ABÎME
Selon A Greek and English Lexicon to the New Testament de J. Parkhurst (Londres, 1845, p. 2), le grec abussos veut dire “ très ou extrêmement profond ”. Selon le Dictionnaire grec-français de A. Bailly, L. Séchan et P. Chantraine (Paris, 1963, p. 4), il signifie “ sans fond, d’une profondeur immense ”. La Septante l’utilise régulièrement pour traduire l’hébreu tehôm (abîme d’eau), comme en Genèse 1:2 ; 7:11.
Abussos apparaît neuf fois dans les Écritures grecques chrétiennes, dont sept dans le livre de la Révélation. C’est de “ l’abîme ” que sortent les sauterelles symboliques conduites par leur roi Abaddôn ou Apollyôn, “ l’ange de l’abîme ”. (Ré 9:1-3, 11.) On lit aussi que la “ bête sauvage ”, qui fait la guerre aux “ deux témoins ” de Dieu et les tue, monte “ de l’abîme ”. (Ré 11:3, 7.) Révélation 20:1-3 indique que Satan sera lancé dans l’abîme pour mille ans, sort qu’une légion de démons supplièrent un jour Jésus de ne pas leur faire subir. — Lc 8:31.
Sens biblique. Il est à remarquer que la Septante ne traduit pas l’hébreu sheʼôl par abussos ; et comme des créatures spirituelles sont lancées dans l’abîme, il serait incorrect de restreindre le sens de ce mot à celui de shéol ou d’hadès, d’autant que ces deux termes désignent sans ambiguïté la tombe où vont tous les humains sur la terre (Jb 17:13-16 ; voir HADÈS ; SHÉOL). L’abîme n’est pas “ le lac de feu ”, car c’est après avoir été libéré de l’abîme que Satan est jeté dans le lac de feu (Ré 20:1-3, 7-10). Les paroles de Paul en Romains 10:7, qui présentent Christ dans l’abîme, écartent également cette hypothèse et montrent, en outre, que l’abîme est différent du Tartare. — Voir TARTARE.
Romains 10:6, 7 permet d’éclaircir le sens de “ l’abîme ” ; on y lit : “ Mais la justice provenant de la foi parle ainsi : ‘ Ne dis pas dans ton cœur : “ Qui montera au ciel ? ” c’est-à-dire : pour faire descendre Christ ; ou : “ Qui descendra dans l’abîme ? ” c’est-à-dire : pour faire remonter Christ d’entre les morts. ’ ” (Voir Dt 30:11-13). Il est évident que “ l’abîme ” se rapporte ici au lieu où Christ Jésus passa trois jours et d’où son Père le ressuscita (voir Ps 71:19, 20 ; Mt 12:40). Révélation 20:7 qualifie l’abîme de “ prison ” ; le confinement de Jésus dans l’inactivité totale à la suite de sa mort s’accorde tout à fait avec cette appellation. — Voir aussi Ac 2:24 ; 2S 22:5, 6 ; Jb 38:16, 17 ; Ps 9:13 ; 107:18 ; 116:3.
À propos du sens premier “ sans fond ”, caractéristique de “ l’abîme ”, il est intéressant de noter ce qu’écrit une encyclopédie (Encyclopædia of Religion and Ethics, par J. Hastings, 1913, vol. I, p. 54) concernant Romains 10:6, 7 : “ Le langage de saint Paul évoque l’idée d’un domaine immense, qu’on tenterait vainement d’explorer. ” Paul établit un contraste entre, d’une part, l’inaccessibilité du “ ciel ” et de “ l’abîme ” et, d’autre part, l’accessibilité à la justice grâce à la foi. Cela est illustré par l’emploi que Paul fit du terme dérivé bathos en Romains 11:33 : “ Ô profondeur [bathos] de la richesse et de la sagesse et de la connaissance de Dieu ! Que ses jugements sont inscrutables et ses voies introuvables ! ” (Voir aussi 1Co 2:10 ; Ép 3:18, 19). Par conséquent, en harmonie avec Romains 10:6, 7, le lieu représenté par “ l’abîme ” semble aussi être inaccessible à tous, sauf à Dieu ou à l’ange auquel il a remis “ la clé de l’abîme ”. (Ré 20:1.) A Greek-English Lexicon de H. Liddell et R. Scott (p. 4) donne, entre autres sens du mot abussos, celui de “ vide infini ”.
La forme plurielle du mot hébreu metsôlah (ou metsoulah) est traduite par “ grand abîme ” en Psaume 88:6 et signifie littéralement “ abîmes ” ou “ profondeurs ”. (Voir aussi Ze 10:11.) Ce mot est de la famille de tsoulah, qui veut dire “ abîme d’eau ”. — Is 44:27.