ÂME
Les termes originaux (héb. : nèphèsh [נֶפֶשׁ] ; gr. : psukhê [ψυχή]) employés dans les Écritures montrent qu’une “ âme ” est une personne, un animal, ou la vie dont jouit une personne ou un animal.
Les connotations que le mot français “ âme ” évoque ordinairement dans l’esprit de la plupart des gens ne concordent pas avec le sens des mots hébreu et grec tels qu’ils sont employés par les rédacteurs de la Bible divinement inspirés. Avec le temps, ce fait est de plus en plus reconnu. Déjà en 1897, après avoir étudié en détail l’emploi du mot nèphèsh, le professeur C. Briggs écrivit (Journal of Biblical Literature, vol. XVI, p. 30) : “ Tel qu’il est actuellement utilisé [...], le mot âme a habituellement un sens très différent de celui de נפש [nèphèsh] en hébreu, et il est facile pour un lecteur non averti de le comprendre de travers. ”
Plus récemment, quand la Société d’édition juive d’Amérique a publié une nouvelle traduction anglaise de la Torah, les cinq premiers livres de la Bible, le rédacteur en chef, H. Orlinsky, du Hebrew Union College, déclara que le terme “ âme ” avait été virtuellement éliminé de cette traduction parce que “ le mot hébreu en question ici est ‘ Nèfèsh ’ ”. Il a ajouté : “ D’autres traducteurs l’ont interprété dans le sens de ‘ âme ’, ce qui est tout à fait inexact. La Bible ne dit pas que nous avons une âme. ‘ Nèfèsh ’ est la personne elle-même, son besoin de nourriture, le sang dans ses veines, son être. ” — The New York Times, 12 octobre 1962.
Quelle est l’origine de l’enseignement selon lequel l’âme humaine est invisible et immortelle ?
La difficulté réside dans le fait que les sens couramment rattachés au mot “ âme ” proviennent principalement, non pas des Écritures hébraïques ou grecques chrétiennes, mais de la philosophie grecque antique, donc de la pensée religieuse païenne. Par exemple, selon Platon, philosophe grec, Socrate disait : “ Supposons qu’elle soit pure, l’âme qui se sépare de son corps : elle n’entraîne rien avec elle, [...] c’est vers ce qui lui ressemble qu’elle s’en va, vers ce qui est invisible, vers ce qui est divin et immortel et sage, c’est vers le lieu où son arrivée réalise pour elle le bonheur, où divagation, déraison, terreurs [...] tous les autres maux de la condition humaine, cessent de lui être attachés, et [...] c’est véritablement dans la compagnie des Dieux qu’elle passe le reste de son temps ! ” — Phédon, 80, d, e ; 81, a.
En opposition directe avec l’enseignement grec selon lequel la psukhê (“ âme ”) est immatérielle, intangible, invisible et immortelle, les Écritures montrent que psukhê comme nèphèsh, utilisés à propos des créatures terrestres, désignent ce qui est matériel, tangible, visible et mortel.
La New Catholic Encyclopedia dit : “ Le mot Nepes [nèphèsh] est un terme au sens beaucoup plus étendu que notre mot ‘ âme ’ ; il désigne la vie (Ex 21.23 ; Dt 19.21) et ses diverses manifestations essentielles : la respiration (Gn 35.18 ; Jb 41.13[41:21]), le sang [Gn 9.4 ; Dt 12.23 ; Ps 140(141).8], le désir (2Sm 3.21 ; Prv 23.2). Dans l’A[ncien] T[estament], l’âme n’est pas une partie de l’homme, mais l’homme tout entier, l’homme en tant qu’être vivant. Pareillement, dans le N[ouveau] T[estament], l’âme désigne la vie humaine : la vie d’un individu, d’un sujet conscient (Mt 2.20 ; 6.25 ; Lc 12.22-23 ; 14.26 ; Jn 10.11, 15, 17 ; 13.37). ” — 1967, vol. XIII, p. 467.
Dans son “ Glossaire des termes de théologie biblique ” (p. 27, 28), la New American Bible, traduction catholique, déclare : “ Dans le Nouveau Testament, ‘ sauver son âme ’ (Mc 8:35) ne signifie pas sauver une part ‘ spirituelle ’ de l’homme, par opposition à son ‘ corps ’ (au sens platonicien), mais toute sa personne, l’accent étant mis sur le fait que la personne vit, désire et aime, etc., en plus d’être concrète et physique. ” — Par P. Kenedy & Fils, New York, 1970.
Nèphèsh vient vraisemblablement d’une racine qui signifie “ respirer ”. Dans un sens littéral, nèphèsh pourrait être rendu par “ un respirant ”. Le Lexicon in Veteris Testamenti Libros (Leyde, 1958, p. 627) de L. Koehler et W. Baumgartner donne cette définition : “ La substance qui respire, faisant de l’homme et de l’animal des êtres vivants Gn 1:, 20, l’âme (strictement différente de la notion grecque d’âme) dont le siège est le sang Gn 9:, 4sqq Lv 17:, 11 Dt 12:, 23 : (249 X) [...] âme = être vivant, individu, personne. ”
Quant au mot grec psukhê, les dictionnaires grec-français et d’autres le définissent entre autres par “ vie ”, “ le moi conscient ou la personnalité comme siège des émotions, des désirs et des sentiments ”, “ un être vivant ”, et ils montrent que, même dans les écrits grecs non bibliques, ce mot se disait au sujet des “ animaux ”. Évidemment, ces ouvrages, qui étudient surtout les œuvres grecques classiques, mettent aussi tous les sens que les philosophes grecs païens prêtaient à ce mot, notamment “ l’esprit séparé du corps ”, “ l’âme immatérielle et immortelle ”, “ l’esprit de l’univers ” et “ le principe immatériel du mouvement et de la vie ”. Sans doute parce que certains philosophes païens enseignaient que l’âme quittait le corps à la mort, le mot psukhê désignait aussi “ le papillon ou la mite ”, bêtes qui viennent d’une métamorphose, celle de la chenille en créature ailée. — A Greek-English Lexicon, par H. Liddell, R. Scott, H. Jones, 1968, p. 2026, 2027 ; A New Greek and English Lexicon, par J. Donnegan, 1836, p. 1404 ; Dictionnaire grec-français, par A. Bailly, L. Séchan et P. Chantraine, Paris, 1963, p. 2176 ; Dictionnaire grec-français, par V. Magnien et M. Lacroix, Paris, 1969, p. 2140, 2141.
Les auteurs grecs de l’Antiquité ne donnaient pas toujours le même sens au mot psukhê, influencés qu’ils étaient par leurs philosophies personnelles et religieuses. À propos de Platon, à la philosophie duquel on doit les idées courantes relatives au mot “ âme ” (ce qui est généralement reconnu), on a dit que “ s’il parle parfois de l’une des trois [prétendues] parties de l’âme, l’‘ intelligible ’, comme étant nécessairement immortelle, alors que les deux autres sont mortelles, il laisse aussi entendre qu’il y a deux âmes dans un même corps, l’une immortelle et divine, l’autre mortelle ”. — The Evangelical Quarterly, Londres, 1931, vol. III, p. 121, “ Pensées sur la théorie tripartite de la nature humaine ”, par A. McCaig.
Puisque les écrits non bibliques donnent des sens différents, il est indispensable de laisser les Écritures elles-mêmes parler, et montrer ce que les écrivains divinement inspirés entendaient par les mots psukhê et nèphèsh. Nèphèsh se rencontre 754 fois dans le texte massorétique des Écritures hébraïques, et psukhê 102 fois dans le texte des Écritures grecques chrétiennes établi par B. Westcott et F. Hort, ce qui donne un total de 856 occurrences (voir Appendice MN, p. 1695). La fréquence de ces termes permet de définir clairement le sens qu’ils revêtaient dans l’esprit des rédacteurs de la Bible divinement inspirés et l’idée que les écrits de ces derniers devraient transmettre à notre esprit. Un examen de ces deux termes révèle qu’ils ont une signification étendue, enrichie de bien des nuances ; néanmoins, lorsque les rédacteurs de la Bible parlent de la nature humaine, il n’y a chez eux ni contradiction, ni confusion, ni désaccord, ce qui n’est pas le cas chez les philosophes grecs de la période dite classique.
Les premières âmes terrestres. Le mot nèphèsh paraît pour la première fois en Genèse 1:20-23. Le cinquième “ jour ” de création, Dieu dit : “ ‘ Que les eaux pullulent d’un pullulement d’âmes [nèphèsh] vivantes et que des créatures volantes volent au-dessus de la terre [...]. ’ Et Dieu se mit à créer les grands monstres marins et toute âme [nèphèsh] vivante qui se meut, dont les eaux pullulèrent selon leurs espèces, et toute créature volante ailée selon son espèce. ” De même, au sixième “ jour ” de création, nèphèsh est appliqué aux ‘ animaux domestiques, aux animaux qui se meuvent et aux bêtes sauvages de la terre ’, qui sont autant d’“ âmes vivantes ”. — Gn 1:24.
Après la création de l’homme, Dieu, qui lui donnait des directives, employa de nouveau le mot nèphèsh pour désigner les animaux, “ tout ce qui se meut sur la terre, qui a en soi vie d’âme [littéralement : “ qui a en soi une âme (nèphèsh) vivante ”] ”. (Gn 1:30.) On a d’autres exemples d’animaux désignés ainsi en Genèse 2:19 ; 9:10-16 ; Lévitique 11:10, 46 ; 24:18 ; Nombres 31:28 ; Ézékiel 47:9. On notera que les Écritures grecques chrétiennes se servent pareillement du mot psukhê pour désigner les animaux, par exemple en Révélation 8:9 et 16:3 où il est question de créatures marines.
Ainsi donc, les Écritures montrent clairement que nèphèsh et psukhê s’emploient pour la création animale, qui est inférieure à l’homme. Les mêmes termes s’appliquent à l’homme.
L’âme humaine. C’est précisément la même expression hébraïque, celle qui a été employée pour l’espèce animale, à savoir nèphèsh ḥayyah (“ âme vivante ”), qui est utilisée pour désigner Adam lorsque, après que Dieu l’eut formé de la poussière tirée du sol et qu’il eut soufflé dans ses narines le souffle de vie, “ l’homme devint une âme vivante ”. (Gn 2:7.) L’homme était différent des animaux, mais cette différence ne tenait pas au fait que l’homme était une nèphèsh (“ âme ”) et qu’eux ne l’étaient pas. C’était plutôt, comme le montre le récit, parce que lui seul avait été créé “ à l’image de Dieu ”. (Gn 1:26, 27.) Il avait été créé avec des qualités morales comparables à celles de Dieu, avec une puissance et une sagesse bien supérieures à celles des animaux. Il pouvait donc tenir dans la soumission toutes les formes inférieures de vie créée (Gn 1:26, 28). L’organisme humain était plus complexe et doué de plus de capacités que celui des animaux (voir 1Co 15:39). En outre, Adam avait, mais il la perdit, la perspective de vivre éternellement ; cela n’est jamais dit à propos des créatures inférieures à l’homme. — Gn 2:15-17 ; 3:22-24.
Certes, le récit précise que Dieu ‘ souffla dans les narines de l’homme le souffle [forme de neshamah] de vie ’, mais il ne mentionne pas ce fait dans la relation de la création des animaux. Cependant, le récit de la création de l’homme est manifestement beaucoup plus détaillé que celui de la création des animaux. D’autre part, Genèse 7:21-23, qui décrit la destruction par le déluge de “ toute chair ” qui n’était pas dans l’arche, met les animaux dans la même liste que les humains, puis ajoute : “ Tout ce en quoi le souffle [forme de neshamah] de la force de vie était en action dans les narines, c’est-à-dire tout ce qui était sur le sol ferme, tout mourut. ” Il est évident que le souffle de vie des créatures animales provenait aussi, à l’origine, de Jéhovah Dieu, le Créateur.
De même, l’“ esprit ” (héb. : rouaḥ ; gr. : pneuma) ou force vitale de l’homme n’est pas différent de la force vitale que possèdent les animaux. C’est ce que montre Ecclésiaste 3:19-21 où il est dit qu’“ ils ont tous un même esprit [werouaḥ] ”.
L’âme : une créature vivante. Comme il est dit, l’homme “ devint une âme vivante ”. Il était donc une âme, mais n’avait pas une âme comme quelque chose d’immatériel, d’invisible et d’intangible habitant en lui. Montrant que l’enseignement chrétien ne diffère pas de l’enseignement hébreu antérieur, l’apôtre Paul cite Genèse 2:7, disant : “ C’est même écrit ainsi : ‘ Le premier homme Adam devint une âme vivante [psukhên zôsan]. ’ [...] Le premier homme est de la terre et fait de poussière. ” — 1Co 15:45-47.
Le récit de la Genèse révèle qu’une âme vivante est le résultat de la combinaison du corps terrestre avec le souffle de vie. L’expression “ souffle de la force de vie [littéralement : “ souffle de l’esprit (ou : force agissante [rouaḥ]) de vie ”] ” (Gn 7:22) indique que c’est la respiration de l’air (et de l’oxygène qu’il contient) qui entretient la force vitale, ou “ esprit ”, qui est dans toutes les créatures, humains et animaux. Cette force vitale est présente dans chaque cellule du corps d’une créature, comme le montrent les articles ESPRIT et VIE.
Puisque le mot nèphèsh désigne la créature elle-même, il faut s’attendre à ce que les fonctions ou caractéristiques physiques propres aux créatures de chair lui soient attribuées. C’est précisément le cas. Il est question de nèphèsh (“ âme ”) qui mange de la viande, de la graisse, du sang ou d’autres choses matérielles (Lv 7:18, 20, 25, 27 ; 17:10, 12, 15 ; Dt 23:24) ; qui est affamée ou qui a envie de manger et de boire (Dt 12:15, 20, 21 ; Ps 107:9 ; Pr 19:15 ; 27:7 ; Is 29:8 ; 32:6 ; Mi 7:1) ; qui s’engraisse (Pr 11:25) ; qui jeûne (Ps 35:13) ; qui touche des choses impures, telles qu’un cadavre (Lv 5:2 ; 7:21 ; 17:15 ; 22:6 ; Nb 19:13) ; qui est ‘ saisie comme gage ’ ou “ enlevée ” (Dt 24:6, 7) ; qui travaille (Lv 23:30) ; qui est réconfortée par de l’eau fraîche quand elle est fatiguée (Pr 25:25) ; qui est achetée (Lv 22:11 ; Éz 27:13) ; qui est offerte comme offrande votive (Lv 27:2) ; qui est mise aux fers (Ps 105:18) ; qui perd le sommeil (Ps 119:28) ; enfin, qui est haletante. — Jr 15:9.
Il est également à noter que dans de nombreux versets il est question de “ mon âme ”, “ son âme ”, “ ton âme ”, etc. C’est parce que nèphèsh et psukhê peuvent signifier soi-même en tant qu’âme. En français, par conséquent, le sens de ces expressions peut souvent être rendu par des pronoms personnels. L’ouvrage Lexicon in Veteris Testamenti Libros (p. 627) dit que “ ma nèphèsh ” signifie “ je ” (Gn 27:4, 25 ; Is 1:14) ; “ ta nèphèsh ” signifie “ tu ” (Gn 27:19, 31 ; Is 43:4 ; 51:23) ; “ la nèphèsh de lui ” signifie “ il, lui-même ” (Nb 30:2 ; Is 53:10) ; “ la nèphèsh d’elle ” signifie “ elle, elle-même ” (Nb 30:5-12), etc.
Le mot grec psukhê est employé de la même manière. W. Vine écrit (Vine’s Expository Dictionary of Old and New Testament Words, 1981, vol. 4, p. 54) qu’il peut servir d’“ équivalent du pronom personnel, dans le but d’accentuer ou de créer un effet : 1re personne, Jean 10:24 (‘ nous ’) ; Héb. 10:38 ; cp. [comparer avec] Gen. 12:13 ; Nomb. 23:10 ; Jug. 16:30 ; Ps. 120:2 (‘ moi ’) ; 2e personne, 2 Cor. 12:15 ; Héb. 13:17 ”, etc.
La vie en tant que créature. Nèphèsh et psukhê désignent également la vie, non pas simplement la vie dans son sens de force ou de principe abstrait, mais la vie en tant que créature, humaine ou animale.
Ainsi, quand Rachel donna naissance à Benjamin, sa nèphèsh (“ âme ” ou vie en tant que créature) sortit d’elle et elle mourut (Gn 35:16-19). Elle cessa d’être une créature vivante. De même, quand le prophète Éliya ressuscita miraculeusement le fils de la veuve de Tsarphath, la nèphèsh (“ âme ” ou vie en tant que créature) de l’enfant revint en lui et “ il prit vie ” ; il redevint une créature vivante. — 1R 17:17-23.
Étant donné que la vie d’une créature est inséparablement liée au sang et qu’elle en dépend (le sang versé représentant la vie de la personne ou de la créature [Gn 4:10 ; 2R 9:26 ; Ps 9:12 ; Is 26:21]), les Écritures disent que la nèphèsh (âme) est “ dans le sang ”. (Gn 9:4 ; Lv 17:11, 14 ; Dt 12:23.) Évidemment, cela ne s’entend pas au sens littéral, car les Écritures ont aussi l’expression “ sang de vos âmes ” (Gn 9:5 ; voir aussi Jr 2:34), et les nombreux textes déjà considérés ne peuvent raisonnablement pas s’appliquer uniquement au sang ou à ses qualités vitales.
Le mot nèphèsh (âme) n’est pas employé en rapport avec la création de la vie végétale lors du troisième “ jour ” de création (Gn 1:11-13) ou après, car il n’y a pas de sang dans les végétaux.
Le mot grec psukhê est lui aussi employé pour désigner la “ vie en tant que créature ” en Matthieu 6:25 ; 10:39 ; 16:25, 26 ; Luc 12:20 ; Jean 10:11, 15 ; 13:37, 38 ; 15:13 ; Actes 20:10. Puisque les serviteurs de Dieu ont l’espoir de ressusciter s’ils meurent, ils espèrent vivre de nouveau en tant qu’“ âmes ” ou créatures vivantes. C’est pourquoi Jésus put dire : “ Celui qui perd son âme [sa vie de créature] à cause de moi et de la bonne nouvelle la sauvera. Quel profit, en effet, y a-t-il pour un homme à gagner le monde entier et à le payer de son âme ? Que donnerait, en effet, un homme en échange de son âme ? ” (Mc 8:35-37). Il dit encore : “ Qui est attaché à son âme la détruit, mais qui a de la haine pour son âme dans ce monde la préservera pour la vie éternelle. ” (Jn 12:25). Ces textes, et d’autres du même genre, permettent d’avoir une bonne intelligence des paroles de Jésus consignées en Matthieu 10:28 : “ Ne craignez pas ceux qui tuent le corps, mais ne peuvent tuer l’âme ; mais craignez plutôt celui qui peut détruire et l’âme et le corps dans la géhenne. ” S’ils peuvent tuer le corps, les hommes sont incapables de tuer la personne pour toujours, vu que celle-ci est vivante dans le dessein de Dieu (voir Lc 20:37, 38), et Jéhovah peut et veut ramener un tel fidèle à la vie en tant que créature grâce à la résurrection. Pour les serviteurs de Dieu, la perte de leur “ âme ”, ou vie en tant que créature, n’est que temporaire et non définitive. — Voir Ré 12:11.
Mortelle et destructible. En revanche, Matthieu 10:28 affirme que Dieu “ peut détruire et l’âme [psukhên] et le corps dans la géhenne ”. Cela prouve que psukhê ne désigne pas quelque chose d’immortel et d’indestructible. En fait, pas une seule fois dans toutes les Écritures, hébraïques et grecques, les mots nèphèsh ou psukhê ne sont accompagnés d’adjectifs comme immortel, indestructible, impérissable ou d’autres du même genre (voir IMMORTALITÉ ; INCORRUPTIBILITÉ). Par contre, de très nombreux textes des Écritures hébraïques et grecques indiquent que la nèphèsh ou la psukhê (l’âme) est mortelle et sujette à la mort (Gn 19:19, 20 ; Nb 23:10 ; Jos 2:13, 14 ; Jg 5:18 ; 16:16, 30 ; 1R 20:31, 32 ; Ps 22:29 ; Éz 18:4, 20 ; Mt 2:20 ; 26:38 ; Mc 3:4 ; Hé 10:39 ; Jc 5:20) ; qu’elle meurt, “ retranchée ” ou détruite (Gn 17:14 ; Ex 12:15 ; Lv 7:20 ; 23:29 ; Jos 10:28-39 ; Ps 78:50 ; Éz 13:19 ; 22:27 ; Ac 3:23 ; Ré 8:9 ; 16:3), soit par l’épée (Jos 10:37 ; Éz 33:6), soit étouffée (Jb 7:15) ; qu’elle est en danger de périr par noyade (Yon 2:5) ; qu’elle descend dans la fosse ou dans le shéol (Jb 33:22 ; Ps 89:48) ou qu’elle en est délivrée. — Ps 16:10 ; 30:3 ; 49:15 ; Pr 23:14.
L’âme morte. L’expression ‘ âme décédée ou morte ’ est employée à plusieurs reprises ; elle désigne simplement “ une personne morte ”. — Lv 19:28 ; 21:1, 11 ; 22:4 ; Nb 5:2 ; 6:6 ; Hag 2:13 ; voir aussi Nb 19:11, 13.
Le désir. Parfois le mot nèphèsh est employé pour parler du désir d’une personne, désir qui la remplit puis la tient jusqu’à ce qu’il soit satisfait. Par exemple, Proverbes 13:2 dit de ceux qui agissent avec traîtrise que ‘ leur âme est violence ’, c’est-à-dire qu’ils veulent ‘ à tout prix ’ la violence, qu’ils deviennent en quelque sorte la violence personnifiée (voir Gn 34:3, note ; Ps 27:12 ; 35:25 ; 41:2). Les faux bergers d’Israël sont appelés des “ chiens forts par [le désir de] l’âme ”, qui ne connaissent pas la satiété. — Is 56:11, 12 ; voir aussi Pr 23:1-3 ; Hab 2:5.
Servir de toute son âme. Comme on l’a montré, l’“ âme ” désigne fondamentalement la personne tout entière. Pourtant, certains textes exhortent à rechercher, à aimer et à servir Dieu ‘ de tout son cœur et de toute son âme ’. (Dt 4:29 ; 11:13, 18.) Il est dit en Deutéronome 6:5 : “ Tu dois aimer Jéhovah ton Dieu de tout ton cœur, et de toute ton âme, et de toute ta force vitale. ” Jésus déclara qu’il faut servir de toute son âme, de toute sa force et aussi de ‘ toute sa pensée ’. (Mc 12:30 ; Lc 10:27.) On peut se demander pourquoi d’autres choses sont mentionnées en plus de l’âme si celle-ci les englobe toutes. Illustrons le sens probable de ces paroles : quelqu’un peut se vendre (vendre son âme) comme esclave et devenir ainsi la possession de son propriétaire et maître. Cependant, il ne servira pas forcément celui-ci de tout son cœur, uniquement motivé par le désir de lui plaire, et par conséquent il ne mettra pas forcément toute sa force ni toutes ses facultés mentales à servir les intérêts de son maître (voir Ép 6:5 ; Col 3:22). Ainsi, ces parties de l’âme sont sans doute mentionnées pour être mises en évidence, de sorte que le chrétien ne les oublie pas, mais les prenne en compte dans son service pour Dieu, à qui il appartient, et pour son Fils, dont la vie fut le prix de son rachat. Pour servir Dieu ‘ de toute son âme ’, il faut donc engager toute sa personne, sans oublier aucune partie de son corps, aucune de ses fonctions, aucune de ses capacités ni aucun de ses désirs. — Voir Mt 5:28-30 ; Lc 21:34-36 ; Ép 6:6-9 ; Ph 3:19 ; Col 3:23, 24.
Âme et esprit sont distincts. Il ne faut pas confondre l’“ esprit ” (héb. : rouaḥ ; gr. : pneuma) et l’“ âme ” (héb. : nèphèsh ; gr. : psukhê), car ils désignent deux choses différentes. Ainsi, Hébreux 4:12 dit que la Parole de Dieu “ pénètre jusqu’à la division de l’âme et de l’esprit, des jointures et de leur moelle ”. (Voir aussi Ph 1:27 ; 1Th 5:23.) Comme on l’a montré, l’âme (nèphèsh ; psukhê) est la créature elle-même. L’esprit (rouaḥ ; pneuma) désigne généralement la force vitale de la créature ou âme vivante, bien que les termes originaux puissent également avoir d’autres sens.
Afin d’illustrer la différence entre les deux mots grecs psukhê et pneuma, on peut considérer ce que Paul écrit dans sa première lettre aux Corinthiens à propos de la résurrection des chrétiens pour la vie spirituelle. Il oppose “ ce qui est physique [psukhikon, littéralement : “ qui est âme ”] ” à “ ce qui est spirituel [pneumatikon] ”. Il montre ainsi que jusqu’à leur mort les chrétiens oints ont un corps “ qui est âme ”, tout comme le premier homme Adam, et qu’en revanche à leur résurrection ils recevront un corps spirituel, comme celui de Jésus Christ glorifié (1Co 15:42-49). Jude fait une comparaison du même genre en parlant d’“ hommes animaux [psukhikoï, littéralement : “ (hommes) qui sont âmes ”], qui n’ont pas de spiritualité [littéralement : “ qui n’ont pas d’esprit (pneuma) ”] ”. — Jude 19.
En quel sens Dieu a-t-il l’âme ? Compte tenu de ce qui précède, les textes dans lesquels Dieu dit “ mon âme ” (Lv 26:11, 30 ; Ps 24:4 ; Is 42:1) sont sans doute autant d’exemples d’anthropomorphismes, procédé qui consiste à attribuer à Dieu des qualités physiques et humaines dans le but de faciliter la compréhension, comme lorsqu’on dit de Dieu qu’il a des yeux, des mains, etc. En disant ‘ ma nèphèsh ’, Jéhovah entend manifestement “ moi-même ” ou “ ma personne ”. “ Dieu est un Esprit [Pneuma]. ” — Jn 4:24 ; voir JÉHOVAH (Descriptions de sa présence).