EXODE
Délivrance de la nation d’Israël de l’esclavage en Égypte. Après lui avoir promis que sa semence hériterait du pays, Jéhovah déclara à Abraham (avant 1933 av. n. è.) : “ Sache bien que ta semence deviendra résidente étrangère dans un pays qui ne sera pas le sien ; ils devront les servir et vraiment ceux-ci les affligeront pendant quatre cents ans. Mais la nation qu’ils serviront, je la juge et, après cela, ils sortiront avec de grands biens. [...] Mais à la quatrième génération, ils reviendront ici, car la faute des Amorites n’est pas encore complète. ” — Gn 15:13-16.
Il est clair que la période d’affliction de 400 ans ne devait pas commencer avant l’apparition de la “ semence ” promise. Quand Abraham s’était rendu en Égypte, pendant une période de famine en Canaan, et qu’il y avait eu quelques ennuis avec le pharaon, il n’avait pas encore d’enfant (Gn 12:10-20). Peu après la déclaration de Jéhovah relative aux 400 ans d’affliction, alors qu’Abraham était âgé de 86 ans (en 1932 av. n. è.), son esclave et concubine égyptienne lui donna un fils, Yishmaël. Mais c’est seulement 14 ans plus tard (1918 av. n. è.) que Sara, la femme libre d’Abraham, mit au monde un fils, Isaac. Dieu désigna ce fils comme celui par qui viendrait la Semence promise. Cependant, le temps n’était pas encore venu pour Dieu de donner le pays de Canaan à Abraham ou à sa semence. Comme prédit, ils furent donc ‘ résidents étrangers dans un pays qui n’était pas le leur ’. — Gn 16:15, 16 ; 21:2-5 ; Hé 11:13.
La date de l’Exode. Quand ces 400 ans d’affliction commencèrent-ils et quand prirent-ils fin ? La tradition juive les fait débuter à la naissance d’Isaac. Toutefois, les premières réelles marques d’affliction ne se manifestèrent que le jour où Isaac fut sevré. Par conséquent, tout indique que l’affliction commença en 1913 av. n. è., alors qu’Isaac avait environ 5 ans et que Yishmaël en avait 19. C’est à ce moment que Yishmaël, “ celui qui était né selon la chair ”, “ persécutait celui qui était né selon l’esprit ”. (Ga 4:29.) Par haine et jalousie, Yishmaël, qui était en partie égyptien, se mit à “ plaisanter ” aux dépens du tout jeune enfant Isaac, et c’était bien plus qu’une simple querelle enfantine (Gn 21:9). Selon d’autres traductions, Yishmaël ‘ se moquait ’ ou ‘ se livrait à des railleries ’. (Od ; ZK.) L’affliction de la semence d’Abraham se prolongea pendant la vie d’Isaac. Si, devenu adulte, celui-ci fut béni par Jéhovah, il fut quand même persécuté par les habitants de Canaan qui, en lui créant de nombreux ennuis, l’obligèrent à circuler de lieu en lieu (Gn 26:19-24, 27). Enfin, au soir de la vie de Jacob, fils d’Isaac, la “ semence ” annoncée se rendit en Égypte pour y résider. Plus tard, elle y fut réduite en esclavage.
Par quel élément intrinsèque la Bible indique-t-elle la date de l’exode d’Israël depuis l’Égypte ?
Ces 400 ans d’affliction allèrent donc de 1913 à 1513 av. n. è. Ce fut aussi une période de sursis, de répit, que Dieu accorda aux Cananéens, dont les Amorites constituaient une des tribus principales. Au terme de cette période, leur faute serait complète ; ils mériteraient indéniablement d’être totalement expulsés du pays. La première mesure que Dieu prendrait à cet effet consisterait à s’occuper de son peuple en Égypte, à le libérer de l’esclavage et à le placer sur le chemin du retour à la Terre promise. — Gn 15:13-16.
Les 430 ans. En Exode 12:40, 41, un autre indice de calcul est fourni, en ces termes : “ Et l’habitation des fils d’Israël, qui avaient habité en Égypte, fut de quatre cent trente ans. Et il arriva à la fin des quatre cent trente ans, oui il arriva, en ce jour-là même, que toutes les armées de Jéhovah sortirent du pays d’Égypte. ” À propos de l’expression “ qui avaient habité ”, voici ce qu’on lit dans la note relative à Exode 12:40 : “ En héb[reu] ce [verbe] est au pl[uriel]. Le pron[om] relatif ʼashèr, ‘ qui ’, peut se rapporter aux ‘ fils d’Israël ’ plutôt qu’à ‘ l’habitation ’. ” La Septante rend le verset Ex 12:40 comme suit : “ Mais l’habitation des fils d’Israël durant laquelle ils habitèrent dans le pays d’Égypte et dans le pays de Canaan [fut] de quatre cent trente ans. ” Le Pentateuque samaritain met : “ [...] dans le pays de Canaan et dans le pays d’Égypte. ” De toutes ces versions, il ressort que les 430 ans représentaient une période plus étendue que le séjour des Israélites en Égypte.
L’apôtre Paul montre que les 430 ans (d’Ex 12:40) commencèrent lors de la validation de l’alliance abrahamique et qu’ils s’achevèrent avec l’Exode. Il déclare : ‘ D’autre part, je dis ceci : Quant à l’alliance [abrahamique] antérieurement validée par Dieu, la Loi qui a paru quatre cent trente ans plus tard [l’année de l’Exode] ne l’annule pas, de manière à abolir la promesse. [...] alors que Dieu l’a donnée volontiers à Abraham par le moyen d’une promesse. ’ — Ga 3:16-18.
Combien de temps s’écoula-t-il donc entre la validation de l’alliance abrahamique et l’entrée des Israélites en Égypte ? Selon Genèse 12:4, 5, Abraham avait 75 ans lorsqu’il quitta Harân et traversa l’Euphrate pour se rendre en Canaan, et c’est à ce moment-là que prit effet l’alliance abrahamique, la promesse que Dieu lui avait faite à Our des Chaldéens. D’après les renseignements généalogiques de Genèse 12:4 ; 21:5 ; 25:26 et la déclaration de Jacob en Genèse 47:9, on peut déduire que 215 ans s’écoulèrent entre la validation de l’alliance abrahamique et l’entrée de Jacob et de sa famille en Égypte. Cela indiquerait que les Israélites vécurent vraiment en Égypte 215 ans (1728-1513 av. n. è.). Ce chiffre s’harmonise avec d’autres données chronologiques.
De l’Exode à la construction du temple. Deux autres déclarations d’intérêt chronologique concordent avec ce calcul et viennent l’étayer. Ainsi, Salomon entreprit la construction du temple dans la quatrième année de son règne (1034 av. n. è.), qui était aussi, selon 1 Rois 6:1, “ la quatre cent quatre-vingtième année ” après l’Exode (1513 av. n. è.).
‘ Environ 450 ans. ’ Il y a encore un discours que Paul prononça à Antioche de Pisidie, discours couché par écrit en Actes 13:17-20, dans lequel il parle d’une période d’“ environ quatre cent cinquante ans ”. Il commence son exposé sur l’histoire d’Israël par le moment où Dieu “ a, dit-il, choisi nos ancêtres ”, c’est-à-dire le moment où Isaac naquit pour être la semence de la promesse (1918 av. n. è.). (En effet, la naissance d’Isaac élucida l’interrogation sur l’identité de celui que Dieu reconnaîtrait comme la semence, question qui s’était posée en raison de la stérilité de Sara.) Depuis ce point de départ, Paul récapitule les actions que Dieu a faites en faveur de sa nation, la nation choisie, et en arrive au moment où Dieu ‘ lui a donné des juges jusqu’à Samuel le prophète ’. Cette période d’“ environ quatre cent cinquante ans ” part donc, de toute évidence, de la naissance d’Isaac en 1918 av. n. è. et va jusqu’à 1467 av. n. è., soit 46 ans après l’Exode qui eut lieu en 1513 av. n. è. (Les Juifs passèrent 40 ans à errer dans le désert et 6 ans à conquérir le pays de Canaan.) (Dt 2:7 ; Nb 9:1 ; 13:1, 2, 6 ; Jos 14:6, 7, 10). Cette période totale correspond nettement à l’approximation de Paul, savoir “ environ quatre cent cinquante ans ”. Ces deux indications chronologiques confirment que l’Exode eut bien lieu en 1513 av. n. è. et s’accordent également avec la chronologie biblique concernant les rois et les juges d’Israël. — Voir CHRONOLOGIE (De 1943 av. n. è. à l’Exode).
Autres opinions. Cette date de l’Exode, 1513 av. n. è., et, partant, celle de l’invasion de Canaan par les Israélites et de la chute de Jéricho en 1473 av. n. è., 40 ans après l’Exode, sont jugées trop anciennes par des critiques qui situent ces événements au XIVe, voire au XIIIe siècle, av. n. è. Toutefois, quand certains archéologues situent la chute de Jéricho au XIIIe siècle av. n. è., ils se fondent, non sur des documents ou des témoignages historiques de l’Antiquité, mais sur la découverte de poteries. La datation par le moyen de poteries est manifestement très aléatoire, ce qu’ont démontré les fouilles faites à Jéricho. Les découvertes qu’on y a faites ont amené les archéologues à des conclusions et à des datations contradictoires. — Voir ARCHÉOLOGIE (Différences dans les dates) ; CHRONOLOGIE (La datation archéologique).
Il en va de même des égyptologues : les différences dans leurs datations des dynasties d’Égypte sont parfois de l’ordre de plusieurs siècles, si bien que leurs dates ne sont utilisables pour aucune période précise. C’est pourquoi il est impossible d’identifier avec certitude le pharaon de l’Exode. Certains pensent qu’il s’agissait de Thoutmosis III, d’autres d’Aménophis II, d’autres encore de Ramsès II, etc., mais dans chaque cas les données de départ sont très incertaines.
Authenticité du récit de l’Exode. Certains mettent en doute le récit de l’Exode parce que les pharaons d’Égypte n’en ont jamais fait état. Cependant, cela n’a rien de surprenant, car des rois d’époques plus récentes n’ont enregistré que le récit de leurs victoires, et non celui de leurs défaites, et ont souvent essayé d’effacer tout renseignement historique susceptible de ternir leur image personnelle, celle de leur nation, ou l’idéologie qu’ils s’efforçaient d’inculquer à leurs sujets. Récemment encore, des dirigeants ont tenté de faire disparaître les œuvres et le renom de leurs prédécesseurs. Tout ce qui était jugé embarrassant ou déplaisant était omis dans les inscriptions égyptiennes, ou effacé dès que possible. Ainsi, le nom et l’effigie de la reine Hatshepsout ont été effacés par son successeur, Thoutmosis III, dans une inscription monumentale sur la pierre découverte à Deïr el-Bahari en Égypte. — Voir Archaeology and Bible History, par J. Free, 1964, p. 98, et photo en regard de la p. 94.
Vers 280 av. n. è., Manéthon, prêtre égyptien qui apparemment détestait les Juifs, écrivit en grec. Selon l’historien juif Josèphe, qui le cite, Manéthon affirme que les aïeux des Juifs, “ venus au nombre de plusieurs myriades en Égypte, établirent leur domination sur les habitants ”. Josèphe poursuit en disant que Manéthon ‘ avoue lui-même que, chassés plus tard, ils occupèrent la Judée actuelle, fondèrent Jérusalem et bâtirent le temple ’. — Contre Apion, I, 228 (XXVI).
Bien que le récit de Manéthon soit dans son ensemble sans valeur historique, le fait est qu’il parle de la présence des Juifs en Égypte et de leur sortie de ce pays. Selon Josèphe, dans d’autres écrits Manéthon identifie Moïse à Osarseph, un prêtre égyptien. Cela montre que, même si les monuments égyptiens ne le signalent pas, les Juifs vécurent en Égypte et Moïse fut leur conducteur. Josèphe parle d’un autre historien égyptien, Chérémon, qui dit que Joseph et Moïse furent chassés d’Égypte en même temps ; Josèphe cite aussi un certain Lysimaque qui raconte une histoire semblable. — Contre Apion, I, 228, 238 (XXVI) ; 288, 290 (XXXII) ; 299 (XXXIII) ; 304-311 (XXXIV).
Nombre des personnes qui participèrent à l’Exode. En Exode 12:37 est donné le chiffre rond de 600 000 “ hommes de pied [...] robustes ” sans compter les “ petits ”. Lors du recensement effectué environ un an après l’Exode et rapporté en Nombres 1:2, 3, 45, 46, on dénombra 603 550 hommes depuis l’âge de 20 ans et au-dessus en plus des Lévites (Nb 2:32, 33), lesquels comptaient 22 000 hommes depuis l’âge d’un mois et au-dessus (Nb 3:39). Le terme hébreu gevarim (hommes robustes) n’inclut pas les femmes (voir Jr 30:6). Quant au mot “ petits ”, il traduit l’hébreu taph et désigne ceux qui vont à pas menus (voir Is 3:16). La plupart de ces “ petits ” durent certainement être portés, ou du moins ne purent pas marcher pendant tout le voyage.
“ À la quatrième génération. ” Il faut se rappeler que Jéhovah avait dit à Abraham que ses descendants reviendraient en Canaan à la quatrième génération (Gn 15:16). Pendant la totalité des 430 ans entre le moment où l’alliance abrahamique prit effet et l’Exode, il y eut plus de quatre générations, même si on tient compte de la grande longévité des hommes de l’époque, d’après le récit. Toutefois, les Israélites ne résidèrent effectivement en Égypte que 215 ans. Si on prend l’exemple d’une seule tribu d’Israël, celle de Lévi, on peut compter les ‘ quatre générations ’ qui suivirent l’entrée en Égypte de la façon suivante : 1) Lévi, 2) Qehath, 3) Amram et 4) Moïse. — Ex 6:16, 18, 20.
Puisque 600 000 hommes robustes sortirent d’Égypte, sans compter les femmes et les enfants, l’ensemble du peuple dépassait certainement les trois millions de personnes. Bien que certains le contestent, ce chiffre n’a rien de déraisonnable. En effet, si de Lévi à Moïse il n’y eut que quatre générations en raison de la longévité exceptionnelle des individus concernés, chacun d’eux put connaître plusieurs générations de descendants au cours de sa vie. Aujourd’hui encore, un homme de 60 ou de 70 ans a souvent des petits-enfants et parfois même des arrière-petits-enfants (et donc quatre générations vivent simultanément).
Un accroissement extraordinaire. Le récit rapporte : “ Et les fils d’Israël devinrent féconds et se mirent à pulluler ; ils se multipliaient et devenaient de plus en plus forts, de façon tout à fait extraordinaire, si bien que le pays se remplit d’eux. ” (Ex 1:7). Effectivement, ils devinrent si nombreux que le roi d’Égypte dit : “ Voyez ! Le peuple des fils d’Israël est plus nombreux et plus fort que nous. ” “ Mais plus on les opprimait, plus ils se multipliaient et plus ils se répandaient, si bien qu’on ressentit un effroi mêlé d’aversion à cause des fils d’Israël. ” (Ex 1:9, 12). En outre, quand on sait que la polygamie et le concubinage étaient pratiqués et que certains Israélites épousèrent des Égyptiennes, on comprend comment l’accroissement put devenir tel que la population masculine adulte ait atteint 600 000.
Soixante-dix âmes de la maisonnée immédiate de Jacob descendirent en Égypte, ou y naquirent ensuite (Gn 46). Si on ne compte pas Jacob, ses 12 fils, sa fille Dina, sa petite-fille Sérah, les trois fils de Lévi et quelques autres du nombre des chefs de famille qui commencèrent à se multiplier en Égypte, il ne reste que 50 personnes sur ces 70 (les fils de Lévi sont écartés parce que les Lévites ne furent pas, plus tard, comptés dans le chiffre de 603 550). À partir de ce chiffre très raisonnable de 50 chefs de famille, et compte tenu de la déclaration biblique selon laquelle “ les fils d’Israël devinrent féconds et se mirent à pulluler ; ils se multipliaient et devenaient de plus en plus forts, de façon tout à fait extraordinaire, si bien que le pays se remplit d’eux ” (Ex 1:7), il est facile de démontrer qu’il pouvait y avoir 600 000 hommes en âge de faire l’armée, âgés de 20 à 50 ans, au moment de l’Exode. Considérons ce qui suit :
Étant donné que les familles de l’époque étaient très grandes et que les Israélites désiraient avoir des enfants pour accomplir la promesse de Dieu, il n’est pas exagéré de compter que chaque chef de famille ait engendré, entre l’âge de 20 ans et l’âge de 40 ans, une moyenne de 10 enfants (la moitié étant des garçons). Par souci de modération, on pourrait considérer que les 50 du départ qui devinrent chefs de famille ne commencèrent à avoir des enfants que 25 ans après leur entrée en Égypte. Par ailleurs, comme la mort ou d’autres circonstances purent soit empêcher certains enfants mâles d’être un jour féconds, soit leur faire cesser d’engendrer avant la limite hypothétique de 40 ans, on pourrait aussi réduire de 20 % le nombre d’hommes qui devinrent pères. En termes simples, cela signifie que, sur une période de 20 ans, seulement 200 fils, au lieu de 250, nés aux 50 chefs de famille du départ, auraient eu une descendance.
Le décret de Pharaon. Un autre facteur doit encore être pris en considération : le décret de Pharaon ordonnant de tuer tous les enfants mâles à la naissance. Ce décret semble avoir été plutôt inefficace et de courte durée. Aaron naquit trois ans avant Moïse (soit en 1597 av. n. è.), et apparemment ce décret n’était pas encore en vigueur. La Bible établit clairement que le décret de Pharaon n’eut pas beaucoup d’effet. Les Hébreues Shiphra et Poua, qui étaient probablement à la tête de la profession des accoucheuses, ayant d’autres femmes sous leurs ordres, ne respectèrent pas l’injonction du roi. Apparemment, elles ne la transmirent pas aux autres accoucheuses. Aussi lit-on : “ Le peuple croissait en nombre et devenait très fort. ” Pharaon ordonna alors à tout son peuple de jeter dans le Nil tout fils israélite nouveau-né (Ex 1:15-22). Mais il ne semble pas que les Égyptiens du peuple aient haï à ce point les Hébreux. Même la fille de Pharaon sauva Moïse. De plus, il se peut que Pharaon ait vite réalisé qu’il allait perdre de précieux esclaves si le décret restait en vigueur. On sait que, par la suite, le pharaon de l’Exode refusa de laisser partir les Hébreux précisément pour la raison qu’ils constituaient une main-d’œuvre appréciable.
Toutefois, pour une estimation encore plus modérée, on pourrait réduire de près d’un tiers le nombre de garçons qui survécurent sur une période de cinq ans afin de représenter les effets possibles de l’édit infructueux de Pharaon.
Un calcul. Même en procédant à toutes ces réductions, on peut penser que la population s’accrut quand même, rapidement, et ce grâce à la bénédiction de Dieu. Le nombre des enfants nés au cours de chaque période de cinq ans à partir de 1563 av. n. è. (c’est-à-dire 50 ans avant l’Exode) jusqu’en 1533 (soit 20 ans avant l’Exode) pourrait se calculer de la façon suivante :
ACCROISSEMENT DE LA POPULATION MASCULINE
Av. n. è.
Fils nés
de 1563 à 1558
47 350
de 1558 à 1553
62 300
de 1553 à 1548
81 800
de 1548 à 1543
103 750
de 1543 à 1538
133 200
de 1538 à 1533
172 250
—
Total 600 650*
* Population théorique des hommes âgés de 20 à 50 ans au moment de l’Exode (1513 av. n. è.)
Il convient de noter qu’en modifiant même légèrement la méthode de calcul, par exemple en attribuant en moyenne un fils de plus à chaque père, ce nombre serait porté à plus d’un million.
À combien s’éleva le nombre de personnes qui quittèrent l’Égypte sous la direction de Moïse ?
Outre les 600 000 hommes robustes dont parle la Bible, il y avait un grand nombre d’hommes plus âgés, un plus grand nombre encore de femmes et d’enfants et “ un peuple mêlé, immense ”, de non-Israélites (Ex 12:38). Ainsi, en tout, ce sont peut-être plus de trois millions de personnes qui montèrent d’Égypte. Rien d’étonnant à ce que la couronne égyptienne ait répugné à voir partir un groupe si important d’esclaves. Elle perdait ainsi un précieux atout économique.
La Bible atteste qu’il y avait un nombre effrayant d’hommes capables de combattre. On lit : “ Et Moab eut grand-peur devant le peuple, car il était nombreux ; et Moab ressentait un effroi mêlé d’aversion devant les fils d’Israël. ” (Nb 22:3). La crainte qui envahit les Moabites était, bien sûr, due en partie au fait que Jéhovah avait accompli des prodiges en faveur des Israélites, mais elle était due également à leur grand nombre, ce qui n’aurait pu être dit de quelques milliers de personnes seulement. La population des Israélites augmenta finalement très peu pendant leur séjour dans le désert, car beaucoup y périrent en raison de leur infidélité. — Nb 26:2-4, 51.
Dans le recensement effectué peu après l’Exode, les Lévites furent dénombrés séparément, et ceux qui avaient plus d’un mois étaient 22 000 (Nb 3:39). On pourrait se demander pourquoi, parmi les 12 autres tribus d’Israël, il n’y avait que 22 273 premiers-nés mâles d’un mois et plus (Nb 3:43). On peut le comprendre aisément lorsqu’on sait que les chefs de famille n’étaient pas comptés, qu’en raison de la polygamie un homme pouvait avoir de nombreux fils mais un seul premier-né, et que seul le fils premier-né de l’homme était compté et non celui de la femme.
Les questions en jeu. D’après la promesse que Dieu avait faite à Abraham, le temps était venu pour Lui de délivrer Israël du “ four à fondre le fer ” qu’était l’Égypte. En vertu de cette promesse, Jéhovah considérait Israël comme son fils premier-né. Lorsque Jacob descendit en Égypte avec sa maisonnée, il y vint de son plein gré, mais par la suite ses descendants devinrent esclaves. La nation qu’ils formaient, Jéhovah la chérissait comme son fils premier-né, et il avait le droit légal de les libérer d’Égypte sans payer de prix. — Dt 4:20 ; 14:1, 2 ; Ex 4:22 ; 19:5, 6.
Pharaon s’opposait au dessein de Jéhovah, car il ne voulait pas perdre cette grande nation d’esclaves. En outre, quand Moïse vint lui demander, au nom de Jéhovah, de renvoyer les Israélites afin qu’ils célèbrent à Dieu une fête dans le désert, Pharaon demanda : “ Qui est Jéhovah pour que j’obéisse à sa voix en renvoyant Israël ? Je ne connais pas du tout Jéhovah. ” (Ex 5:2). Pharaon se considérait comme un dieu et ne reconnaissait pas l’autorité de Jéhovah, bien qu’il eût sans doute entendu plusieurs fois les Hébreux utiliser ce nom. Depuis le début, le peuple de Jéhovah connaissait son nom ; Abraham s’était même adressé à Dieu en l’appelant Jéhovah. — Gn 2:4 ; 15:2.
L’attitude et les actions de Pharaon créèrent une situation qui soulevait la question de la Divinité. Il fallait maintenant que Jéhovah Dieu s’élève au-dessus des dieux d’Égypte, y compris de Pharaon, qui était révéré comme un dieu. C’est ce qu’il fit en infligeant dix plaies à l’Égypte, qui amenèrent la libération d’Israël (voir DIEUX ET DÉESSES [Les dix plaies]). Lors de la dernière plaie, la mort des premiers-nés, les Israélites reçurent l’ordre d’être prêts à quitter le pays au moment du repas de la Pâque. S’ils partirent à la hâte, pressés par les Égyptiens qui disaient : “ Nous sommes tous comme si nous étions déjà morts ”, ils ne s’en allèrent cependant pas les mains vides (Ex 12:33). Ils emmenèrent leur gros et leur petit bétail, leur pâte avant qu’elle ait fermenté et leurs pétrins. En plus, les Égyptiens donnèrent aux Israélites ce qu’ils demandaient, des objets d’argent, des objets d’or et des manteaux. Soit dit en passant, ce n’était pas du vol. Les Égyptiens n’avaient pas le droit de réduire Israël en esclavage, aussi devaient-ils au peuple son salaire. — Ex 12:34-38.
Avec Israël sortit “ un peuple mêlé, immense ”. (Ex 12:38.) Ces gens étaient tous des adorateurs de Jéhovah, puisqu’ils s’étaient préparés à partir avec Israël pendant que les Égyptiens enterraient leurs morts. Ils avaient observé la Pâque, sinon ils auraient été pris par le deuil et les rites funéraires de l’Égypte. Ce peuple se composait peut-être dans une certaine mesure de personnes plus ou moins apparentées par mariage aux Israélites. Par exemple, de nombreux Israélites avaient épousé des Égyptiennes, et des femmes d’Israël avaient épousé des Égyptiens. Témoin le cas de l’homme qui fut mis à mort dans le désert pour avoir injurié le nom de Jéhovah. C’était le fils d’un Égyptien, tandis que sa mère était Shelomith de la tribu de Dân (Lv 24:10, 11). On peut aussi remarquer que Jéhovah donna des instructions permanentes relatives aux conditions que les résidents étrangers et les esclaves devraient remplir pour manger la Pâque lorsqu’Israël entrerait en Terre promise. — Ex 12:25, 43-49.
L’itinéraire de l’Exode. Les Israélites étaient certainement dispersés en différents lieux quand ils commencèrent à quitter l’Égypte ; au départ, ils ne formaient probablement pas un seul groupe. Certains se joignirent peut-être au groupe principal au fur et à mesure de sa progression. Le point de départ fut Ramsès, soit une ville, soit un district portant ce nom, et la première étape du voyage fut Soukkoth (Ex 12:37). L’hypothèse de certains biblistes est que Moïse partit de Ramsès et que les Israélites se rassemblèrent de tout le pays de Goshèn à Soukkoth, le point de ralliement. — CARTE, vol. 1, p. 536.
Les Israélites avaient quitté l’Égypte à la hâte, bousculés par les Égyptiens, mais pour autant ils n’étaient absolument pas désorganisés : “ C’est en formation de combat que les fils d’Israël montèrent du pays d’Égypte ”, peut-être divisés en cinq parties comme une armée, avec une avant-garde, une arrière-garde, un corps principal et deux ailes. Outre la direction compétente de Moïse, Jéhovah rendit manifeste sa propre direction, au moins dès Étham où ils campèrent, en produisant une colonne de nuage qui les guidait le jour et se transformait en colonne de feu pour les éclairer la nuit. — Ex 13:18-22.
Par le plus court chemin, il leur aurait fallu parcourir environ 400 km pour aller de la région située au N. de Memphis jusqu’à, par exemple, Lakish en Terre promise. Mais cet itinéraire aurait amené les Israélites à longer la côte méditerranéenne et le pays des Philistins. Autrefois, leurs ancêtres Abraham et Isaac avaient eu des difficultés avec cette nation. Sachant qu’une attaque des Philistins les découragerait, mais aussi qu’ils ne connaissaient rien à la guerre et qu’ils avaient avec eux leurs familles et leurs troupeaux, Dieu ordonna aux Israélites de faire demi-tour et de camper devant Pihahiroth, entre Migdol et la mer, en vue de Baal-Tsephôn. Là, ils campèrent près de la mer. — Ex 14:1, 2.
Puisqu’on ne peut identifier précisément les lieux mentionnés dans le récit, il est impossible de déterminer avec certitude l’itinéraire que les Israélites suivirent pour se rendre de Ramsès à la mer Rouge. La plupart des ouvrages de référence ont opté pour indiquer qu’ils traversèrent ce qu’on appelle le ouadi Toumilat dans la région du Delta, en Égypte. Cet itinéraire s’appuie toutefois sur l’identification de Ramsès à un lieu situé dans l’angle nord-est de la région du Delta. Cependant, John Wilson, professeur d’égyptologie, a déclaré : “ Malheureusement, les spécialistes ne s’accordent pas sur l’emplacement précis de Ramsès. Les pharaons Ramsès, particulièrement Ramsès II, donnaient volontiers leur nom à des villes. En outre, on a mis au jour des documents relatifs à cette cité dans des villes du Delta qui ne sauraient sérieusement prétendre avoir été son emplacement. ” — The Interpreter’s Dictionary of the Bible, par G. Buttrick, 1962, vol. 4, p. 9.
Différents lieux ont été proposés, ont été considérés comme assez probables pendant un temps, puis ont été rejetés en faveur d’autres possibilités. Beaucoup penchent pour Tanis (aujourd’hui San el-Hagar), située à quelques kilomètres au S. de la ville côtière méditerranéenne de Port-Saïd, mais aussi pour Qântir, qui se trouve quelque 24 km plus au S. À propos du premier lieu, Tanis, on note qu’un texte égyptien mentionne Tanis et (Per)-Ramsès comme deux endroits distincts, et non le même, et qu’au moins une partie des objets exhumés à Tanis se révèlent provenir d’autres lieux. Ainsi, John Wilson déclare plus loin que “ rien ne prouve que les inscriptions comportant le nom Ramsès sont là sur leur lieu d’origine ”. En ce qui concerne Tanis et Qântir, on peut dire que les inscriptions relatives à Ramsès II qu’on y a découvertes font simplement apparaître un lien avec ce Pharaon, mais ne prouvent pas que l’une ou l’autre ville soit la Raamsès de la Bible construite par les Israélites comme ville-entrepôt avant même la naissance de Moïse (Ex 1:11). Ainsi que le montre l’article RAAMSÈS, RAMSÈS, on a peu de raisons de penser que Ramsès II ait été le pharaon de l’Exode.
On a aussi penché en faveur de l’itinéraire passant par le ouadi Toumilat en raison de la théorie actuellement répandue selon laquelle la traversée de la mer Rouge n’aurait pas vraiment eu lieu à la mer Rouge, mais en un point au N. de celle-ci. Certains érudits croient même à une traversée au lac Sirbonis, le long de la côte méditerranéenne, ou à proximité, les Israélites ayant, à la sortie du ouadi Toumilat, bifurqué vers le N. en direction de la côte. Cette hypothèse contredit carrément la déclaration biblique selon laquelle Dieu lui-même fit dévier les Israélites de la route qui aurait mené au pays des Philistins (Ex 13:17, 18). D’autres voient aussi un itinéraire passant par le ouadi Toumilat, mais sont d’avis que les Israélites traversèrent la “ mer ” dans la région des lacs Amers, au N. de Suez.
Mer Rouge, et non “ mer des Roseaux ”. Cette dernière hypothèse s’appuie sur l’argument selon lequel l’hébreu yam-souph (traduit par “ mer Rouge ”) signifie littéralement “ mer des joncs ou des roseaux ”, et que les Israélites auraient donc traversé, non le bras de la mer Rouge appelé golfe de Suez, mais une mer de roseaux, un endroit marécageux comme la région des lacs Amers. Les tenants de cette hypothèse ne sont toutefois pas en accord avec les traducteurs de la Septante, qui rendirent yam-souph par le nom grec éruthra thalassa, littéralement “ mer Rouge ”. Mais, plus important encore, Luc, qui fut le rédacteur du livre des Actes (qui cite Étienne), et l’apôtre Paul utilisèrent le même nom grec quand ils relatèrent les événements de l’Exode. — Ac 7:36 ; Hé 11:29 ; voir MER ROUGE.
Qui plus est, la traversée d’un simple marécage n’aurait pas constitué un grand miracle et les Égyptiens n’auraient pu être “ engloutis ” dans la mer Rouge lorsque “ les eaux houleuses les ont alors recouverts ” de sorte qu’“ ils sont descendus dans les profondeurs comme une pierre ”. (Hé 11:29 ; Ex 15:5.) Non seulement Moïse et Josué évoquèrent plus tard ce miracle stupéfiant, mais l’apôtre Paul dit que les Israélites avaient été baptisés en Moïse au moyen du nuage et de la mer. Cela indique qu’ils furent complètement entourés d’eau, par la mer sur les côtés et par le nuage devant et derrière eux (1Co 10:1, 2). Cela montre également que l’étendue d’eau était beaucoup plus profonde que quelque chose qu’on pourrait passer à gué.
L’itinéraire de l’Exode dépend en grande partie de deux facteurs : l’emplacement de la capitale égyptienne de l’époque et celui de l’étendue d’eau que les Israélites traversèrent. Puisque les Écritures grecques chrétiennes divinement inspirées emploient l’expression “ mer Rouge ”, il y a tout lieu de croire que c’est bien cette mer qu’Israël traversa. Pour ce qui est de la capitale, selon toute vraisemblance il s’agissait de Memphis, qui fut le siège principal du gouvernement de l’Égypte pendant la majeure partie de son histoire (voir MEMPHIS). Si tel était le cas, le point de départ de l’Exode devait être suffisamment proche de Memphis pour que Moïse, appelé devant Pharaon la nuit de la Pâque après minuit, ait pu atteindre Ramsès à temps pour se mettre en marche vers Soukkoth avant la fin du 14e jour de Nisan (Ex 12:29-31, 37, 41, 42). La tradition juive la plus ancienne, rapportée par Josèphe, fait débuter la marche des Israélites un peu au N. de Memphis. — Antiquités judaïques, II, 315 (XV, 1).
L’itinéraire empruntant le ouadi Toumilat serait passé si loin au N. de Memphis qu’il aurait rendu impossible le déroulement des événements rapportés ci-dessus. C’est pourquoi de nombreux commentateurs anciens proposaient un des fameux chemins de “ pèlerins ” qui traversent l’Égypte, telle la route d’el Hadj qui part du Caire et passe par Clysma, à la pointe du golfe de Suez.
Où la mer Rouge s’ouvrit-elle pour laisser Israël traverser ?
Il faut remarquer qu’à la deuxième étape du voyage, Étham, “ en bordure du désert ”, Dieu ordonna à Moïse de ‘ rebrousser chemin et de camper devant Pihahiroth, près de la mer ’. Cette manœuvre ferait croire à Pharaon que les Israélites ‘ erraient en pleine confusion ’. (Ex 13:20 ; 14:1-3.) Les biblistes pour qui la route d’el Hadj est la plus plausible font remarquer que le verbe hébreu traduit par “ rebrousser chemin ” est emphatique : il ne signifie pas simplement “ dévier ” ou “ s’écarter ”, mais il a davantage le sens de retourner ou implique, pour le moins, un changement de direction prononcé. Selon eux, après avoir progressé jusqu’à un certain point au N. de la pointe du golfe de Suez, les Israélites auraient fait demi-tour et seraient revenus sur le côté oriental du djebel ʽAtaqa, une chaîne de montagnes qui longe la rive occidentale du golfe. Si elle avait été poursuivie par le N., une grande foule, comme l’étaient les Israélites, n’aurait pu trouver rapidement aucune issue facile depuis cet endroit ; elle aurait donc été immobilisée, la mer lui barrant le passage.
La tradition juive du Ier siècle de n. è. brosse un tableau semblable (voir PIHAHIROTH). Mais, fait plus important, cette situation correspond à l’image d’ensemble qu’en présente la Bible elle-même, ce qui n’est pas le cas des idées répandues de nombreux biblistes (Ex 14:9-16). Il semble évident que les Israélites durent traverser assez loin de l’extrémité du golfe (le bras occidental de la mer Rouge) pour que les armées de Pharaon ne puissent se contenter d’en faire le tour et de fondre facilement sur eux de l’autre côté. — Ex 14:22, 23.
Pharaon avait changé d’avis sur la libération des Israélites dès qu’il avait appris leur départ. La perte d’une telle nation d’esclaves représentait assurément une catastrophe économique pour l’Égypte. Ses chars n’auraient aucun mal à atteindre toute cette foule en déplacement, surtout si elle ‘ rebroussait chemin ’. C’est pourquoi, encouragé à la pensée qu’Israël errait en pleine confusion dans le désert, il se mit à le poursuivre en toute confiance. Avec une armée experte comptant 600 chars d’élite, tous les autres chars d’Égypte conduits par des guerriers, ses cavaliers et toutes ses forces militaires, Pharaon rattrapa Israël à Pihahiroth. — Ex 14:3-9.
Du point de vue stratégique, les Israélites semblaient en très mauvaise posture. Ils étaient sans doute cernés entre la mer et les montagnes, tandis que les Égyptiens les empêchaient de faire demi-tour. Apparemment pris au piège, les Israélites furent saisis de terreur et commencèrent à se plaindre de Moïse. C’est alors que Dieu intervint pour les protéger en faisant passer le nuage de l’avant à leurs arrières. D’un côté, vers les Égyptiens, il était ténèbres ; de l’autre, il éclairait la nuit pour Israël. Tandis que le nuage empêchait les Égyptiens de donner l’assaut, sur l’ordre de Jéhovah Moïse leva son bâton, les eaux de la mer se fendirent, et le bassin asséché livra passage à Israël. — Ex 14:10-21.
Largeur et profondeur de l’endroit de la traversée. Du fait qu’Israël traversa la mer en une seule nuit, on peut difficilement penser que les eaux se soient fendues en un étroit couloir. Ce devait plutôt être un passage large d’un kilomètre ou plus. Même rangé en ordre de marche serré, un tel groupe, avec tous les chariots, les bagages et le bétail, occupait peut-être une surface de quelque 8 km2 ou plus. Il semble donc que le passage dans la mer permit aux Israélites d’avancer sur un front assez large. En supposant que leur colonne était large de 1,5 km, elle était longue de 5 km ou davantage. Si elle faisait 2,5 km de large, sa longueur était peut-être de 3 km ou plus. Il fallut sans doute plusieurs heures à une telle colonne pour entrer dans le bassin et le traverser. Les Israélites restèrent en ordre de combat sans céder à la panique, mais ils avancèrent certainement en toute hâte.
Sans le nuage, les Égyptiens les auraient facilement rattrapés et auraient tué beaucoup d’entre eux (Ex 15:9). Lorsque les Israélites furent entrés dans la mer et que le nuage qui les suivait fut passé en avant d’eux pour révéler aux Égyptiens ce qui se passait, ceux-ci se mirent à leur poursuite. Ce fait aussi montre qu’il fallait que le passage à sec soit d’une largeur et d’une longueur considérables, car les forces militaires de Pharaon étaient nombreuses. Animée du désir d’écraser et de recapturer les anciens esclaves, toute l’armée s’engagea dans le bassin de la mer. Puis, à un moment de la veille du matin, qui était entre 2 heures et 6 heures environ, Jéhovah regarda depuis le nuage et commença à jeter la confusion dans le camp des Égyptiens en ôtant les roues de leurs chars. — Ex 14:24.
À l’approche du matin, les Israélites gagnèrent sains et saufs le rivage oriental de la mer Rouge. Jéhovah ordonna alors à Moïse de tendre sa main pour que les eaux reviennent sur les Égyptiens. Sur ce, “ la mer commença à revenir à son niveau normal ”, et les Égyptiens fuirent pour ne pas la rencontrer, ce qui indique encore que les eaux s’étaient ouvertes largement, sans quoi un étroit passage les aurait immédiatement engloutis. Les Égyptiens fuirent les murailles d’eau qui se fermaient en allant vers le rivage occidental, mais les eaux convergèrent jusqu’à ce que leur masse recouvre complètement tous les chars et tous les cavaliers de l’armée de Pharaon. Il n’en resta pas même un seul.
Il va de soi qu’un tel engloutissement aurait été impossible dans un marécage. De plus, dans un marais peu profond, les cadavres n’auraient pas été rejetés sur le rivage, comme cela se passa, de sorte qu’“ Israël put voir les Égyptiens morts sur le bord de la mer ”. — Ex 14:22-31 ; CARTE et PHOTO, vol. 1, p. 537.
Les eaux “ figées ”. D’après la description biblique, les eaux houleuses se sont figées pour laisser passer Israël (Ex 15:8). Le mot ‘ figer ’ est employé dans la Bible de la Pléiade, la Bible de Jérusalem, la Bible du Rabbinat français, etc. Le Grand Robert de la langue française (1991) définit figer comme suit : “ Coaguler [...]. Épaissir, solidifier [...] par le froid. Cf. Condenser, congeler, épaissir, solidifier. ” Le terme hébreu traduit par “ figées ” est utilisé en Job 10:10 pour parler du lait qui se caille. Dès lors, il ne signifie pas nécessairement que les murailles d’eau gelèrent, devenant solides, mais que les eaux figées prirent une consistance comparable à celle de la gélatine ou du lait caillé. Rien de visible ne retenait les eaux de la mer Rouge ; c’est pourquoi celles-ci paraissaient figées, solidifiées, caillées ou épaissies afin de rester dressées comme des murailles de chaque côté des Israélites sans s’effondrer sur eux, ce qui les aurait engloutis et détruits. Voilà comment elles apparurent à Moïse tandis qu’un fort vent d’E. les séparait, asséchant le bassin de la mer de sorte qu’il ne soit ni boueux ni gelé, mais facilement praticable pour la multitude.
Le passage ouvert dans la mer était suffisamment large pour que les Israélites, qui étaient peut-être plus de trois millions, aient tous pu atteindre la rive orientale au matin. Alors les eaux figées commencèrent à être libérées et à se rejoindre, submergeant et engloutissant les Égyptiens, pendant que les Israélites se tenaient sur la rive orientale et contemplaient cet événement sans précédent : Jéhovah délivrant une nation entière d’une puissance mondiale. Ils comprirent que cela réalisait littéralement les paroles suivantes de Moïse : “ Les Égyptiens que vous voyez réellement aujourd’hui, vous ne les reverrez plus, non, jamais plus. ” — Ex 14:13.
Ainsi, par cette spectaculaire démonstration de puissance, Jéhovah éleva son nom et délivra Israël. Arrivés sains et saufs sur le rivage oriental de la mer Rouge, les fils d’Israël entonnèrent un chant sous la direction de Moïse ; de son côté, sa sœur Miriam, la prophétesse, prit un tambourin et entraîna toutes les femmes, avec tambourins et danses, et elles répondirent aux hommes en chantant (Ex 15:1, 20, 21). Les Israélites avaient été totalement séparés de leurs ennemis. Lorsqu’ils quittèrent l’Égypte, il ne fut pas permis qu’homme ou bête leur fasse du tort ; pas même un chien ne gronda ni ne remua furieusement la langue contre eux (Ex 11:7). Le récit de l’Exode ne précise pas que Pharaon pénétra en personne dans la mer avec ses forces militaires et qu’il y fut détruit, mais Psaume 136:15 déclare que Jéhovah “ s’est débarrassé de Pharaon et de ses forces militaires dans la mer Rouge ”.
Un type d’événements ultérieurs. Quand il fit sortir Israël d’Égypte comme il l’avait promis à Abraham, Dieu considérait cette nation comme son fils. De fait, il dit à Pharaon : ‘ Israël est mon premier-né. ’ (Ex 4:22). Plus tard, Jéhovah déclara : “ Quand Israël était un garçon, alors je l’ai aimé, et d’Égypte j’ai appelé mon fils. ” (Ho 11:1). Ce rappel de l’Exode était également une prophétie qui eut un accomplissement aux jours d’Hérode quand, après sa mort, Joseph et Marie revinrent d’Égypte avec Jésus et s’installèrent à Nazareth. L’historien Matthieu applique la prophétie d’Hoshéa à cette circonstance, en disant au sujet de Joseph : “ Il y resta jusqu’au décès d’Hérode, pour que s’accomplisse ce qui avait été prononcé par Jéhovah par l’intermédiaire de son prophète, quand il dit : ‘ D’Égypte j’ai appelé mon fils. ’ ” — Mt 2:15.
L’apôtre Paul cite l’Exode parmi les choses qui, dit-il, sont arrivées à Israël comme exemples, ou types (1Co 10:1, 2, 11). Cet événement symbolise donc quelque chose de plus grand. Dans la Bible, l’Israël selon la chair symbolise l’Israël spirituel, l’Israël de Dieu (Ga 6:15, 16). Moïse parla aussi du prophète futur qui serait comme lui (Dt 18:18, 19). Les Juifs s’attendaient à ce que ce prophète soit un grand chef et un libérateur. L’apôtre Pierre parla de Jésus Christ comme du Grand Moïse (Ac 3:19-23). La délivrance d’Israël à la mer Rouge et la destruction de l’armée égyptienne doivent donc représenter la délivrance de l’Israël spirituel de ses ennemis appartenant à l’Égypte symbolique, au moyen d’un miracle grandiose accompli par Jésus Christ. Qui plus est, tout comme l’action de Dieu à la mer Rouge servit à l’élévation de son nom, l’accomplissement de ces événements typiques sur une beaucoup plus grande échelle apportera une renommée plus grande et plus universelle au nom de Jéhovah. — Ex 15:1.