissa rien entraver le parfait déroulement de son dessein, de sa volonté. La nation d’Israël et son histoire, si elles servirent à former des types prophétiques et des présages des futures manières d’agir de Dieu avec les hommes, mirent également en lumière que, si on ne reconnaît pas l’autorité divine et si on ne s’y soumet pas de bon gré, il ne peut y avoir d’harmonie, de paix et de bonheur durables. À leur avantage, les Israélites avaient des choses en commun : leurs ancêtres, leur langue et leur pays. Ils avaient aussi affronté des ennemis communs. Mais c’est uniquement aussi longtemps qu’ils adorèrent et servirent fidèlement Jéhovah Dieu qu’ils connurent l’unité, la force, la justice et qu’ils éprouvèrent une véritable joie de vivre. Lorsque les relations avec Jéhovah Dieu se relâchaient, la nation périclitait rapidement.
Le Royaume de Dieu ‘ s’approche ’. Puisque le Messie devait être un descendant d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, un membre de la tribu de Juda et un “ fils de David ”, il devait naître humain ; il devait être, comme le disait la prophétie de Daniel, “ un fils d’homme ”. Quand “ est arrivé le terme du temps ”, Jéhovah Dieu envoya son Fils, qui naquit d’une femme et qui remplissait toutes les exigences légales pour hériter du “ trône de David son père ”. (Ga 4:4 ; Lc 1:26-33 ; voir GÉNÉALOGIE DE JÉSUS CHRIST.) Six mois avant la naissance de Jésus était né Jean, qui devint le baptiseur et qui devait être son précurseur (Lc 1:13-17, 36). La façon dont les parents de ces garçons s’exprimèrent montrait qu’ils vivaient dans l’attente impatiente d’actes divins de domination (Lc 1:41-55, 68-79). À la naissance de Jésus, les paroles de la délégation angélique envoyée pour annoncer la signification de l’événement mirent également l’accent sur des actes glorieux de Dieu (Lc 2:9-14). De même, les paroles de Siméon et d’Anne au temple exprimaient l’espoir en des actes de salut et en une libération (Lc 2:25-38). Tant le récit biblique que des témoignages profanes révèlent que les Juifs en général étaient dans l’attente, avaient le sentiment que la venue du Messie approchait. Mais beaucoup espéraient avant tout être libérés du joug pesant de la domination romaine. — Voir MESSIE.
Jean avait pour mission de “ ramener le cœur ” de personnes à Jéhovah, à ses alliances, au “ privilège de lui offrir sans crainte un service sacré, avec fidélité et justice ”, apprêtant ainsi à Jéhovah “ un peuple préparé ”. (Lc 1:16, 17, 72-75.) Il avertit sans équivoque les gens qu’ils allaient vivre une époque de jugement divin, que ‘ le royaume des cieux s’était approché ’, ce qui exigeait que sans tarder ils se repentent et se détournent de leur désobéissance à la volonté et à la loi de Dieu. Là encore, l’accent était mis sur la norme de Jéhovah selon laquelle il ne veut que des sujets volontaires, des personnes qui reconnaissent et apprécient la droiture de ses voies et de ses lois. — Mt 3:1, 2, 7-12.
Le Messie vint lorsque Jésus se présenta à Jean pour être baptisé et fut alors oint par l’esprit saint de Dieu (Mt 3:13-17). Il devint de cette façon le Roi désigné, Celui qui était reconnu par le Tribunal de Jéhovah comme ayant le droit légal au trône davidique, un droit qui n’avait pas été exercé durant les six siècles précédents (voir JÉSUS CHRIST [Son baptême]). Mais, en plus, Jéhovah fit entrer ce Fils agréé dans une alliance pour un Royaume céleste, dans lequel Jésus serait à la fois Roi et Prêtre, comme l’avait été Melkisédec de la Salem antique (Ps 110:1-4 ; Lc 22:29 ; Hé 5:4-6 ; 7:1-3 ; 8:1 ; voir ALLIANCE). Étant la ‘ semence d’Abraham ’ promise, ce Roi-Prêtre céleste serait l’Agent principal de Dieu pour la bénédiction des personnes de toutes les nations. — Gn 22:15-18 ; Ga 3:14 ; Ac 3:15.
Tôt dans la vie terrestre de son Fils, Jéhovah avait manifesté son pouvoir royal en faveur de Jésus. Dieu fit partir par un autre chemin les astrologues orientaux qui allaient informer le tyrannique roi Hérode de la situation du petit enfant, et il fit descendre en Égypte les parents de Jésus avant que les hommes d’Hérode ne perpètrent le massacre des enfants à Bethléhem (Mt 2:1-16). Puisque la première prophétie en Éden avait prédit une inimitié entre la “ semence ” promise et la ‘ semence du serpent ’, cette tentative de meurtre sur Jésus signifiait indubitablement que Satan le Diable, l’Adversaire de Dieu, essayait, toutefois en vain, de faire échouer le dessein de Jéhovah. — Gn 3:15.
Après quelque 40 jours dans le désert de Judée, Jésus à présent baptisé eut affaire à ce principal opposant à la souveraineté de Jéhovah. Par un moyen non précisé, l’Adversaire céleste fit à Jésus des suggestions sournoises destinées à le pousser à des actions qui violeraient la volonté et la parole exprimées de Jéhovah. Satan proposa même de donner à Jésus, qui était oint, la domination sur tous les royaumes terrestres sans devoir lutter et sans avoir à souffrir, en échange d’un seul acte d’adoration à son égard. Jésus refusa, reconnaissant Jéhovah comme le seul vrai Souverain, de qui procède légitimement le pouvoir et à qui revient l’adoration ; l’Adversaire de Dieu commença alors à échafauder d’autres plans contre le Représentant de Jéhovah, recourant de diverses façons à des agents humains, comme il l’avait fait longtemps auparavant dans le cas de Job. — Jb 1:8-18 ; Mt 4:1-11 ; Lc 4:1-13 ; voir aussi Ré 13:1, 2.
De quelle façon le Royaume de Dieu était-il “ au milieu ” de ceux à qui Jésus prêcha ?
Confiant que Jéhovah avait le pouvoir de le protéger et de lui garantir le succès, Jésus entama son ministère public, annonçant au peuple de l’alliance de Jéhovah que ‘ le temps fixé s’était accompli ’ et que, de ce fait, le Royaume de Dieu s’était approché (Mc 1:14, 15). Pour déterminer en quel sens le Royaume était ‘ proche ’, il est intéressant de noter les paroles que Jésus adressa à des Pharisiens, à savoir : “ Le royaume de Dieu est au milieu de vous. ” (Lc 17:21). Commentant ce texte, The Interpreter’s Dictionary of the Bible fait cette remarque : “ Bien que souvent citée pour donner un exemple du ‘ mysticisme ’ ou de l’‘ intériorité ’ de Jésus, cette interprétation s’appuie principalement sur l’ancienne traduction, ‘ au dedans de vous ’ [...], où ‘ vous ’ est compris comme un singulier, selon le sens moderne impropre qu’on lui donne ; le ‘ vous ’ [humôn] est un pluriel (Jésus s’adresse aux Pharisiens — v. 17:20) [...]. La théorie selon laquelle le royaume de Dieu est quelque chose d’intérieur, une disposition d’esprit ou une condition de salut personnel, va à l’encontre du contexte de ce verset, ainsi que de l’idée qu’en donne l’ensemble du NT. ” (Par G. Buttrick, 1962, vol. 2, p. 883). Puisque “ royaume [basiléïa] ” peut désigner la “ dignité du roi ”, il est manifeste que Jésus voulait dire que lui-même, le représentant royal de Dieu, oint par Dieu en vue de la royauté, était au milieu d’eux. Il était non seulement présent en cette qualité, mais il avait aussi l’autorité pour accomplir des œuvres démontrant le pouvoir royal de Dieu et pour préparer des personnes pressenties pour occuper des fonctions dans son Royaume à venir. D’où la ‘ proximité ’ du Royaume ; c’était une époque qui offrait des opportunités extraordinaires.
Un gouvernement ayant pouvoir et autorité. Les disciples de Jésus comprenaient que le Royaume était un gouvernement de Dieu bien réel, mais ils ne saisissaient pas l’étendue de son domaine. Nathanaël dit à Jésus : “ Rabbi, tu es le Fils de Dieu, tu es Roi d’Israël. ” (Jn 1:49). Ils connaissaient ce qui avait été prédit dans la prophétie de Daniel à propos des “ saints ”. (Dn 7:18, 27.) Jésus promit directement à ses apôtres qu’ils occuperaient des “ trônes ”. (Mt 19:28.) Jacques et Jean souhaitaient recevoir certaines positions privilégiées dans le gouvernement messianique, et Jésus reconnut que de telles positions privilégiées existeraient, mais il déclara qu’il appartenait à son Père, le Maître Souverain, de les attribuer (Mt 20:20-23 ; Mc 10:35-40). Si donc les disciples de Jésus limitaient à tort le règne du Messie à la terre et précisément à l’Israël selon la chair, ce qu’ils firent même après la résurrection de Jésus, le jour de son ascension (Ac 1:6), ils avaient par contre bien compris qu’il avait trait à un gouvernement. — Voir Mt 21:5 ; Mc 11:7-10.
Le pouvoir royal de Jéhovah à l’égard de sa création terrestre fut démontré visiblement de multiples façons par son Représentant royal. Grâce à l’esprit, ou force agissante, de Dieu, son Fils exerça la maîtrise du vent et de la mer, de la végétation, des poissons, et même des éléments organiques de la nourriture lorsqu’il la fit se multiplier. En raison de ces œuvres puissantes, ses disciples acquirent un profond respect pour l’autorité de Jésus (Mt 14:23-33 ; Mc 4:36-41 ; 11:12-14, 20-23 ; Lc 5:4-11 ; Jn 6:5-15). Encore plus profondément impressionnant fut son exercice du pouvoir divin sur les corps humains, lorsqu’il guérit des afflictions allant de la cécité à la lèpre et lorsqu’il ramena les morts à la vie (Mt 9:35 ; 20:30-34 ; Lc 5:12, 13 ; 7:11-17 ; Jn 11:39-47). Il envoya des lépreux guéris le rapporter aux prêtres, qui étaient divinement autorisés, mais n’avaient généralement pas la foi, en “ témoignage pour eux ”. (Lc 5:14 ; 17:14.) Enfin, il manifesta le pouvoir de Dieu sur les esprits supra-humains. Les démons reconnaissaient l’autorité dont Jésus était investi et, plutôt que de courir le risque d’une épreuve fatidique avec le pouvoir qui le soutenait, ils obéirent quand il leur ordonna de libérer les personnes qu’ils possédaient (Mt 8:28-32 ; 9:32, 33 ; voir aussi Jc 2:19). Puisque Jésus opérait ces puissantes expulsions de démons au moyen de l’esprit de Dieu, le Royaume de Dieu avait réellement ‘ atteint ’ ses auditeurs. — Mt 12:25-29 ; voir aussi Lc 9:42, 43.
Tout cela constituait une preuve solide que Jésus détenait une autorité royale et que cette autorité ne venait pas d’une source terrestre, humaine, politique (voir Jn 18:36 ; Is 9:6, 7). Les messagers que Jean le baptiseur, emprisonné, avait envoyés, furent témoins de ces œuvres de puissance ; Jésus leur dit de retourner vers Jean et de lui raconter ce qu’ils avaient vu et entendu, pour lui confirmer que Jésus était bien “ Celui qui vient ”. (Mt 11:2-6 ; Lc 7:18-23 ; voir aussi Jn 5:36.) Les disciples de Jésus voyaient et entendaient des manifestations de l’autorité du Royaume dont les prophètes avaient désiré être témoins (Mt 13:16, 17). Par ailleurs, Jésus pouvait déléguer de son autorité à ses disciples afin qu’ils exercent des pouvoirs similaires en qualité d’envoyés établis, ce qui ajouterait de la force et du poids à leur proclamation : “ Le royaume des cieux s’est approché. ” — Mt 10:1, 7, 8 ; Lc 4:36 ; 10:8-12, 17.
L’entrée dans le Royaume. Jésus mit l’accent sur l’époque spéciale offrant des opportunités qui était donc arrivée. Il déclara au sujet de son précurseur, Jean le baptiseur : “ Parmi ceux qui sont nés de femmes, il n’en a pas été suscité de plus grand que Jean le Baptiste ; mais quelqu’un qui est un petit dans le royaume des cieux est plus grand que lui. Mais depuis les jours de Jean le Baptiste jusqu’à présent, le royaume des cieux est le but vers lequel se pressent [biazétaï] les hommes, et ceux qui se pressent ainsi [biastaï] s’en emparent. [Voir Os ; également Zürcher Bibel (allemand).] Car tous, les Prophètes et la Loi, ont prophétisé jusqu’à Jean. ” (Mt 11:10-13). Par conséquent, les jours du ministère de Jean, qui allaient prochainement prendre fin avec son exécution, marquaient la conclusion d’une période et le début d’une autre. Vine’s Expository Dictionary of Old and New Testament Words dit à propos du verbe grec biazomaï employé dans ce texte : “ Ce verbe évoque des efforts vigoureux. ” (1981, vol. 3, p. 208). On lit dans la Sainte Bible commentée de Fillion à propos de Matthieu 11:12 : “ Cette expression dramatique ([biazétaï], est assailli de vive force) décrit fort bien l’ardeur avec laquelle des Juifs nombreux s’élançaient comme à l’assaut de ce royaume, et s’efforçaient d’en devenir les citoyens. On a eu tort parfois de l’interpréter en mauvaise part [...], car cette explication ne cadre pas avec le contexte. — Les mots violenti [biastaï] [“ ceux qui se pressent ainsi ”] et rapiunt [arpazousi] [“ s’en emparent ”] marquent fort bien la vigueur du mouvement en question. ” — Paris, 1891-1931, tome VII, p. 80.
Il ne serait par conséquent pas facile de devenir membre du Royaume de Dieu ; ce ne serait pas comme s’il s’agissait de s’approcher d’une ville ouverte, avec peu ou pas d’entraves pour y entrer. Au contraire, Jéhovah Dieu, le Souverain, avait placé des barrières interdisant l’accès à quiconque n’en serait pas digne (voir Jn 6:44 ; 1Co 6:9-11 ; Ga 5:19-21 ; Ép 5:5). Ceux qui entreraient auraient à passer par une route étroite, à trouver la porte étroite, à continuer à demander, à continuer à chercher, à continuer à frapper, et la voie serait ouverte. Ils constateraient que la voie est “ étroite ” en ce sens qu’elle empêche ceux qui l’empruntent de faire des choses qui leur nuiraient personnellement ou nuiraient à autrui (Mt 7:7, 8, 13, 14 ; voir aussi 2P 1:10, 11). Il leur faudrait peut-être figurément perdre un œil ou une main pour entrer (Mc 9:43-47). Le Royaume ne serait pas une ploutocratie dans laquelle on pourrait acheter la faveur du Roi ; il serait difficile à un riche [gr. : plousios] d’entrer (Lc 18:24, 25). Ce ne serait pas une aristocratie du monde ; les positions en vue chez les hommes ne compteraient pas (Mt 23:1, 2, 6-12, 33 ; Lc 16:14-16). Ceux qui apparemment seraient “ premiers ”, parce qu’ils auraient au plan religieux des origines ou des états de service impressionnants, seraient “ derniers ”, et les ‘ derniers seraient premiers ’ à recevoir les privilèges liés à ce Royaume (Mt 19:30–20:16). Les Pharisiens, personnages en vue mais hypocrites, sûrs de leur position avantageuse, verraient des prostituées et des collecteurs d’impôts réformés entrer dans le Royaume avant eux (Mt 21:31, 32 ; 23:13). Ils auraient beau appeler Jésus “ Seigneur, Seigneur ”, tous les hypocrites qui méprisent la parole et la volonté de Dieu révélées par Jésus seraient écartés par ces paroles : “ Je ne vous ai jamais connus ! Éloignez-vous de moi, vous qui pratiquez l’illégalité. ” — Mt 7:15-23.
Ce seraient ceux qui relèguent les intérêts matériels au second plan et qui cherchent d’abord le Royaume et la justice de Dieu qui auraient le droit d’entrer (Mt 6:31-34). À l’exemple de Christ Jésus, le Roi de Dieu oint, ils aimeraient la justice et haïraient la méchanceté (Hé 1:8, 9). Les personnes à l’esprit tourné vers les choses spirituelles, miséricordieuses, au cœur pur, pacifiques, bien que subissant les outrages et la persécution des hommes, seraient pressenties pour devenir membres du Royaume (Mt 5:3-10 ; Lc 6:23). Le “ joug ” que Jésus invita ce genre de personnes à prendre sur elles représentait la soumission à son autorité royale. Il s’agissait toutefois d’un joug qui était doux, la charge étant légère pour ceux qui étaient ‘ doux de caractère et humbles de cœur ’ comme l’était le Roi (Mt 11:28-30 ; voir aussi 1R 12:12-14 ; Jr 27:1-7). Cela aurait dû réconforter les auditeurs de Jésus, leur donnant l’assurance que son règne n’aurait aucun des défauts trouvés chez de nombreux dirigeants du passé, qu’ils soient Israélites ou non. Cela leur donnait des raisons de croire que son règne n’entraînerait ni impôts pesants, ni servitude, ni exploitation d’aucune forme (voir 1S 8:10-18 ; Dt 17:15-17, 20 ; Ép 5:5). Comme cela ressort de paroles que Jésus prononça plus tard, non seulement le Chef du Royaume à venir prouverait son abnégation au point de donner sa vie en faveur de son peuple, mais encore tous ceux qui lui seraient associés dans ce gouvernement seraient également des personnes qui chercheraient à servir plutôt qu’à être servies. — Mt 20:25-28 ; voir JÉSUS CHRIST (Ses œuvres et ses qualités personnelles).
L’importance d’une soumission volontaire. Jésus lui-même avait le plus profond respect pour la volonté et l’autorité souveraines de son Père (Jn 5:30 ; 6:38 ; Mt 26:39). Aussi longtemps que l’alliance de la Loi serait en vigueur, ses disciples d’origine juive seraient tenus de pratiquer et de soutenir l’obéissance à cette alliance ; quiconque agirait différemment serait rejeté en ce qui concerne son Royaume. Leur respect et leur obéissance devaient cependant venir du cœur ; ils ne devaient pas observer la Loi avec formalisme ou partiellement, en insistant sur des actions précises qu’elle exigeait, mais ils devaient en observer les principes fondamentaux inhérents, qui impliquaient la justice, la miséricorde et la fidélité (Mt 5:17-20 ; 23:23, 24). À un scribe qui reconnut la position unique de Jéhovah et qui admit que “ l’aimer de tout son cœur, et de toute son intelligence, et de toute sa force, et aimer son prochain comme soi-même, vaut bien mieux que tous les holocaustes et sacrifices ”, Jésus dit : “ Tu n’es pas loin du royaume de Dieu. ” (Mc 12:28-34). Ainsi, à tous égards, Jésus établit que Jéhovah Dieu cherche uniquement des sujets volontaires, des personnes qui préfèrent ses voies justes et qui désirent ardemment vivre sous son autorité souveraine.
Relations d’alliance. La dernière soirée qu’il passa avec ses disciples, Jésus leur parla d’une “ nouvelle alliance ” qui entrerait en vigueur en leur faveur à la suite de son sacrifice rédempteur (Lc 22:19, 20 ; voir aussi 12:32) ; lui-même servirait de Médiateur de cette alliance entre Jéhovah le Souverain et ses disciples à lui (1Tm 2:5 ; Hé 12:24). De plus, Jésus conclut personnellement une alliance avec ses disciples “ pour un royaume ”, afin qu’ils lui soient associés dans ses privilèges royaux. — Lc 22:28-30 ; voir ALLIANCE.
Vaincre le monde. Bien qu’ensuite l’arrestation, les procès et l’exécution de Jésus aient donné à penser que sa position royale était incertaine, en réalité ces épreuves marquaient un puissant accomplissement des prophéties divines, et c’est pour cette raison que Dieu les permit (Jn 19:10, 11 ; Lc 24:19-27, 44). En restant fidèle et intègre jusqu’à la mort, Jésus prouva que “ le chef du monde ”, l’Adversaire de Dieu, Satan, n’avait “ aucune prise ” sur lui et que lui, Jésus, avait réellement “ vaincu le monde ”. (Jn 14:29-31 ; 16:33.) De plus, alors même que son Fils était attaché sur le poteau, Jéhovah démontra la supériorité de son pouvoir : la lumière du soleil fut obscurcie un certain temps ; il se produisit également un violent tremblement de terre et le grand rideau du temple se déchira en deux (Mt 27:51-54 ; Lc 23:44, 45). Plus tard, le troisième jour, il donna une preuve encore bien plus formelle de sa Souveraineté en ressuscitant son Fils à la vie en tant qu’esprit, malgré les efforts impuissants des hommes pour empêcher la résurrection en postant des gardes devant la tombe scellée de Jésus. — Mt 28:1-7.
“ Le royaume du Fils de son amour. ” À la Pentecôte 33 de n. è., dix jours après l’ascension de Jésus, ses disciples eurent la preuve qu’il avait été “ élevé à la droite de Dieu ” lorsque Jésus répandit l’esprit saint sur eux (Ac 1:8, 9 ; 2:1-4, 29-33). L’“ alliance nouvelle ” entra alors en vigueur en leur faveur et ils devinrent le noyau d’une nouvelle “ nation sainte ”, l’Israël spirituel. — Hé 12:22-24 ; 1P 2:9, 10 ; Ga 6:16.
Christ était à présent assis à la droite de son Père et il était le Chef de cette congrégation (Ép 5:23 ; Hé 1:3 ; Ph 2:9-11). Les Écritures montrent qu’à partir de la Pentecôte 33 de n. è. un royaume spirituel fut établi sur ses disciples. Lorsqu’il écrivit aux chrétiens de Colosses au Ier siècle, l’apôtre Paul déclara que Jésus Christ avait déjà un royaume : “ [Dieu] nous a délivrés du pouvoir des ténèbres et nous a transférés dans le royaume du Fils de son amour. ” — Col 1:13 ; voir aussi Ac 17:6, 7.
Le royaume du Christ à partir de la Pentecôte 33 de n. è. a été un royaume spirituel dominant sur l’Israël spirituel, les chrétiens qui ont été engendrés de l’esprit de Dieu pour devenir les enfants spirituels de Dieu (Jn 3:3, 5, 6). Lorsque ces chrétiens engendrés de l’esprit recevront leur récompense céleste, ils ne seront plus des sujets terrestres du royaume spirituel du Christ, mais ils seront rois avec le Christ au ciel. — Ré 5:9, 10.
“ Le royaume de notre Seigneur et de son Christ. ” L’apôtre Jean, écrivant vers la fin du Ier siècle de n. è., vit par avance, grâce à une révélation divine, l’époque où Jéhovah Dieu, par le moyen de son Fils, exprimerait d’une façon nouvelle sa domination divine. À ce moment-là, comme au moment où David fit monter l’Arche à Jérusalem, on déclarerait que Jéhovah ‘ a pris sa grande puissance et a commencé à régner ’. Ce serait le temps où des voix fortes dans le ciel proclameraient : “ Le royaume du monde est devenu le royaume de notre Seigneur et de son Christ, et il régnera à tout jamais. ” — Ré 11:15, 17 ; 1Ch 16:1, 31.
C’est “ notre Seigneur ”, le Souverain Seigneur Jéhovah, qui fait valoir son autorité sur “ le royaume du monde ”, établissant une nouvelle expression de sa souveraineté à l’égard de la terre. Il donne à son Fils, Jésus Christ, une fonction auxiliaire dans ce Royaume, de sorte qu’on parle du “ royaume de notre Seigneur et de son Christ ”. Ce Royaume revêt des proportions plus importantes et il est plus étendu que “ le royaume du Fils de son amour ” dont il est question en Colossiens 1:13. “ Le royaume du Fils de son amour ” a commencé à la Pentecôte 33 de n. è. et a eu autorité sur les disciples du Christ oints ; “ le royaume de notre Seigneur et de son Christ ” commence à exister à la fin des “ temps fixés des nations ” et il a autorité sur tous les humains sur la terre. — Lc 21:24.
Après avoir été associé aux responsabilités du “ royaume du monde ”, Jésus Christ prend les mesures nécessaires pour éliminer l’opposition à la souveraineté de Dieu. La première action a lieu dans le domaine céleste ; Satan et ses démons sont vaincus et précipités vers le domaine terrestre. Suit cette proclamation : “ Maintenant sont arrivés le salut, et la puissance, et le royaume de notre Dieu, et le pouvoir de son Christ ! ” (Ré 12:1-10). Durant la courte période qui lui reste, Satan, cet Adversaire principal, continue de réaliser la prophétie de Genèse 3:15 en faisant la guerre au “ reste ” de la “ semence ” de la femme, les “ saints ” qui doivent gouverner avec le Christ (Ré 12:13-17 ; voir aussi Ré 13:4-7 ; Dn 7:21-27). Les “ décrets justes ” de Jéhovah sont néanmoins manifestés, et ses jugements sont exécutés sous forme de plaies sur ceux qui s’opposent à lui, ce qui aboutit à la destruction de Babylone la Grande la mystique, principale persécutrice des serviteurs de Dieu sur la terre. — Ré 15:4 ; 16:1–19:6.
Ensuite, “ le royaume de notre Seigneur et de son Christ ” envoie ses armées célestes contre les dirigeants de tous les royaumes terrestres et leurs armées dans la bataille d’Har-Maguédôn, et les réduit à néant (Ré 16:14-16 ; 19:11-21). Cela constitue la réponse à cette demande faite à Dieu : “ Que ton royaume vienne. Que ta volonté se fasse, comme dans le ciel, aussi sur la terre. ” (Mt 6:10). Satan est alors jeté dans l’abîme, et une période de mille ans commence durant laquelle Christ Jésus et ses adjoints règnent en qualité de rois et prêtres sur les habitants de la terre. — Ré 20:1, 6.
Christ “ remettra le royaume ”. L’apôtre Paul décrit aussi le règne de Christ durant sa présence. Après avoir ressuscité ses disciples, Christ entreprend de réduire “ à rien tout gouvernement et tout pouvoir et puissance ” (ce qui désigne logiquement tout gouvernement, tout pouvoir et toute puissance opposés à la volonté souveraine de Dieu). Puis, à la fin de son Règne millénaire, il “ remettra le royaume à son Dieu et Père ”, se soumettant lui-même à “ Celui qui lui a soumis toutes choses, afin que Dieu soit toutes choses pour tous ”. — 1Co 15:21-28.
Puisque Christ “ remettra le royaume à son Dieu et Père ”, en quel sens son Royaume est-il “ éternel ”, comme le déclarent maintes fois les Écritures (2P 1:11 ; Is 9:7 ; Dn 7:14 ; Lc 1:33 ; Ré 11:15) ? Son Royaume “ ne sera jamais supprimé ” ; ses réalisations dureront pour toujours ; Jésus sera éternellement honoré pour son rôle de Roi messianique. — Dn 2:44.
Durant le Règne de mille ans, la domination de Christ à l’égard de la terre implique une action sacerdotale en faveur des humains obéissants (Ré 5:9, 10 ; 20:6 ; 21:1-3). Par ce moyen prend fin le règne du péché et de la mort sur les humains obéissants qui étaient soumis à leur “ loi ” ; les facteurs dominants sont la faveur imméritée et la justice (Rm 5:14, 17, 21). Puisque le péché et la mort doivent être totalement ôtés des habitants de la terre, il n’est plus nécessaire que Jésus serve d’“ assistant auprès du Père ” dans le sens où il fait propitiation pour les péchés des humains imparfaits (1Jn 2:1, 2). Cela ramène l’humanité à la condition dans laquelle se trouvait à l’origine l’homme parfait Adam en Éden. Tant qu’il fut parfait, Adam n’avait besoin de personne qui s’entremette entre lui et Dieu pour faire propitiation. De même, donc, au terme du Règne millénaire de Jésus, les habitants de la terre seront en position, mais aussi placés devant la responsabilité, de répondre de leurs actes devant Jéhovah Dieu, le Juge Suprême, sans avoir recours à personne qui soit leur intermédiaire légal, ou assistant. Jéhovah, le Pouvoir souverain, devient de la sorte “ toutes choses pour tous ”. Cela signifie que le dessein divin de “ réunir toutes choses de nouveau dans le Christ, les choses qui sont dans les cieux et les choses qui sont sur la terre ”, aura été entièrement accompli. — 1Co 15:28 ; Ép 1:9, 10.
Le Règne millénaire de Jésus aura pleinement atteint son but. La terre, qui aura été un foyer de rébellion, aura été ramenée à une condition intacte, pure et incontestée dans le domaine du Souverain de l’univers. Il ne restera pas de royaume auxiliaire entre Jéhovah et l’humanité obéissante.
Ensuite, cependant, l’intégrité et l’attachement de tous ces sujets terrestres sont une dernière fois mis à l’épreuve. Satan est délié de son confinement dans l’abîme. Ceux qui cèdent à sa séduction le font à propos de la même question qui fut soulevée en Éden : le bon droit de Dieu dans l’exercice de sa souveraineté. C’est ce qu’indique le fait qu’ils attaquent “ le camp des saints et la ville bien-aimée ”. Puisque cette question a été tranchée juridiquement et que le Tribunal des cieux a clos le débat, aucune rébellion prolongée n’est tolérée en cette affaire. Ceux qui ne restent pas fidèlement du côté de Dieu ne pourront pas faire appel à Christ Jésus en tant qu’‘ assistant propitiatoire ’, mais c’est Jéhovah Dieu qui sera “ toutes choses ” pour eux, sans possibilité d’appel ou de médiation. Tous les rebelles, esprits et humains, subissent la sentence divine de la destruction dans “ la deuxième mort ”. — Ré 20:7-15.