SARGON
(de l’akkadien, “ Le roi est légitime ”).
Roi d’Assyrie qui succéda à Salmanasar V. Les historiens l’appellent Sargon II. Un roi précédent, non d’Assyrie, mais de Babylone, est nommé Sargon Ier.
Sargon n’est mentionné par son nom qu’une fois dans le récit biblique (Is 20:1). Au début des années 1800, les critiques ont souvent méprisé la mention de la Bible à son sujet en disant qu’elle n’avait aucune valeur historique. Cependant, à partir de 1843, des fouilles archéologiques ont exhumé les ruines de son palais à Khorsabad et les registres de ses annales. — PHOTOS, vol. 1, p. 955, 960.
Dans ses annales, Sargon prétendit : “ J’assiégeai (et) je conquis la ville de Samerina (Samarie). ” (Textes du Proche-Orient ancien et histoire d’Israël, par J. Briend et M.-J. Seux, Paris, 1977, p. 109). Cependant, il semble qu’il ne s’agissait que d’une vantardise de la part de Sargon ou de ceux qui cherchaient à le glorifier, dans laquelle les exploits du souverain précédent étaient revendiqués pour le nouveau. Une chronique babylonienne, peut-être plus neutre, déclare au sujet de Salmanasar V : “ Il dévasta Samarie. ” (Chroniques mésopotamiennes, par J.-J. Glassner, Paris, 1993, p. 180). La Bible, en 2 Rois 18:9, 10, dit simplement que Salmanasar “ assiégea ” Samarie et qu’“ on réussit à s’en emparer ”. Voir 2 Rois 17:1-6, qui dit que Salmanasar le roi d’Assyrie imposa tribut à Hoshéa, le roi de Samarie, et ajoute que, par la suite, “ le roi d’Assyrie s’empara de Samarie ”.
Les inscriptions relatives à Sargon montrent qu’il est insensé de placer une grande confiance dans les documents profanes de l’Antiquité, voire de leur accorder autant de valeur qu’au récit biblique. Après que Sargon fut monté sur le trône, les Babyloniens dirigés par Merodak-Baladân se révoltèrent, avec le soutien de l’Élam. Sargon leur fit la guerre à Der, mais fut sans doute incapable de mater la révolte. Les inscriptions de Sargon montrent qu’il affirma avoir remporté une victoire totale, alors que la Chronique babylonienne dit que les Élamites vainquirent les Assyriens, et qu’un texte de Merodak-Baladân dit, en vantant son auteur, qu’il ‘ renversa les armées assyriennes et écrasa leurs armes ’. Le livre La Mésopotamie donne cette précision : “ Détail amusant, cette inscription du roi de Babylone a été retrouvée à Nimrud ; Sargon l’y avait amenée d’Uruk [...], la remplaçant dans cette ville par un cylindre d’argile portant sa propre version de l’événement. On le voit, la ‘ désinformation ’ n’est pas une technique nouvelle. ” — Par G. Roux, Paris, 1995, p. 358.
Sargon eut plus de succès contre une coalition formée par les rois de Hamath et de Damas et d’autres alliés ; il les vainquit dans une bataille à Qarqar sur l’Oronte. Deux 2 Rois 17:24, 30 cite des gens de Hamath parmi ceux que “ le roi d’Assyrie ” installa dans les villes de Samarie à la place des Israélites exilés.
À en croire les annales de Sargon, dans sa cinquième année il attaqua et conquit Karkémish, ville importante sur les plans commercial et militaire, implantée sur le cours supérieur de l’Euphrate. Fidèles à leur habitude, les Assyriens déportèrent ensuite les habitants de la ville et les remplacèrent par des étrangers. Dans la mise en garde d’Isaïe concernant la menace assyrienne (Is 10:5-11), Karkémish, avec Hamath et d’autres villes, est citée parmi celles que la puissance assyrienne écraserait. Plus tard, Sargon rapporte avoir installé des membres de tribus arabes comme colons en Samarie. — Ancient Near Eastern Texts, par J. Pritchard, 1974, p. 285, 286.
Les récits assyriens racontent que le roi d’Ashdod, Azouri, conspira contre le joug assyrien et que Sargon le destitua, pour le remplacer par le jeune frère d’Azouri. Une autre révolte eut lieu ; Sargon lança une attaque contre la Philistie et ‘ assiégea et conquit les villes d’Asdudu [Ashdod], de Gimtu [Gath] (et) d’Asdudimmu ’. (Textes du Proche-Orient ancien et histoire d’Israël, p. 114.) C’est apparemment à ce moment-là que le récit biblique mentionne Sargon directement par son nom en Isaïe 20:1.
Après cela, Sargon chassa Merodak-Baladân de Babylone et conquit la ville. Le nom de Sargon figure sur une inscription comme roi de Babylone pendant une période de cinq ans.
Le règne agressif de Sargon porta l’Empire assyrien à un nouveau sommet et produisit la dernière grande dynastie assyrienne. Les historiens attribuent à Sargon un règne de 17 ans. Étant donné qu’il est censé avoir commencé son règne lors de la chute de Samarie dans la sixième année de Hizqiya (2R 18:10), ou peu après, et que son fils et successeur sur le trône, Sennakérib, envahit Juda dans la 14e année de Hizqiya (2R 18:13), il est possible que Sargon ait régné 17 ans seulement si Sennakérib était vice-roi au moment où il attaqua Juda. Il semble tout autant probable que le chiffre avancé par les historiens soit erroné. Ils ne peuvent certainement pas se fier aux listes des éponymes pour établir ces règnes, comme le montre l’article CHRONOLOGIE. Cet article explique également qu’en général les scribes assyriens n’étaient pas dignes de confiance et qu’ils avaient coutume d’“ adapter ” les différentes éditions des annales de manière à flatter l’ego du souverain.
Sous son règne, Sargon bâtit une nouvelle capitale à environ 20 km au N.-E. de Ninive, près du village actuel de Khorsabad. Sur un emplacement vierge, il érigea la ville appelée Dour Sharroukin (qu’on pourrait appeler la Forteresse de Sargon) et construisit un palais royal de 200 pièces sur une plateforme qui était haute de 7,50 m et qui couvrait une surface d’environ 10 ha. Des taureaux ailés gigantesques à tête humaine gardaient l’entrée du palais, dont deux mesuraient environ 5 m de haut. Les murs étaient ornés de fresques ainsi que de reliefs sculptés qui représentaient ses campagnes et ses exploits ; l’espace mural total qu’occupaient ces reliefs représentait une distance d’environ 2,5 km. Dans une de ses inscriptions, Sargon déclare : “ Pour moi, Sargon, qui habite ce palais, puisse-t-il (le dieu Ashur) décréter longue vie, santé du corps, joie du cœur, bien-être de l’âme. ” (La Mésopotamie, p. 362). Malgré cela, les annales indiquent qu’à peu près une année après l’inauguration du palais Sargon fut tué, on ne sait pas exactement comment. Son fils Sennakérib le remplaça.
[Illustration, page 899]
Prisme de Nimroud, qui vante les conquêtes de Sargon ; mais certaines de ces conquêtes avaient peut-être été effectuées en réalité par son prédécesseur.