JÉHOVAH
(Il fait devenir, du verbe héb. hawah [devenir] à l’imparfait de la forme causative).
Nom personnel de Dieu (Is 42:8 ; 54:5). Bien qu’il soit désigné dans les Écritures par des titres et qualificatifs comme “ Dieu ”, “ Souverain Seigneur ”, “ Créateur ”, “ Père ”, “ le Tout-Puissant ” et “ le Très-Haut ”, seul son nom personnel résume et exprime pleinement sa personnalité et ses attributs, qui il est et ce qu’il est. — Ps 83:18.
Prononciation correcte du nom divin. “ Jéhovah ” est la prononciation la plus connue du nom divin en français, même si la plupart des hébraïsants lui préfèrent “ Yahvé ” ou “ Iahvé ”. Les plus anciens manuscrits hébreux présentent le nom sous la forme de quatre consonnes, communément appelées le Tétragramme (du grec tétra-, qui signifie “ quatre ”, et gramma, “ lettre ”). Ces quatre lettres (écrites de droite à gauche) sont יהוה et peuvent être transcrites en français par YHWH (ou JHVH).
Les consonnes hébraïques du nom sont donc connues. Reste à savoir quelles voyelles doivent leur être associées. Les points-voyelles n’entrèrent en usage en hébreu qu’à partir de la deuxième moitié du Ier millénaire de n. è. (Voir HÉBREU, II [L’alphabet et l’écriture hébraïques].) De plus, en raison d’une superstition religieuse née des siècles plus tôt, les points-voyelles figurant dans les manuscrits hébreux ne permettent pas de déterminer quelles voyelles doivent apparaître dans le nom divin.
Caché par superstition. À un moment donné s’est imposée parmi les Juifs une superstition qui tenait pour répréhensible le simple fait de prononcer le nom divin (représenté par le Tétragramme). On ignore quelle raison exactement fut à l’origine invoquée pour supprimer l’usage du nom divin. Certains pensent que le nom était jugé trop saint pour être prononcé par des lèvres imparfaites. Pourtant, les Écritures hébraïques n’indiquent nulle part qu’un quelconque serviteur authentique de Dieu ait jamais hésité à prononcer son nom. Des documents hébraïques non bibliques, entre autres ceux appelés Lettres de Lakish, montrent que le nom était employé dans les courriers ordinaires échangés en Palestine vers la fin du VIIe siècle av. n. è.
Une autre opinion est qu’on aurait voulu empêcher les peuples non juifs d’avoir connaissance du nom, de peur qu’ils ne l’emploient à tort. Toutefois, Jéhovah lui-même déclara que ‘ son nom serait proclamé dans toute la terre ’ (Ex 9:16 ; voir aussi 1Ch 16:23, 24 ; Ps 113:3 ; Ml 1:11, 14), afin que même ses adversaires le connaissent (Is 64:2). Le nom était de fait connu et utilisé par les nations païennes tant avant notre ère que dans les premiers siècles de notre ère (The Jewish Encyclopedia, 1976, vol. XII, p. 119). Selon une autre assertion, l’objectif était de prévenir l’usage du nom dans des rites magiques. Si ce fut le cas, le raisonnement était défaillant, car de toute évidence plus on entourerait le nom de mystère en le délaissant, plus il répondrait aux intentions des pratiquants de la magie.
Quand la superstition s’imposa-t-elle ? De même que la ou les raisons invoquées à l’origine pour cesser d’employer le nom divin sont obscures, de même on ne sait pas trop quand cette superstition s’imposa vraiment. Certains prétendent que ce fut après l’exil à Babylone (607-537 av. n. è.). Cette théorie, toutefois, s’appuie sur l’emploi prétendument restreint du nom par les derniers rédacteurs des Écritures hébraïques, une opinion qui ne résiste pas à l’analyse. Malaki, par exemple, fut sans doute un des livres des Écritures hébraïques écrits les derniers (dans la deuxième moitié du Ve siècle av. n. è.), et il accorde une place de choix au nom divin.
De nombreux ouvrages de référence ont émis l’avis que le nom tomba en désuétude vers 300 av. n. è. On a invoqué à l’appui de cette date l’absence du Tétragramme (ou de sa transcription) dans la traduction grecque des Écritures hébraïques appelée Septante, entreprise aux environs de 280 av. n. è. Il est vrai que les copies manuscrites de la Septante les plus complètes connues aujourd’hui substituent systématiquement les mots grecs Kurios (Seigneur) ou Théos (Dieu) au Tétragramme. Mais ces manuscrits principaux ne remontent qu’aux IVe et Ve siècles de n. è. On a retrouvé des copies antérieures qui, bien que fragmentaires, prouvent que les copies les plus anciennes de la Septante portaient bien le nom divin.
L’une de ces copies est constituée des fragments d’un rouleau de papyrus d’une partie du Deutéronome, catalogués P. Fouad Inventaire 266 (PHOTO, vol. 1, p. 326). Le Tétragramme y figure régulièrement, en caractères hébreux carrés à chacune de ses occurrences dans le texte hébreu traduit. Ce papyrus est daté du Ier siècle av. n. è. par les spécialistes et a donc été écrit quatre ou cinq siècles avant les manuscrits mentionnés précédemment. — Voir Appendice MN, p. 1679-1681.
Quand les Juifs en général cessèrent-ils effectivement de prononcer le nom personnel de Dieu ?
Ainsi, du moins sous forme écrite, rien n’indique vraiment que le nom divin ait disparu ou que son usage se soit perdu avant notre ère. Ce n’est qu’au Ier siècle de n. è. qu’on trouve des indices d’une attitude superstitieuse envers le nom. Josèphe, historien juif issu d’une famille sacerdotale, racontant comment Dieu se révéla à Moïse à l’emplacement du buisson embrasé, déclare : “ Alors Dieu lui révèle son nom qui n’était pas encore parvenu aux hommes, et dont je n’ai pas le droit de parler. ” (Antiquités judaïques, II, 276 [XII, 4]). Toutefois, cette déclaration de Josèphe, par ailleurs inexacte à propos de la connaissance du nom divin avant Moïse, est vague et ne révèle pas précisément quelle était la ligne de conduite générale au Ier siècle quant à la prononciation ou à l’usage du nom divin.
La Mishna, compilation des enseignements et des traditions rabbiniques, est un peu plus explicite. Sa compilation est attribuée à un rabbin appelé Juda le Prince, qui vécut aux IIe et IIIe siècles de n. è. Certaines parties de la Mishna se rapportent incontestablement aux conditions antérieures à la destruction de Jérusalem et de son temple en 70 de n. è. Un spécialiste dit toutefois à propos de la Mishna : “ Il est extrêmement difficile d’apprécier la valeur historique qu’il faut attacher à une quelconque tradition rapportée dans la Mishna. Le temps écoulé, qui contribua peut-être à obscurcir ou à fausser le souvenir d’époques très différentes : les soulèvements, les changements et la confusion politiques hérités de deux rébellions et de deux conquêtes romaines ; les valeurs à l’honneur dans le parti pharisien (dont la Mishna véhicule les opinions) que ne partageait pas le parti sadducéen [...] — ce sont des facteurs qui doivent être pris en compte pour jauger la nature des déclarations de la Mishna. De plus, une grande partie du contenu de la Mishna se situe dans le contexte d’un débat d’idées mené gratuitement, sans grande intention (semble-t-il) de transmettre l’usage historique. ” (The Mishnah, par H. Danby, Londres, 1954, p. xiv, xv). Voici quelques traditions de la Mishna relatives à la prononciation du nom divin.
On y lit à propos de la célébration annuelle du jour des Propitiations : “ Les prêtres et le peuple qui se tenaient dans l’enceinte, entendant le Nom Ineffable prononcé par le Grand-Prêtre, s’agenouillaient, se prosternaient et tombaient face à terre et s’écriaient : ‘ Loué soit à jamais le Nom de Son règne glorieux. ’ ” (Yoma VI, 2, par les Membres du Rabbinat français). Concernant les bénédictions prononcées chaque jour par les prêtres, Sota VII, 6 déclare : “ Dans le Temple le Nom était prononcé comme il s’écrivait, mais dans les provinces on lui en substituait un autre. ” D’après Sanhédrin VII, 5 (par les Membres du Rabbinat français), un blasphémateur n’était coupable ‘ que s’il prononçait distinctement le Nom ’, et lors d’un procès pour blasphème, on recourait à un nom de substitution jusqu’à ce que tous les témoignages aient été entendus ; puis on invitait en privé le témoin principal à ‘ dire distinctement ce qu’il avait entendu ’, vraisemblablement en employant le nom divin. Dans l’énumération de ceux “ qui n’ont pas part au monde futur ” faite en Sanhédrin X, 1, on lit : “ Abba Chaoul dit : même celui qui prononce le nom divin selon les lettres qui le composent. ” Cependant, à côté de ces opinions négatives, on trouve dans la première section de la Mishna l’invitation selon laquelle “ il convenait de saluer son prochain avec le nom de Dieu ”. Puis est cité l’exemple de Boaz (Ru 2:4). — Berachot IX, 5, par les Membres du Rabbinat français.
Examinées avec les réserves qui s’imposent, ces considérations tirées de la tradition peuvent révéler une tendance superstitieuse à éviter d’utiliser le nom divin un peu avant la destruction du temple de Jérusalem en 70 de n. è. Et encore, c’est avant tout des prêtres qu’il est dit explicitement qu’ils utilisaient un nom de substitution au lieu du nom divin, et ce uniquement dans les provinces. En outre, comme on l’a vu, la valeur historique des traditions de la Mishna est sujette à caution.
Il n’existe donc pas de fondement solide pour affirmer qu’on commença avant les Ier et IIe siècles de n. è. par superstition à s’abstenir d’utiliser le nom divin. Il n’empêche qu’à partir d’une certaine époque, lorsqu’il lisait les Écritures hébraïques dans la langue originale, le lecteur juif ne prononçait plus le nom divin représenté par le Tétragramme, mais lui substituait soit ʼAdhonay (Souverain Seigneur), soit ʼÈlohim (Dieu). C’est ce qu’indique le fait que, lorsque fut adoptée dans la deuxième moitié du Ier millénaire de n. è. la vocalisation par points-voyelles, les copistes juifs insérèrent les points-voyelles de ʼAdhonay ou de ʼÈlohim dans le Tétragramme, sans doute pour rappeler au lecteur de dire ces mots au lieu de prononcer le nom divin. Le lecteur qui se référait à des copies tardives de la Septante, traduction grecque des Écritures hébraïques, rencontrait bien entendu systématiquement Kurios ou Théos à la place du Tétragramme. — Voir SEIGNEUR.
Des versions en d’autres langues, par exemple la Vulgate, imitèrent ces copies tardives de la Septante. En français, selon l’usage de la Vulgate, certaines versions ne contiennent pas le nom divin (AG ; Sa).
Quelle est la prononciation exacte du nom de Dieu ?
Dans la deuxième moitié du Ier millénaire de n. è., les érudits juifs introduisirent un système de points représentant les voyelles absentes du texte consonantique hébreu. Lorsqu’ils rencontraient le nom de Dieu, au lieu d’insérer les signes vocaliques adéquats, ils en mettaient d’autres pour rappeler au lecteur qu’il devait dire ʼAdhonay (qui signifie “ Souverain Seigneur ”) ou ʼÈlohim (qui signifie “ Dieu ”).
Le Codex de Leningrad B 19A, du XIe siècle de n. è., vocalise le Tétragramme en Yehwah, Yèhwih, Yehwih et Yehowah. Le texte massorétique par C. Ginsburg vocalise le nom divin en Yehowah (Gn 3:14, note). Les hébraïsants estiment généralement que la prononciation “ Yahweh ” ou “ Yahvé ” est la plus vraisemblable. Ils font observer que la forme abrégée du nom est Yah (Jah sous sa forme latinisée), par exemple en Psaume 89:8 et dans l’expression Halelou-Yah (qui signifie “ Louez Yah ! ”) (Ps 104:35 ; 150:1, 6). Par ailleurs, les formes Yehô, Yô, Yah et Yahou, qu’on trouve entre autres dans l’orthographe hébraïque des noms Yehoshaphat, Yoshaphat et Shephatia, peuvent toutes être dérivées de Yahweh (Yahvé). Les transcriptions grecques du nom que firent les premiers écrivains chrétiens vont un peu dans le même sens, avec des orthographes comme Iabé et Iaoué, dont la prononciation en grec se rapproche de Yahweh. Néanmoins, les spécialistes sont loin d’être unanimes sur la question, certains défendant d’autres prononciations encore, comme “ Yahouwa ”, “ Yahouah ” ou “ Yehouah ”.
Puisqu’on ne peut pour l’instant être certain de la prononciation, il semble n’y avoir aucune raison de délaisser en français la forme bien connue de “ Jéhovah ” au profit d’une des autres prononciations proposées. Si on changeait, alors, pour être conséquent avec soi-même, il faudrait changer la graphie et la prononciation de bien d’autres noms figurant dans les Écritures : Jérémie deviendrait Yirmeyah, Isaïe Yeshaʽyahou et Jésus serait soit Yehôshouaʽ (comme en hébreu), soit Iêsous (comme en grec). Les mots ont pour fonction de transmettre des idées ; en français, le nom Jéhovah identifie le vrai Dieu, et transmet aujourd’hui cette notion de façon plus satisfaisante que n’importe quel autre substitut proposé.
Importance du nom. De nombreux érudits et traducteurs modernes de la Bible préconisent de se ranger à la tradition et d’enlever le nom distinctif de Dieu. Selon eux, cette ligne de conduite se justifie d’une part parce que la prononciation du nom est incertaine, et d’autre part parce que le vrai Dieu étant au-dessus de tous et unique il n’a pas besoin d’un nom particulier. Rien dans les Écritures inspirées, que ce soit celles des temps préchrétiens ou les Écritures grecques chrétiennes, ne corrobore cette opinion.
Le Tétragramme figure 6 828 fois dans le texte hébreu imprimé dans la Biblia Hebraica et dans la Biblia Hebraica Stuttgartensia. Dans la Traduction du monde nouveau, le nom divin figure 6 973 fois dans les Écritures hébraïques, car les traducteurs ont pris en compte, entre autres, le fait qu’à certains endroits les scribes avaient remplacé le nom divin par ʼAdhonay ou ʼÈlohim (voir Appendice MN, p. 1676-1678). La fréquence même à laquelle ce nom revient témoigne de l’importance que lui attache l’Auteur de la Bible, dont c’est le nom. Son emploi tout au long des Écritures dépasse de loin celui de tout autre titre donné à Dieu, comme “ Souverain Seigneur ” ou “ Dieu ”.
On notera aussi avec intérêt l’importance accordée aux noms eux-mêmes dans les Écritures hébraïques et chez les peuples sémites. Le professeur G. Manley fait remarquer : “ Une étude du mot ‘ nom ’ dans l’A[ncien] T[estament] est révélatrice de tout ce que ce mot pouvait signifier en hébreu. Le nom n’était pas seulement une étiquette. Il était caractéristique de la véritable personnalité de celui qui le portait. [...] Quand un individu plaçait son ‘ nom ’ sur quelque chose ou sur quelqu’un, cela voulait dire qu’il prenait cet objet ou cette personne sous son influence ou sous sa protection. ” — New Bible Dictionary, par J. Douglas, 1985, p. 430 ; voir aussi Le Talmud, par A. Cohen, Paris, 1950, p. 68 ; Gn 27:36 ; 1S 25:25 ; Ps 20:1 ; Pr 22:1 ; voir NOM.
“ Dieu ” et “ Père ” ne sont pas distinctifs. Le titre “ Dieu ” n’est ni personnel ni distinctif (on peut même faire de son ventre un dieu ; Ph 3:19). Dans les Écritures hébraïques, le même mot (ʼÈlohim) est appliqué à Jéhovah, le vrai Dieu, mais aussi à de faux dieux, tels le dieu philistin Dagôn (Jg 16:23, 24 ; 1S 5:7) et le dieu assyrien Nisrok (2R 19:37). Un Hébreu ne pouvait manifestement se contenter de dire à un Philistin ou à un Assyrien qu’il adorait “ Dieu [ʼÈlohim] ” pour identifier le Personnage à qui allait son culte.
Dans ses articles consacrés à Jéhovah, The Imperial Bible-Dictionary illustre éloquemment la différence entre ʼÈlohim (Dieu) et Jéhovah. On y lit concernant le nom Jéhovah : “ Il s’agit partout d’un nom propre, qui désigne le Dieu personnel et lui seul ; tandis qu’Èlohim tient plus du nom commun, désignant habituellement, il est vrai, le Suprême, mais pas nécessairement ni uniformément. [...] Un Hébreu parlera peut-être du Èlohim, du vrai Dieu, par opposition avec tous les faux dieux ; mais il ne parlera jamais du Jéhovah, car Jéhovah est le nom du vrai Dieu uniquement. Il dira fréquemment mon Dieu [...] ; mais jamais mon Jéhovah, car quand il dit mon Dieu il veut dire Jéhovah. Il parlera du Dieu d’Israël, mais jamais du Jéhovah d’Israël, car il n’y a pas d’autre Jéhovah. Il parlera du Dieu vivant, mais jamais du Jéhovah vivant, car il ne peut concevoir Jéhovah autrement que vivant. ” — Par P. Fairbairn, Londres, 1874, vol. I, p. 856 ; voir aussi Dictionnaire de la Bible, par F. Vigouroux, Paris, 1912, tome deuxième, deuxième partie, col. 1702.
Cela est vrai également du terme grec signifiant Dieu, Théos. Il était attribué indifféremment au vrai Dieu et à des dieux païens comme Zeus et Hermès (Jupiter et Mercure chez les Romains) (voir Ac 14:11-15). Les paroles de Paul en 1 Corinthiens 8:4-6 établissent la réalité : “ Car, bien qu’il y ait ceux qu’on appelle ‘ dieux ’, soit au ciel, soit sur la terre, tout comme il y a beaucoup de ‘ dieux ’ et beaucoup de ‘ seigneurs ’, pour nous il y a réellement un seul Dieu le Père, de qui toutes choses sont, et nous pour lui. ” La croyance en de nombreux dieux, qui impose de distinguer le vrai Dieu des autres, s’est perpétuée jusqu’au XXe siècle.
Si Paul parle de “ Dieu le Père ”, cela ne signifie pas pour autant que le nom du vrai Dieu est “ Père ”, car l’appellation “ père ” s’applique aussi à tout homme qui a des enfants et qualifie des hommes à d’autres niveaux de relations (Rm 4:11, 16 ; 1Co 4:15). Le Messie reçoit le titre de “ Père éternel ”. (Is 9:6.) Jésus appela Satan le “ père ” de certains adversaires qui cherchaient à le tuer (Jn 8:44). On appliquait également ce terme aux dieux des nations : le dieu grec Zeus était présenté comme le grand dieu père dans la poésie homérique. “ Dieu le Père ” a un nom, un nom différent de celui de son Fils ; c’est ce que montrent de nombreux textes (Mt 28:19 ; Ré 3:12 ; 14:1). Paul connaissait le nom personnel de Dieu, Jéhovah, tel qu’il figure dans le récit de la création contenu dans la Genèse qu’il cita dans ses écrits. Ce nom, Jéhovah, distingue “ Dieu le Père ” (voir Is 64:8), ce qui coupe court à toute tentative visant à superposer, ou à assimiler, son identité et sa personne à celles de tout autre personnage à qui les titres “ dieu ” ou “ père ” pourraient être attribués.
Pas un dieu tribal. Jéhovah est appelé “ le Dieu d’Israël ” et ‘ le Dieu de leurs ancêtres ’. (1Ch 17:24 ; Ex 3:16.) Néanmoins, ce lien étroit établi avec les Hébreux et la nation israélite n’autorise pas à limiter le nom à celui d’un dieu tribal, comme le font certains. L’apôtre chrétien Paul écrivit : “ Est-il seulement le Dieu des Juifs ? Ne l’est-il pas aussi des gens des nations ? Oui, des gens des nations aussi. ” (Rm 3:29). Jéhovah est non seulement “ le Dieu de toute la terre ” (Is 54:5), mais aussi le Dieu de l’univers, “ l’Auteur du ciel et de la terre ”. (Ps 124:8.) L’alliance que Jéhovah avait conclue avec Abraham, quelque 2 000 ans avant l’époque de Paul, avait promis des bénédictions pour les gens de toutes les nations, ce qui montrait que Dieu s’intéresse à toute l’humanité. — Gn 12:1-3 ; voir aussi Ac 10:34, 35 ; 11:18.
Jéhovah Dieu rejeta finalement l’Israël selon la chair, nation infidèle. Mais son nom devait subsister au sein de la nouvelle nation de l’Israël spirituel, la congrégation chrétienne, même quand cette nouvelle nation commencerait à compter comme membres des non-Juifs. C’est pourquoi, alors qu’il présidait une assemblée chrétienne à Jérusalem, le disciple Jacques déclara que Dieu s’était “ occupé des nations [non juives] pour tirer d’entre elles un peuple pour son nom ”. Pour prouver que cela avait été prédit, Jacques cita ensuite une prophétie du livre d’Amos dans laquelle figure le nom de Jéhovah. — Ac 15:2, 12-14 ; Am 9:11, 12.
Dans les Écritures grecques chrétiennes. Au vu de ces arguments, il semble tout à fait surprenant que les copies manuscrites disponibles du texte original des Écritures grecques chrétiennes ne contiennent pas le nom divin sous sa forme pleine. Le nom est dès lors également absent de la plupart des traductions de ce qu’on appelle le Nouveau Testament. Pourtant, le nom figure bien dans ces sources sous sa forme abrégée en Révélation (Apocalypse) 19:1, 3, 4, 6, dans l’expression “ Alléluia ” ou “ Hallelou-Yah ”. (Ch ; Md ; Pl ; TOB.) L’appel consigné ici, lancé par les fils spirituels de Dieu, “ Louez Yah ! ” (MN), démontre que le nom de Dieu n’était pas obsolète ; il était tout aussi primordial et à sa place que durant la période préchrétienne. Dans ce cas, pourquoi est-il absent des Écritures grecques chrétiennes dans sa forme intégrale ?
Pourquoi le nom divin ne figure-t-il sous sa forme pleine dans aucun manuscrit ancien disponible des Écritures grecques chrétiennes ?
On a longtemps avancé que les rédacteurs divinement inspirés des Écritures grecques chrétiennes tirèrent leurs citations des Écritures hébraïques de la Septante et que, cette version remplaçant le Tétragramme par Kurios ou Théos, ils n’utilisèrent pas le nom Jéhovah. Comme cela a été démontré, cet argument ne tient plus. Commentant le fait que les plus anciens fragments de la Septante portent effectivement le nom divin sous sa forme hébraïque, le professeur P. Kahle écrit : “ Nous savons à présent que, tant qu’il a été écrit par des Juifs à l’intention des Juifs, le texte de la Bible grecque [la Septante] ne rendait pas le nom divin par kurios ; le Tétragramme était plutôt inscrit en caractères hébreux ou grecs dans les MSS [manuscrits]. Ce sont les chrétiens qui ont remplacé le Tétragramme par le mot kurios lorsque le nom divin écrit en caractères hébreux en est venu à ne plus être compris. ” (The Cairo Geniza, Oxford, 1959, p. 222). Quand ce changement dans les traductions grecques des Écritures hébraïques eut-il lieu ?
Ce fut sans doute au cours des siècles qui suivirent la mort de Jésus et de ses apôtres. La version grecque d’Aquila, qui date du IIe siècle de n. è., portait encore le Tétragramme en caractères hébreux. Aux environs de 245 de n. è., Origène, érudit célèbre, produisit les Hexaples, reproduction en six colonnes des Écritures hébraïques inspirées : 1) l’original hébreu et araméen, accompagné 2) d’une transcription en grec et des versions grecques 3) d’Aquila, 4) de Symmaque, 5) de la Septante et 6) de Théodotion. À propos de ce qu’ont révélé les copies fragmentaires connues actuellement, le professeur W. Waddell déclare : “ Dans les Hexaples d’Origène [...] les versions grecques d’Aquila, de Symmaque et de la LXX [Septante] représentaient toutes JHWH par ΠΙΠΙ ; dans la deuxième colonne des Hexaples, le Tétragramme était écrit en caractères hébreux. ” (The Journal of Theological Studies, Oxford, vol. XLV, 1944, p. 158, 159). D’autres pensent que le texte original des Hexaples d’Origène portait le Tétragramme en caractères hébreux dans toutes les colonnes. Origène lui-même déclara que “ dans les manuscrits les plus fidèles LE NOM figure en caractères hébreux, toutefois non en [caractères] hébreux actuels, mais dans les plus anciens ”.
Même encore au IVe siècle de n. è., Jérôme, le traducteur de la Vulgate, dit dans son prologue aux livres de Samuel et des Rois : “ Nous trouvons aujourd’hui encore le nom de Dieu, lequel renferme quatre lettres [יהוה], nous le trouvons exprimé en antiques lettres dans certains volumes grecs. ” (Mélanges théologiques, historiques et moraux, empruntés des œuvres de Saint Jérome, traduit par F.-Z. Collombet, Paris, 1842, tome second, p. 115). Dans une lettre écrite à Rome en 384 de n. è., Jérôme déclare : “ Neuvième nom [de Dieu], tétragramme, qu’ils ont estimé [anékphônêton], c’est-à-dire ineffable ; il s’écrit par les lettres suivantes : yod, he, vau, he. Cet ensemble n’a pas été compris par certains ; à cause de la ressemblance des traits qui composent ces quatre lettres, et quand ils l’ont rencontré dans les livres grecs, ils l’ont lu d’ordinaire ΠΙΠΙ [lettres grecques correspondant aux lettres romaines PIPI]. ” — Lettres, Paris, 1951, p. 14.
Les prétendus chrétiens qui donc “ ont remplacé le Tétragramme par le mot kurios ” dans les copies de la Septante n’étaient pas les premiers disciples de Jésus. Ce furent des personnes des siècles suivants, où l’apostasie prédite s’était amplement développée et avait entamé la pureté des enseignements chrétiens. — 2Th 2:3 ; 1Tm 4:1.
Jésus et ses disciples l’utilisaient. Ainsi, à l’époque de Jésus et de ses disciples, le nom divin figurait bel et bien dans les copies des Écritures, tant dans les manuscrits hébreux que dans les manuscrits grecs. Jésus et ses disciples employaient-ils le nom divin à l’oral et à l’écrit ? Puisque Jésus condamna les traditions pharisaïques (Mt 15:1-9), il ne serait pas du tout logique de penser que Jésus et ses disciples se soient en l’affaire laissé guider par les conceptions des Pharisiens (comme celles rapportées par la Mishna). Le nom même de Jésus signifie “ Jéhovah est salut ”. Il déclara : “ Je suis venu au nom de mon Père ” (Jn 5:43) ; il apprit à ses disciples à prier : “ Notre Père dans les cieux, que ton nom soit sanctifié ” (Mt 6:9) ; ses œuvres, il les faisait, selon ses propres termes, ‘ au nom de son Père ’ (Jn 10:25) ; et la nuit qui précéda sa mort, il dit dans une prière qu’il avait manifesté le nom de son Père à ses disciples et demanda : “ Père saint, veille sur eux à cause de ton nom. ” (Jn 17:6, 11, 12, 26). Compte tenu de tout cela, lorsque Jésus citait les Écritures hébraïques ou en donnait lecture, il utilisait à coup sûr le nom divin, Jéhovah (comparer Mt 4:4, 7, 10 avec Dt 8:3 ; 6:16 ; 6:13 ; également Mt 22:37 avec Dt 6:5 ; Mt 22:44 avec Ps 110:1 ; et Lc 4:16-21 avec Is 61:1, 2). Logiquement, les disciples de Jésus, parmi lesquels les rédacteurs inspirés des Écritures grecques chrétiennes, suivaient son exemple dans ce domaine.
Dans ce cas, pourquoi le nom est-il absent des manuscrits existants des Écritures grecques chrétiennes, appelées Nouveau Testament ? Apparemment parce qu’à l’époque où furent produites ces copies existantes (à partir du IIIe siècle de n. è.) le texte original des écrits des apôtres et des disciples avait subi des modifications. C’est pourquoi les copistes postérieurs remplacèrent sans aucun doute le nom divin sous la forme du Tétragramme par Kurios ou Théos (PHOTO, vol. 1, p. 324). Les faits indiquent précisément que c’est ce qui arriva dans des copies tardives de la Septante, traduction des Écritures hébraïques.
Le nom divin est restitué. Comprenant que les choses avaient dû se passer ainsi, certains traducteurs ont fait figurer le nom Jéhovah dans leur version des Écritures grecques chrétiennes. The Emphatic Diaglott, traduction anglaise du XIXe siècle par Benjamin Wilson, contient un certain nombre de fois le nom Jéhovah, spécialement aux endroits où les écrivains chrétiens citèrent les Écritures hébraïques. Mais dès 1533, dans une traduction faite par Anton Margaritha, le Tétragramme avait déjà figuré dans des traductions en hébreu des Écritures chrétiennes. Par la suite, dans diverses autres traductions en hébreu, les traducteurs utilisèrent le Tétragramme aux endroits où l’écrivain inspiré citait un passage des Écritures hébraïques qui contenait le nom divin.
On jugera du bien-fondé de ce choix au vu de la réflexion suivante de R. Girdlestone, ancien directeur du Wycliffe Hall (Oxford). Il a fait cette remarque avant que des données provenant de manuscrits n’attestent qu’à l’origine la Septante contenait le nom Jéhovah. Il a dit : “ Si cette version [la Septante] avait gardé le mot [Jéhovah], ou avait ne serait-ce qu’employé un mot grec pour Jéhovah et un autre pour Adonai, cet usage aurait sans aucun doute été gardé dans les discours et les raisonnements du N. T. Ainsi, notre Seigneur, lorsqu’il cita le Ps 110e Psaume, au lieu de dire ‘ Le Seigneur a dit à mon Seigneur ’, dit peut-être ‘ Jéhovah a dit à Adoni ’. ”
Poursuivant sur la même hypothèse (qui s’avère à présent un fait établi), il a déclaré : “ En supposant qu’un érudit chrétien était en train de traduire le Testament grec en hébreu, il devait vérifier, chaque fois qu’il rencontrait le mot Κύριος, si un élément du contexte indiquait quel était son véritable correspondant hébreu ; et c’est ici la difficulté qui survenait pour traduire le N. T. dans n’importe quelle langue si le titre Jéhovah était conservé dans l’A. T. [tel qu’il est traduit dans la Septante]. Les Écritures hébraïques étaient un guide dans de nombreux passages : ainsi lorsqu’apparaît l’expression ‘ l’ange du Seigneur ’, nous savons que le mot Seigneur représente Jéhovah ; nous arriverions à la même conclusion pour l’expression ‘ la parole du Seigneur ’ si le schéma précédent était suivi dans l’A. T. ; de même dans le cas du titre ‘ le Seigneur des armées ’. Par contre, chaque fois que figure l’expression ‘ mon Seigneur ’ ou ‘ notre Seigneur ’, il nous faudrait savoir que le mot Jéhovah est à écarter, et employer Adonai ou Adoni. ” (Synonyms of the Old Testament, 1897, p. 43). Il s’agit là du principe adopté par les traductions des Écritures grecques (mentionnées plus haut) qui contiennent le nom Jéhovah.
Cependant, à cet égard la Traduction du monde nouveau, qui est utilisée tout au long du présent ouvrage, est remarquable, puisque le nom divin sous la forme “ Jéhovah ” y figure 237 fois dans les Écritures grecques chrétiennes. Comme on vient de le montrer, une telle option est tout à fait fondée.
Utilisation primitive du nom et sa signification. On invoque souvent à tort Exode 3:13-16 et 6:3 pour affirmer que le nom Jéhovah fut révélé pour la première fois à Moïse, quelque temps avant l’Exode. Il est vrai que Moïse posa la question : “ Supposons que je sois venu maintenant vers les fils d’Israël et que je leur aie dit : ‘ Le Dieu de vos ancêtres m’a envoyé vers vous ’, et qu’ils disent vraiment : ‘ Quel est son nom ? ’ Que leur dirai-je ? ” Mais cela ne signifie pas que Moïse ou les Israélites ne connaissaient pas le nom de Jéhovah. Le nom même de la mère de Moïse, Yokébed, signifie peut-être “ Jéhovah est gloire ”. (Ex 6:20.) La question de Moïse était sans doute liée à la condition dans laquelle se trouvaient les fils d’Israël. Ils subissaient depuis des décennies un dur esclavage, et aucun soulagement n’était en vue. Ils avaient très certainement cédé au doute et au découragement, et ne croyaient plus vraiment que Dieu ait le pouvoir et l’intention de les délivrer (voir Éz 20:7, 8). Dès lors, si Moïse leur avait simplement dit qu’il venait au nom de “ Dieu ” (ʼÈlohim) ou du “ Souverain Seigneur ” (ʼAdhonay), cela n’aurait peut-être pas évoqué grand-chose chez les Israélites qui souffraient. Ils savaient que les Égyptiens avaient eux aussi des dieux et des seigneurs, et ils entendaient sans aucun doute les Égyptiens les provoquer, dire que leurs dieux étaient supérieurs au Dieu des Israélites.
Il faut également se rappeler qu’à l’époque les noms avaient réellement une signification ; il ne s’agissait pas comme aujourd’hui de simples “ étiquettes ” identifiant une personne. Moïse savait que le nom d’Abram (qui signifie “ Père est élevé ”) avait été changé en Abraham (qui signifie “ Père d’une foule [multitude] ”) en raison du dessein de Dieu concernant Abraham. De même, le nom de Saraï avait été changé en Sara et celui de Jacob en Israël ; dans chaque cas, le changement révélait quelque chose de fondamental et de prophétique sur le dessein de Dieu les concernant. Moïse put très bien se demander si Jéhovah allait se révéler sous un nouveau nom pour éclairer son dessein envers Israël. Pour Moïse, se rendre auprès des Israélites au “ nom ” de Celui qui l’envoyait signifiait en être le représentant, et l’autorité avec laquelle il parlerait serait fonction, ou à la mesure, de ce nom et de ce qu’il représentait (voir Ex 23:20, 21 ; 1S 17:45). La question de Moïse était donc sensée.
En hébreu, la réponse de Dieu fut : ʼÈhyèh ʼAshèr ʼÈhyèh. Certaines versions rendent cette expression par “ JE SUIS QUI JE SUIS ”. ʼÈhyèh est une forme du verbe hébreu hayah qui signifie “ devenir ”, “ être ”. Il n’est pas question ici du fait que Dieu existe par lui-même, mais de ce qu’il se propose de devenir pour d’autres. C’est pourquoi la Traduction du monde nouveau rend correctement l’expression hébraïque ci-dessus par “ JE SERAI CE QUE JE SERAI ”. Jéhovah ajouta : “ Voici ce que tu diras aux fils d’Israël : ‘ JE SERAI m’a envoyé vers vous. ’ ” — Ex 3:14, note.
Les paroles que Dieu prononça ensuite indiquent qu’il n’exposait pas un changement dans son nom, mais seulement qu’il faisait mieux connaître sa personnalité : “ Voici ce que tu diras aux fils d’Israël : ‘ Jéhovah le Dieu de vos ancêtres, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob, m’a envoyé vers vous. ’ C’est là mon nom pour des temps indéfinis et c’est là mon mémorial de génération en génération. ” (Ex 3:15 ; voir aussi Ps 135:13 ; Ho 12:5). Le nom Jéhovah vient d’un verbe hébreu signifiant “ devenir ” ; plusieurs biblistes pensent que ce nom signifie “ Il fait devenir ”. Cette définition correspond bien à Jéhovah dans son rôle de Créateur de toutes choses et de Celui qui accomplit son dessein. Seul le vrai Dieu peut à juste titre et indiscutablement porter un tel nom.
Ces éléments aident à comprendre ce que Jéhovah dit ensuite à Moïse : “ Je suis Jéhovah. J’apparaissais à Abraham, à Isaac et à Jacob comme Dieu Tout-Puissant, mais en ce qui concerne mon nom de Jéhovah, je ne me suis pas fait connaître d’eux. ” (Ex 6:2, 3). Ces patriarches, ancêtres de Moïse, ayant à maintes reprises employé le nom Jéhovah, il est clair que Dieu voulait dire qu’il ne s’était manifesté à ces hommes en sa qualité de Jéhovah que d’une façon limitée. Pour prendre un exemple, on pourrait difficilement prétendre que ceux qui avaient connu Abram l’avaient vraiment connu en tant qu’Abraham (qui signifie “ Père d’une foule [multitude] ”) à l’époque où il n’avait qu’un fils, Yishmaël. Après la naissance d’Isaac et d’autres fils, et après qu’ils eurent engendré des enfants, le nom Abraham revêtit une signification ou une importance tout autre. De même, le nom Jéhovah allait à présent se charger d’une signification plus étendue pour les Israélites.
“ Connaître ” ne signifie donc pas forcément seulement se faire une idée ou être conscient de l’existence de quelque chose ou de quelqu’un. Le sot Nabal connaissait le nom de David, pourtant il demanda “ Qui est David ? ” une manière de dire “ Qu’est-ce que David ? ” (1S 25:9-11 ; voir aussi 2S 8:13). De même, Pharaon avait dit à Moïse : “ Qui est Jéhovah pour que j’obéisse à sa voix en renvoyant Israël ? Je ne connais pas du tout Jéhovah ; d’ailleurs je ne renverrai pas Israël. ” (Ex 5:1, 2). Par ces paroles, Pharaon entendait manifestement qu’à ses yeux Jéhovah n’était pas le vrai Dieu ou qu’il n’avait aucune autorité sur le roi d’Égypte et ses affaires, qu’il n’avait pas la puissance d’accomplir Sa volonté, exposée par Moïse et Aaron. Mais à présent, Pharaon et toute l’Égypte, de même que les Israélites, allaient connaître la signification réelle de ce nom, la personne qu’il désignait. Comme Jéhovah l’expliqua à Moïse, ils allaient apprendre cela en voyant Dieu mener à bien Son dessein envers les Israélites : il les libérerait, leur donnerait la Terre promise, accomplissant de la sorte l’alliance qu’il avait conclue avec leurs ancêtres. Par ce moyen, comme l’annonçait Dieu, ‘ vraiment ils sauraient qu’il était Jéhovah leur Dieu ’. — Ex 6:4-8 ; voir TOUT-PUISSANT.
C’est donc pertinemment que D. Weir, professeur d’hébreu, affirme que ceux qui voient en Exode 6:2, 3 la première révélation du nom Jéhovah “ n’ont pas examiné [ces versets] à la lumière d’autres passages ; sinon ils auraient saisi que par nom il ne faut pas comprendre ici les deux syllabes qui forment le nom Jéhovah, mais le concept que ce nom exprime. Lorsqu’on lit en Isaïe, ch. Is lii. 6, ‘ C’est pourquoi mon peuple connaîtra mon nom ’ ; ou en Jérémie, ch. Jr xvi. 21, ‘ Ils sauront que mon nom est Jéhovah ’ ; ou dans les Psaumes, Ps. ix. [10, 16], ‘ Ceux qui connaissent ton nom se confieront en toi ’ ; on comprend d’emblée que connaître le nom de Jéhovah est très différent de connaître les quatre lettres qui le composent. C’est savoir par expérience que Jéhovah est réellement ce que son nom proclame qu’il est. (Voir aussi Is. xix. 20, 21 ; Ézékiel. xx. 5, 9 ; xxxix. 6, 7 ; Ps. lxxxiii. [18] ; lxxxix. [16] ; 2 Ch. vi. 33.) ” — The Imperial Bible-Dictionary, vol. I, p. 856, 857.
Le premier couple humain le connaissait. Ce n’est pas à Moïse que le nom Jéhovah fut révélé en premier, car le premier homme le connaissait certainement. Le nom figure la première fois dans le récit divin en Genèse 2:4, à la suite de la relation des actes de création de Dieu, et il identifie le Créateur des cieux et de la terre à “ Jéhovah Dieu ”. Il est raisonnable de penser que c’est Jéhovah Dieu qui fit connaître à Adam ce récit de la création. La Genèse ne le précise pas, mais elle ne dit pas non plus explicitement que Jéhovah expliqua à Adam qui se réveillait d’où venait Ève. Pourtant, les paroles d’Adam quand il accueillit Ève montrent qu’on lui avait indiqué de quelle façon Dieu l’avait formée, à partir de son corps (Gn 2:21-23). Jéhovah et son fils humain eurent sans aucun doute de nombreuses conversations dont le court récit de la Genèse ne fait pas mention.
Ève est le premier humain dont il est précisément dit qu’il employa le nom divin (Gn 4:1). Elle avait manifestement eu connaissance de ce nom par Adam, son mari et chef, qui lui avait aussi fait part du commandement de Dieu concernant l’arbre de la connaissance du bon et du mauvais (encore qu’une fois de plus le récit ne spécifie pas que c’est Adam qui l’en informa). — Gn 2:16, 17 ; 3:2, 3.
Ainsi que l’explique l’article ÉNOSH, lorsqu’on commença du temps d’Énosh, petit-fils d’Adam, “ d’invoquer le nom de Jéhovah ”, ce ne fut sans doute pas avec foi ni d’une manière approuvée de Dieu. En effet, entre Abel et Noé, on lit seulement au sujet de Hénok (à ne pas confondre avec Énosh) le fils de Yared qu’il ‘ marchait avec le vrai Dieu ’ dans la foi (Gn 4:26 ; 5:18, 22-24 ; Hé 11:4-7). Par l’intermédiaire de Noé et de sa famille, le nom divin se perpétua après le déluge, après la dispersion des peuples à la tour de Babel, et fut transmis au patriarche Abraham et à ses descendants. — Gn 9:26 ; 12:7, 8.
La personne qui porte ce Nom. Jéhovah est le Créateur de toutes choses, la grande Cause Première ; il est donc incréé, sans commencement (Ré 4:11). “ Par le nombre ses années sont inscrutables. ” (Jb 36:26). Il est impossible de lui donner un âge, car il n’existe pas de point de départ à partir duquel compter. Bien que sans âge, il est à juste titre appelé “ l’Ancien des jours ”, puisque son existence remonte sans fin dans le passé (Dn 7:9, 13). Il est aussi sans fin dans les temps à venir (Ré 10:6), puisqu’il est incorruptible, non sujet à la mort. C’est pourquoi il est appelé le “ Roi d’éternité ” (1Tm 1:17), pour qui mille ans sont comme une veille de quelques heures pendant la nuit. — Ps 90:2, 4 ; Jr 10:10 ; Hab 1:12 ; Ré 15:3.
Jéhovah, qui est éternel, est cependant en tout premier lieu un Dieu historique, qui s’identifie à des époques, des lieux, des personnes et des événements précis. Dans ses rapports avec les humains, il a agi selon un calendrier défini (Gn 15:13, 16 ; 17:21 ; Ex 12:6-12 ; Ga 4:4). Parce que son existence éternelle est indéniable et la réalité la plus fondamentale de l’univers, il a juré par elle dans des serments, disant : “ Aussi vrai que je suis vivant ”, garantissant par là l’absolue fiabilité de ses promesses et de ses prophéties (Jr 22:24 ; Tse 2:9 ; Nb 14:21, 28 ; Is 49:18). Des hommes prêtèrent également serment en jurant sur la réalité de l’existence de Jéhovah (Jg 8:19 ; Ru 3:13). Seuls les insensés disent : “ Il n’y a pas de Jéhovah. ” — Ps 14:1 ; 10:4.
Descriptions de sa présence. Parce qu’il est un Esprit qu’il n’est pas au pouvoir des hommes de voir (Jn 4:24), toute description de son aspect dans des termes humains ne donne qu’une vague idée de sa gloire incomparable (Is 40:25, 26). Sans avoir réellement vu leur Créateur (Jn 1:18), certains de ses serviteurs reçurent des visions inspirées de ses cours célestes. La description qu’ils font de sa présence reflète non seulement une grande dignité et une majesté impressionnante, mais aussi la sérénité, l’ordre, la beauté et le charme. — Ex 24:9-11 ; Is 6:1 ; Éz 1:26-28 ; Dn 7:9 ; Ré 4:1-3 ; voir aussi Ps 96:4-6.
On note que ces descriptions recourent à des métaphores et à des rapprochements, comparant l’aspect de Jéhovah à des choses connues des humains : les pierres précieuses, le feu, l’arc-en-ciel. Il est même décrit comme s’il avait certaines caractéristiques humaines. Certains spécialistes accordent beaucoup d’importance à ce qu’ils appellent les expressions anthropomorphiques qu’on rencontre dans la Bible, comme les références aux “ yeux ”, aux “ oreilles ”, à la “ face ” (1P 3:12), au “ bras ” (Éz 20:33), à la “ [main] droite ” (Ex 15:6) de Dieu, etc. Il est cependant manifeste que de telles expressions sont nécessaires pour mettre la description à la portée de l’humain. Si Jéhovah Dieu nous fournissait une description de sa personne en des termes propres aux esprits, cela équivaudrait à exposer des équations algébriques complexes à quelqu’un ne possédant que les rudiments des mathématiques, ou à essayer d’expliquer les couleurs à un aveugle de naissance. — Jb 37:23, 24.
Ce qu’on appelle les anthropomorphismes ne doivent en conséquence jamais être pris au sens littéral, pas plus que lorsque Dieu est appelé par métaphore un “ soleil ”, un “ bouclier ” ou un “ Rocher ”. (Ps 84:11 ; Dt 32:4, 31.) Contrairement aux humains, Jéhovah n’a pas besoin de rayons de lumière pour voir (Gn 16:13), et il peut observer des actes accomplis dans l’obscurité la plus totale (Ps 139:1, 7-12 ; Hé 4:13). Il peut embrasser toute la terre de son regard (Pr 15:3) et observer sans équipement spécial l’embryon qui se développe dans le ventre d’une mère (Ps 139:15, 16). Son ouïe n’est pas non plus dépendante d’ondes sonores se propageant dans une atmosphère, car il peut “ entendre ” des pensées qu’un homme émet silencieusement en son cœur (Ps 19:14). L’homme est déjà incapable de mesurer l’immense univers physique ; or, les cieux physiques n’englobent ni ne contiennent le lieu où Dieu réside, bien moins encore est-ce le cas d’une maison ou d’un temple sur la terre (1R 8:27 ; Ps 148:13). Par Moïse, Jéhovah a clairement interdit à la nation d’Israël de faire une image le représentant sous la forme d’un homme ou d’une quelconque créature (Dt 4:15-18). Si, selon le récit de Luc, Jésus disait expulser des démons “ par le moyen du doigt de Dieu ”, celui de Matthieu montre que Jésus entendait par là “ l’esprit de Dieu ”, sa force agissante. — Lc 11:20 ; Mt 12:28 ; comparer Jr 27:5 avec Gn 1:2.
Ses qualités sont révélées dans la création. Certaines facettes de la personnalité de Jéhovah sont révélées par ses œuvres de création, même avant la création de l’homme (Rm 1:20). Le fait même qu’il créa révèle son amour. En effet, Jéhovah se suffit à lui-même ; il ne lui manque rien. Par conséquent, quand bien même il a créé des centaines de millions de fils spirituels, aucun ne peut ajouter quoi que ce soit à sa connaissance ou apporter un quelconque aspect désirable à ses sentiments ou à sa personnalité qu’il ne possède déjà à un degré supérieur. — Dn 7:9, 10 ; Hé 12:22 ; Is 40:13, 14 ; Rm 11:33, 34.
Cela ne signifie pas pour autant que Jéhovah ne prend pas plaisir en ses créatures. L’homme ayant été fait “ à l’image de Dieu ” (Gn 1:27), la joie qu’un enfant procure à son père, surtout s’il manifeste son amour filial et agit sagement, reflète la joie que Jéhovah trouve dans ses créatures intelligentes qui l’aiment et qui le servent avec sagesse (Pr 27:11 ; Mt 3:17 ; 12:18). Il éprouve ce plaisir non en raison d’un avantage matériel ou physique, mais parce qu’il constate que ses créatures respectent de bon gré ses normes justes et se montrent désintéressées et généreuses (1Ch 29:14-17 ; Ps 50:7-15 ; 147:10, 11 ; Hé 13:16). Par contre, ceux qui se conduisent mal et qui méprisent son amour, qui jettent l’opprobre sur son nom et qui font souffrir cruellement les autres, ‘ peinent Jéhovah dans son cœur ’. — Gn 6:5-8 ; Ps 78:36-41 ; Hé 10:38.
Jéhovah prend également plaisir à exercer ses pouvoirs, soit en créant, soit d’autres façons, car il agit toujours dans un but précis et avec de bons mobiles (Ps 135:3-6 ; Is 46:10, 11 ; 55:10, 11). Lui qui donne avec générosité “ tout beau don et tout présent parfait ” prend plaisir à récompenser ses fils et ses filles fidèles en leur accordant des bienfaits (Jc 1:5, 17 ; Ps 35:27 ; 84:11, 12 ; 149:4). Néanmoins, bien qu’il soit un Dieu chaleureux et sensible, à l’évidence son bonheur ne dépend pas de ses créatures ; il ne déroge pas non plus aux principes justes par sentimentalité.
Jéhovah a également fait preuve d’amour en accordant au Fils spirituel qu’il créa en premier le privilège de participer avec lui à toutes les autres œuvres de création, tant spirituelle que matérielle, et il s’est montré généreux en le faisant savoir, ce qui honore son Fils (Gn 1:26 ; Col 1:15-17). Il n’a donc pas craint une éventuelle rivalité, ce qui aurait dénoté une faiblesse ; au contraire, il a témoigné d’une confiance absolue en sa légitime souveraineté (Ex 15:11) ainsi qu’en la fidélité et en l’attachement de son Fils. Il accorde à ses fils spirituels une liberté relative dans l’accomplissement de leurs tâches, leur permettant même parfois de s’exprimer sur la manière dont ils s’acquitteraient de missions spéciales. — 1R 22:19-22.
L’apôtre Paul souligna que les qualités invisibles de Jéhovah sont également révélées dans sa création matérielle (Rm 1:19, 20). L’étendue de son pouvoir dépasse l’entendement, puisque les gigantesques galaxies, où sont groupées des milliards d’étoiles, ne sont que ‘ l’œuvre de ses doigts ’. (Ps 8:1, 3, 4 ; 19:1.) Quant à sa sagesse, elle est si profonde que même au bout de milliers d’années de recherches et d’études, la compréhension qu’ont les hommes de la création physique n’est qu’un “ murmure ” comparé au puissant tonnerre (Jb 26:14 ; Ps 92:5 ; Ec 3:11). Les activités créatrices de Jéhovah en rapport avec la planète Terre ont été caractérisées par un enchaînement logique, suivant un programme précis (Gn 1:2-31), si bien que la terre est, pour reprendre les paroles des astronautes au XXe siècle, un joyau dans l’espace.
Révélé à l’homme en Éden. Quel genre de personne Jéhovah s’est-il révélé être pour ses premiers enfants humains ? Dans sa perfection, Adam aurait certainement adhéré à la déclaration que fit plus tard un psalmiste : “ Je te louerai de ce que, d’une si redoutable manière, je suis fait si merveilleusement. Tes œuvres sont prodigieuses, et mon âme le sait parfaitement. ” (Ps 139:14). Depuis son corps, aux capacités si remarquablement variées parmi les créatures terrestres, jusqu’aux choses qu’il observait autour de lui, l’homme avait toutes les raisons d’éprouver un immense respect pour son Créateur. Chaque nouvel oiseau, mammifère et poisson ; chaque plante, fleur et arbre différents ; et toutes les prairies, les forêts, les collines, les vallées et les cours d’eau que l’homme voyait lui montraient la profondeur et l’étendue de la sagesse de son Père et la richesse de sa personnalité, ce que reflète la grande variété de ses œuvres de création (Gn 2:7-9 ; voir aussi Ps 104:8-24). Tous les sens de l’homme (la vue, l’ouïe, le goût, l’odorat et le toucher) transmettaient à son esprit réceptif des témoignages qu’il avait un Créateur des plus généreux et des plus prévenant.
Par ailleurs, les besoins intellectuels d’Adam, le besoin de conversation et de compagnie, ne furent pas oubliés, car son Père lui donna un vis-à-vis féminin doté d’intelligence (Gn 2:18-23). L’homme et la femme auraient tout à fait pu chanter à Jéhovah, comme le psalmiste : “ De la joie à satiété est près de ta face ; il y a des choses agréables à ta droite pour toujours. ” (Ps 16:8, 11). Ayant été l’objet de tant d’amour, Adam et Ève devaient certainement savoir que “ Dieu est amour ”, la source de l’amour et l’exemple suprême sous ce rapport. — 1Jn 4:16, 19.
Mais plus important, Jéhovah Dieu combla les besoins spirituels de l’homme. Le Père d’Adam se révéla à son fils humain ; il communiqua avec lui, lui confia des tâches dont l’exécution fidèle constituerait un aspect essentiel du culte rendu par l’homme. — Gn 1:27-30 ; 2:15-17 ; voir aussi Am 4:13.
Un Dieu qui a des normes morales. L’homme perçut très tôt que Jéhovah n’est pas seulement un Dieu sage et généreux, mais aussi un Dieu qui a des principes moraux, qui est attaché à des normes précises quant à ce qui est bien et mal dans la conduite et les façons d’agir. Si, comme on l’a dit, Adam connaissait le récit de la création, alors il savait également que Jéhovah a des normes divines, car le récit précise à propos de ses œuvres de création que Jéhovah vit que “ c’était très bon ”, qu’elles répondaient de ce fait à sa norme parfaite. — Gn 1:3, 4, 12, 25, 31 ; voir aussi Dt 32:3, 4.
Sans normes, on ne saurait déterminer ce qui est bon et mauvais ; on ne saurait pas non plus évaluer à quel point telle chose est authentique ou excellente. À cet égard, les remarques suivantes, tirées de l’Encyclopædia Britannica (1959, vol. 21, p. 306, 307) sont instructives :
“ Les réalisations de l’homme [pour ce qui est de fixer des normes] [...] sont insignifiantes à côté des normes de la nature. Les constellations, les orbites des planètes, les propriétés immuables que sont la conductibilité, la ductilité, l’élasticité, la dureté, la perméabilité, la réfringence, la solidité ou la viscosité des matières de la nature, [...] ou la structure des cellules ne sont que quelques exemples de la normalisation étonnante présente dans la nature. ”
Soulignant l’amplitude de cette normalisation dans la création matérielle, le même ouvrage déclare : “ C’est uniquement grâce à la normalisation que l’on constate dans la nature qu’il est possible d’identifier et de classifier [...] les nombreuses espèces de plantes, de poissons, d’oiseaux ou de mammifères. À l’intérieur de ces espèces, les individus se ressemblent dans les plus infimes détails pour ce qui est des structures, des fonctions et des habitudes propres à chacune [voir Gn 1:11, 12, 21, 24, 25]. Si le corps humain ne répondait pas également à une telle normalisation, les médecins ne sauraient pas si telle personne possède certains organes, où les chercher [...]. En fait, sans les normes de la nature, il ne pourrait exister ni société organisée, ni enseignement, ni médecins ; tous dépendent de similitudes sous-jacentes, comparables. ”
Adam constata une grande stabilité dans les œuvres que Jéhovah avait créées : l’alternance régulière du jour et de la nuit, l’écoulement continu vers l’aval de l’eau du fleuve d’Éden en vertu de la pesanteur, et d’innombrables autres choses attestant que le Créateur de la terre est un Dieu non de confusion mais d’ordre (Gn 1:16-18 ; 2:10 ; Ec 1:5-7 ; Jr 31:35, 36 ; 1Co 14:33). L’homme trouva certainement cela utile dans l’accomplissement du travail et des activités qui lui étaient confiés (Gn 1:28 ; 2:15), car il lui était possible de planifier et d’exécuter son travail en toute confiance, sans être tiraillé par l’incertitude.
Eu égard à tout cela, l’homme, doté d’intelligence, ne dut pas s’étonner que Jéhovah établisse des normes pour régir sa conduite et ses rapports avec son Créateur. L’extraordinaire habileté de Jéhovah était un modèle pour Adam chargé de cultiver l’Éden et d’en prendre soin (Gn 2:15 ; 1:31). Adam prit aussi connaissance de la norme établie par Dieu dans le mariage, savoir la monogamie, et dans les liens familiaux (Gn 2:24). L’obéissance aux instructions divines fut spécialement mise en évidence comme une norme dont le respect était directement lié à la vie. Adam étant un homme parfait, Jéhovah lui fixait pour norme l’obéissance parfaite. Jéhovah donna à son fils terrestre la possibilité de prouver son amour et son attachement par l’obéissance à Son commandement interdisant de manger d’un seul des nombreux arbres fruitiers d’Éden (Gn 2:16, 17). C’était simple. Mais Adam vivait dans un contexte simple, éloigné de la complexité et de la confusion qui sont apparues depuis. Jésus Christ souligna quelque 4 000 ans plus tard la sagesse de Jéhovah manifeste dans la simplicité de cette épreuve : “ Celui qui est fidèle dans ce qui est tout petit est fidèle aussi dans ce qui est beaucoup, et celui qui est injuste dans ce qui est tout petit est injuste aussi dans ce qui est beaucoup. ” — Lc 16:10.
L’ordre et les normes établis n’empêcheraient pas l’homme de profiter de la vie ; au contraire, ils ajouteraient à son agrément. L’encyclopédie citée plus haut, à l’article consacré aux normes, fait observer à propos de la création matérielle : “ Toutefois, malgré ce témoignage écrasant de l’existence de normes, personne n’accuse la nature de monotonie. Bien que le fondement des couleurs soit formé d’une étroite bande de longueurs d’ondes du spectre, les variations et les combinaisons qui charment l’œil sont pour ainsi dire illimitées. D’une façon similaire, tout le génie musical est transmis à l’oreille par un autre groupe restreint de fréquences. ” (Vol. 21, p. 307). Pareillement, les exigences de Dieu laissaient au premier couple humain toute la liberté à laquelle pouvait aspirer un cœur juste. Il n’y avait pas à les entraver par une accumulation de lois et d’ordonnances. L’exemple d’amour du Créateur, ainsi que le respect et l’amour qu’ils lui portaient leur dicteraient de ne pas outrepasser les justes limites de leur liberté. — Voir 1Tm 1:9, 10 ; Rm 6:15-18 ; 13:8-10 ; 2Co 3:17.
Ainsi, par sa personne même, par ses manières d’agir et par ses déclarations, Jéhovah Dieu était et demeure la Norme suprême pour tout l’univers, la définition et la plénitude de la bonté. Son Fils, alors qu’il était sur la terre, put donc dire à un homme : “ Pourquoi m’appelles-tu bon ? Personne n’est bon, si ce n’est un seul : Dieu. ” — Mc 10:17, 18 ; voir aussi Mt 19:17 ; 5:48.
Sa souveraineté sera justifiée et son nom sanctifié. Tout ce qui a trait à la personne de Dieu est saint : son nom personnel, Jéhovah, est saint et doit en conséquence être sanctifié (Lv 22:32). Sanctifier signifie “ rendre saint, mettre à part ou tenir pour sacré ”, donc ne pas employer comme quelque chose de commun ou d’ordinaire (Is 6:1-3 ; Lc 1:49 ; Ré 4:8 ; voir SANCTIFICATION). En considération de la personne qu’il désigne, le nom de Jéhovah est “ grand et redoutable ” (Ps 99:3, 5), “ majestueux ” et “ à une hauteur inaccessible ” (Ps 8:1 ; 148:13), méritant d’être redouté. — Is 29:23.
Profanation du nom. Il apparaît que le nom divin était entouré d’un tel respect jusqu’à ce que les événements du jardin d’Éden entraînent sa profanation. La rébellion de Satan mit en question la réputation de Dieu. Il prétendit devant Ève parler pour Dieu en lui révélant ce que “ Dieu sait ”, alors que par la même occasion il mettait en doute l’ordre que Dieu avait donné à Adam à propos de l’arbre de la connaissance du bon et du mauvais (Gn 3:1-5). Puisqu’il s’était vu confier une mission par Dieu et qu’il était le chef terrestre par l’intermédiaire duquel Dieu transmettait ses instructions à la famille humaine, Adam représentait Jéhovah sur la terre (Gn 1:26, 28 ; 2:15-17 ; 1Co 11:3). Il est dit de ceux qui remplissent une telle fonction qu’ils ‘ servent au nom de Jéhovah ’ et ‘ parlent en son nom ’. (Dt 18:5, 18, 19 ; Jc 5:10.) Cela veut dire que, si Ève avait déjà profané le nom de Jéhovah par sa désobéissance, en l’imitant Adam commettait un acte de mépris particulièrement répréhensible pour le nom qu’il représentait. — Voir 1S 15:22, 23.
La question capitale est d’ordre moral. Manifestement, le fils spirituel qui devint Satan savait que Jéhovah est un Dieu attaché à des normes morales, non un être inconstant, imprévisible. S’il avait connu Jéhovah comme un Dieu aux réactions violentes non maîtrisées, il n’aurait pu que s’attendre à être détruit sur-le-champ en raison de sa conduite. La question que Satan souleva en Éden ne tendait donc pas simplement à mettre à l’épreuve la puissance de Jéhovah ou sa capacité de détruire. Il s’agissait plutôt d’une question d’ordre moral : Dieu avait-il moralement le droit d’exercer la souveraineté universelle et d’exiger de toutes ses créatures en tout lieu une obéissance et un attachement absolus ? C’est ce qu’indiquent les paroles que Satan adressa à Ève (Gn 3:1-6). De même, le livre de Job montre Jéhovah dévoilant devant ses fils angéliques assemblés tout ce que signifiait la position qu’avait prise son Adversaire. Satan prétendait, en effet, que la fidélité de Job (et, par suite, celle de toutes les créatures intelligentes de Dieu) à l’égard de Jéhovah n’était pas totale, qu’elle n’était pas motivée par un attachement sincère et un amour authentique. — Jb 1:6-22 ; 2:1-8.
Ainsi, la question de l’intégrité des créatures intelligentes de Dieu était une question secondaire, accessoire, résultant de la question principale, celle du droit de Dieu à la souveraineté universelle. Ces questions exigeaient du temps pour montrer si les accusations étaient fondées ou injustifiées, pour attester la disposition de cœur des créatures de Dieu, et donc pour trancher sans doute possible (voir Jb 23:10 ; 31:5, 6 ; Ec 8:11-13 ; Hé 5:7-9 ; voir aussi INTÉGRITÉ ; MÉCHANCETÉ). C’est pourquoi Jéhovah n’exécuta pas immédiatement le couple humain rebelle, ni le fils spirituel qui avait soulevé la question ; les deux ‘ semences ’ annoncées, qui représenteraient les deux parties s’opposant dans ce litige, allaient venir à l’existence. — Gn 3:15.
Cette question était toujours pendante quand Jésus Christ était sur la terre, comme le montre sa confrontation avec Satan dans le désert, après son jeûne de 40 jours. Les tactiques dignes d’un serpent qu’employa l’Adversaire de Jéhovah pour tenter le Fils de Dieu reprenaient le schéma d’Éden 4 000 ans plus tôt. Satan proposant la domination sur les royaumes de la terre, il était manifeste que la question de la souveraineté universelle n’avait pas changé (Mt 4:1-10). Le livre de la Révélation révèle que cette question resterait pendante jusqu’au jour où Jéhovah Dieu déclarerait l’affaire close (voir aussi Ps 74:10, 22, 23) et exécuterait son juste jugement sur tous ses adversaires, justifiant totalement sa souveraineté et sanctifiant son saint nom par le moyen de son Royaume juste. — Ré 11:17, 18 ; 12:17 ; 14:6, 7 ; 15:3, 4 ; 19:1-3, 11-21 ; 20:1-10, 14.
Pourquoi la sanctification du nom de Dieu est-elle de la plus haute importance ?
Le récit biblique est centré dans son intégralité sur la justification de la souveraineté de Jéhovah, ce qui montre à l’évidence que le dessein premier de Jéhovah Dieu est la sanctification de son nom. Cette sanctification exige que le nom de Dieu soit lavé de tout opprobre. Mais plus encore, elle exige que toutes les créatures intelligentes au ciel et sur la terre honorent ce nom comme étant saint. Par suite, cela implique qu’elles reconnaissent et respectent la position souveraine de Jéhovah, de leur plein gré, désireuses de le servir, se réjouissant d’accomplir sa volonté, par amour pour lui. Dans la prière qu’il adressa à Jéhovah en Psaume 40:5-10, David exprima bien cet état d’esprit et parla de la sanctification véritable du nom de Jéhovah. (On notera qu’en Hé 10:5-10 un apôtre appliqua des parties de ce psaume à Jésus Christ.)
En conséquence, le bon ordre, la paix et le bien-être de tout l’univers et de ses habitants dépendent de la sanctification du nom de Jéhovah. Le Fils de Dieu mit cette idée en évidence, indiquant en même temps le moyen par lequel Jéhovah accomplirait son dessein, lorsqu’il apprit à ses disciples à prier Dieu ainsi : “ Que ton nom soit sanctifié. Que ton royaume vienne. Que ta volonté se fasse, comme dans le ciel, aussi sur la terre. ” (Mt 6:9, 10). La connaissance du dessein principal de Jéhovah permet de comprendre le pourquoi des actes de Dieu et de ses rapports avec ses créatures décrits tout au long de la Bible.
C’est ainsi qu’on apprend que la nation d’Israël, dont l’histoire constitue une grande partie du récit biblique, fut choisie par Jéhovah pour être un peuple portant son nom (Dt 28:9, 10 ; 2Ch 7:14 ; Is 43:1, 3, 6, 7). L’alliance de la Loi que Jéhovah conclut avec les Israélites insistait sur leur obligation de vouer un attachement exclusif à Jéhovah leur Dieu et de ne pas prendre son nom de manière indigne, “ car Jéhovah, disait-elle, ne laissera pas impuni celui qui prendra son nom de manière indigne ”. (Ex 20:1-7 ; voir aussi Lv 19:12 ; 24:10-23.) Jéhovah ayant démontré en libérant Israël d’Égypte son pouvoir de sauver et son pouvoir de détruire, son nom fut ‘ proclamé dans toute la terre ’, et sa renommée précéda Israël dans sa marche vers la Terre promise (Ex 9:15, 16 ; 15:1-3, 11-17 ; 2S 7:23 ; Jr 32:20, 21). C’est ce qu’exprima le prophète Isaïe : “ C’est ainsi que tu as conduit ton peuple, pour te faire un nom magnifique. ” (Is 63:11-14). Lorsqu’Israël se montra rebelle dans le désert, Jéhovah lui témoigna de la miséricorde et ne l’abandonna pas. Il révéla toutefois sa motivation première : “ Je me suis mis à agir à cause de mon nom, pour qu’il ne soit pas profané sous les yeux des nations. ” — Éz 20:8-10.
Durant toute l’histoire de cette nation, Jéhovah lui rappela l’importance de son nom sacré. Jéhovah choisit comme capitale Jérusalem, où se trouvait le mont Sion, “ pour y placer son nom, pour l’y faire résider ”. (Dt 12:5, 11 ; 14:24, 25 ; Is 18:7 ; Jr 3:17.) Le temple érigé dans cette ville était la ‘ maison pour le nom de Jéhovah ’. (1Ch 29:13-16 ; 1R 8:15-21, 41-43.) Ce qui se ferait dans ce temple ou dans cette ville, bon ou mauvais, aurait inévitablement une incidence sur le nom de Jéhovah et retiendrait son attention (1R 8:29 ; 9:3 ; 2R 21:4-7). La profanation du nom de Jéhovah en ces lieux entraînerait à coup sûr la destruction de la ville et le rejet du temple lui-même (1R 9:6-8 ; Jr 25:29 ; 7:8-15 ; voir le comportement et les paroles de Jésus en Mt 21:12, 13 ; 23:38). C’est pour ces raisons que Jérémie et Daniel implorèrent la miséricorde et l’aide de Jéhovah en faveur de leur peuple et de la ville ‘ par égard pour son nom ’. — Jr 14:9 ; Dn 9:15-19.
Lorsqu’il annonça que le peuple portant son nom retournerait en Juda et serait purifié, Jéhovah leur précisa de nouveau son souci premier : “ Et j’aurai compassion de mon saint nom. ” “ ‘ Ce n’est pas à cause de vous que je le fais, ô maison d’Israël, mais c’est pour mon saint nom que vous avez profané parmi les nations où vous êtes venus. ’ ‘ À coup sûr, je sanctifierai mon grand nom, qui était profané [...] ; et il faudra que les nations sachent que je suis Jéhovah ’, c’est là ce que déclare le Souverain Seigneur Jéhovah, ‘ quand je serai sanctifié parmi vous sous leurs yeux. ’ ” — Éz 36:20-27, 32.
Ces versets et d’autres montrent que Jéhovah n’accorde pas une importance excessive à l’humanité. Tous les hommes sont pécheurs ; en toute justice ils méritent donc la mort, et ce n’est que grâce à la faveur imméritée et à la miséricorde de Dieu que quelqu’un obtiendra la vie (Rm 5:12, 21 ; 1Jn 4:9, 10). Jéhovah ne doit rien à l’humanité, et pour ceux qui l’obtiendront la vie éternelle sera un don, non un salaire gagné (Rm 5:15 ; 6:23 ; Tt 3:4, 5). Il est vrai que Dieu a manifesté un amour incomparable aux humains (Jn 3:16 ; Rm 5:7, 8). Mais ce serait contraire à la vérité biblique et adopter une optique erronée que de penser que le salut des humains est la question capitale ou le critère permettant de juger de l’équité, de la justice et de la sainteté de Dieu. Le psalmiste exposa la bonne façon de voir les choses quand il s’exclama avec humilité et admiration : “ Ô Jéhovah notre Seigneur, que ton nom est majestueux dans toute la terre, toi dont on raconte la dignité au-dessus des cieux ! [...] Quand je vois tes cieux, les œuvres de tes doigts, la lune et les étoiles que tu as préparées, qu’est-ce que le mortel pour que tu penses à lui, et le fils de l’homme tiré du sol pour que tu t’occupes de lui ? ” (Ps 8:1, 3, 4 ; 144:3 ; voir aussi Is 45:9 ; 64:8). La sanctification du nom de Jéhovah Dieu a légitimement plus d’importance que la vie de l’ensemble des humains. C’est pourquoi, comme l’expliqua le Fils de Dieu, l’homme doit aimer son prochain comme lui-même, mais il doit aimer Dieu de tout son cœur, de toute sa pensée, de toute son âme et de toute sa force (Mc 12:29-31). Cela signifie aimer Jéhovah Dieu plus que sa famille, ses amis ou la vie elle-même. — Dt 13:6-10 ; Ré 12:11 ; voir l’attitude des trois Hébreux en Dn 3:16-18 ; voir aussi JALOUX, JALOUSIE.
Cette façon de voir conforme aux Écritures ne devrait pas rebuter les hommes, mais au contraire les amener à apprécier d’autant plus le vrai Dieu. Puisque Jéhovah aurait pu, en toute justice, anéantir tous les humains pécheurs, le salut qu’il procure à certains humains n’en exalte que plus l’étendue de sa miséricorde et de sa faveur imméritée (Jn 3:36). Il ne prend pas plaisir à la mort du méchant (Éz 18:23, 32 ; 33:11), mais il ne permettra pas pour autant que le méchant échappe à l’exécution de son jugement (Am 9:2-4 ; Rm 2:2-9). Il est patient en vue du salut des humains obéissants (2P 3:8-10), mais il ne tolérera pas indéfiniment une situation qui jette l’opprobre sur son nom grandiose (Ps 74:10, 22, 23 ; Is 65:6, 7 ; 2P 2:3). Il use de compassion et de compréhension envers les faiblesses des hommes, pardonnant “ largement ” à ceux qui se repentent (Ps 103:10-14 ; 130:3, 4 ; Is 55:6, 7), mais il ne les dispense pas des responsabilités qu’ils portent légitimement à cause de leurs actions et des répercussions qu’elles ont sur eux et sur leur famille. Ils moissonnent ce qu’ils ont semé (Dt 30:19, 20 ; Ga 6:5, 7, 8). Ainsi donc, Jéhovah équilibre de façon sublime et à la perfection la justice et la miséricorde. Les humains qui voient les choses comme la Parole de Dieu les révèle (Is 55:8, 9 ; Éz 18:25, 29-31) ne commettent pas la grave erreur de traiter à la légère la faveur imméritée de Dieu ou d’“ en manquer le but ”. — 2Co 6:1 ; Hé 10:26-31 ; 12:29.
Ses qualités et ses normes sont immuables. Jéhovah déclara au peuple d’Israël : “ Je suis Jéhovah ; je n’ai pas changé. ” (Ml 3:6). Ces paroles, il les prononça quelque 3 500 ans après avoir créé les humains et quelque 1 500 ans après avoir conclu l’alliance abrahamique. Certains prétendent que le Dieu révélé dans les Écritures hébraïques est différent du Dieu révélé par Jésus Christ et par les rédacteurs des Écritures grecques chrétiennes, mais à l’analyse cette affirmation est sans fondement. Le disciple Jacques dit fort justement de Dieu : “ Chez lui il n’y a pas de variation de la rotation de l’ombre. ” (Jc 1:17). Il n’y a pas eu “ adoucissement ” de la personnalité de Jéhovah Dieu au fil des siècles, car un adoucissement n’était pas nécessaire. La sévérité que lui attribuent les Écritures grecques chrétiennes n’est pas moindre, ni son amour plus intense qu’au début de ses rapports avec les humains en Éden.
Les différences apparentes dans la personnalité divine ne sont en réalité que des facettes différentes de la même personnalité constante. Elles viennent de ce que des situations ou des personnes diverses appellent des comportements ou des rapports différents (voir Is 59:1-4). Ce n’est pas Jéhovah qui changea, mais Adam et Ève qui changèrent ; ils se mirent eux-mêmes dans une position qui interdisait à Jéhovah, en vertu de ses normes de justice immuables, de les considérer plus longtemps comme membres de sa famille universelle bien-aimée. En raison de leur perfection, ils étaient entièrement responsables de leur conduite mauvaise délibérée (Rm 5:14) et ne pouvaient donc bénéficier de la miséricorde divine. Jéhovah leur témoigna néanmoins de la faveur imméritée, car il commença par leur fournir des vêtements et leur permit de vivre plusieurs siècles à l’extérieur du lieu protégé qu’était l’Éden et d’avoir des enfants avant de mourir des suites de leur conduite pécheresse (Gn 3:8-24). Après leur renvoi d’Éden, Dieu cessa apparemment de communiquer avec Adam et sa femme.
Pourquoi il peut traiter avec des humains imparfaits. Les normes de justice de Jéhovah lui permirent d’agir différemment avec les enfants d’Adam et Ève qu’avec Adam et Ève eux-mêmes. Pourquoi cela ? Ayant hérité du péché, c’est involontairement qu’ils viennent au monde créatures imparfaites, naturellement enclines au mal (Ps 51:5 ; Rm 5:12). Jéhovah avait donc une raison d’être miséricordieux envers eux. Sa première prophétie (Gn 3:15), qu’il énonça en Éden en même temps que son jugement, montra que la rébellion de ses premiers enfants humains (et celle d’un de ses fils spirituels) ne l’avait pas aigri ni n’avait tari le flot de son amour. Cette prophétie, dont la signification fut pleinement révélée des millénaires plus tard, annonçait en termes symboliques le règlement de la situation provoquée par la rébellion et le rétablissement des conditions dans leur perfection originelle. — Voir le symbolisme du “ serpent ”, de la “ femme ” et de la “ semence ” en Ré 12:9, 17 ; Ga 3:16, 29 ; 4:26, 27.
Jéhovah a permis aux descendants d’Adam de vivre sur la terre pendant des millénaires, bien qu’ils soient imparfaits, voués à la mort et incapables de s’affranchir eux-mêmes de l’étreinte mortelle du péché. L’apôtre chrétien Paul expliqua pourquoi Jéhovah a toléré cette situation : “ Car la création a été soumise à la futilité, non de son propre gré, mais à cause de celui qui l’a soumise [à savoir Jéhovah Dieu], en raison de l’espérance que la création elle aussi sera libérée de l’esclavage de la corruption et aura la liberté glorieuse des enfants de Dieu. Car nous savons que jusqu’à maintenant toute la création ne cesse de gémir ensemble et de souffrir ensemble. ” (Rm 8:20-22). Ainsi que l’explique l’article PRESCIENCE, PRÉDÉTERMINATION, PRÉDESTINATION, rien n’indique que Jéhovah décida d’user de ses facultés de discernement pour savoir à l’avance si le premier couple humain dévierait. Par contre, quand cela se fut produit, Jéhovah détermina d’avance le moyen de redresser la situation (Ép 1:9-11). Ce saint secret, renfermé au départ dans la prophétie symbolique énoncée en Éden, fut finalement entièrement révélé en la personne du Fils unique-engendré de Jéhovah envoyé sur la terre “ pour rendre témoignage à la vérité ” et, ‘ par la faveur imméritée de Dieu, goûter la mort pour tout homme ’. — Jn 18:37 ; Hé 2:9 ; voir RANÇON.
Les relations de Jéhovah avec certains descendants du pécheur Adam et les bénédictions qu’il leur accorda ne marquèrent donc pas une modification des normes de sa justice parfaite. Il n’approuvait pas par là leur condition pécheresse. Parce que ses desseins se réaliseront à coup sûr, Jéhovah “ appelle les choses qui ne sont pas comme si elles étaient ” (comme lorsqu’il donna à Abram le nom d’“ Abraham ”, qui signifie “ Père d’une foule [multitude] ”, alors que lui et Sara étaient encore sans enfant) (Rm 4:17). Sachant qu’au temps fixé par lui (Ga 4:4) il fournirait une rançon, le moyen légal de pardonner le péché et d’éliminer l’imperfection (Is 53:11, 12 ; Mt 20:28 ; 1P 2:24), Jéhovah pouvait sans se désavouer traiter avec des humains imparfaits, ayant hérité du péché, et les avoir à son service. Il disposait en effet d’une base juste pour les ‘ compter ’ comme justes en raison de leur foi dans ses promesses et, plus tard, dans la réalisation de ces promesses en Christ Jésus, sacrifice parfait pour les péchés (Jc 2:23 ; Rm 4:20-25). Ainsi donc, la rançon fournie par Jéhovah et ses bienfaits attestent éloquemment de l’amour et de la miséricorde de Jéhovah, mais aussi de sa fidélité à ses normes élevées de justice, car au travers de la rançon il montre “ sa propre justice à l’époque présente, pour qu’il soit juste même quand il déclare juste l’homme qui [bien qu’imparfait] a foi en Jésus ”. — Rm 3:21-26 ; voir aussi Is 42:21 ; DÉCLARER JUSTE.
Pourquoi le ‘ Dieu de paix ’ combat. Ce n’est pas parce que Jéhovah déclara en Éden qu’il mettrait une inimitié entre la semence de son Adversaire et la semence de “ la femme ” qu’il n’était plus le ‘ Dieu de paix ’. (Gn 3:15 ; Rm 16:20 ; 1Co 14:33.) La situation correspondait alors à celle qui existait lorsque son Fils, Jésus Christ, vivait sur la terre. Après avoir parlé de son union avec son Père céleste, Jésus déclara : “ Ne pensez pas que je sois venu mettre la paix sur la terre ; je suis venu mettre, non pas la paix, mais l’épée. ” (Mt 10:32-40). Le ministère de Jésus fut cause de divisions, même au sein des familles (Lc 12:51-53), mais c’est parce qu’il adhérait aux normes justes et à la vérité de Dieu et les proclamait. Beaucoup endurcissant leur cœur contre ces vérités et d’autres les acceptant, des divisions apparurent (Jn 8:40, 44-47 ; 15:22-25 ; 17:14). Les divisions étaient inévitables à partir du moment où il fallait soutenir les principes divins, mais la responsabilité en incombait à ceux qui rejetaient le bien.
De même, l’inimitié fut prédite parce que les normes parfaites de Jéhovah ne permettraient pas d’excuser l’attitude rebelle de la “ semence ” de Satan. Dieu désapprouvant les rebelles et bénissant ceux qui s’attachent à la justice, il en résulterait des divisions (Jn 15:18-21 ; Jc 4:4), comme dans le cas de Caïn et d’Abel. — Gn 4:2-8 ; Hé 11:4 ; 1Jn 3:12 ; Jude 10, 11 ; voir CAÏN.
L’attitude rebelle adoptée par les hommes et les anges méchants revenait à contester la souveraineté légitime de Jéhovah et le bon ordre de tout l’univers. Face à une telle contestation, Jéhovah dut devenir “ un guerrier ” (Ex 15:3-7) qui défend son beau nom et ses normes justes, qui se bat en faveur de ceux qui l’aiment et le servent, et qui exécute le jugement sur ceux qui méritent la destruction (1S 17:45 ; 2Ch 14:11 ; Is 30:27-31 ; 42:13). Il n’hésite pas à utiliser sa toute-puissance, parfois dévastatrice, comme au déluge, lors de la destruction de Sodome et Gomorrhe, et quand il délivra Israël d’Égypte (Dt 7:9, 10). Et il ne craint pas de révéler les moindres détails des guerres justes qu’il mène ; il ne s’excuse pas, n’ayant aucune raison d’avoir honte (Jb 34:10-15 ; 36:22-24 ; 37:23, 24 ; 40:1-8 ; Rm 3:4). Dieu se doit d’agir par respect pour son nom et pour la justice qu’il représente, ainsi que par amour pour ceux qui l’aiment. — Is 48:11 ; 57:21 ; 59:15-19 ; Ré 16:5-7.
Les Écritures grecques chrétiennes tracent le même portrait. L’apôtre Paul encouragea ses compagnons chrétiens en ces termes : “ Le Dieu qui donne la paix écrasera bientôt Satan sous vos pieds. ” (Rm 16:20 ; voir aussi Gn 3:15). Il expliqua aussi qu’il est juste de la part de Dieu de rendre la tribulation à ceux qui font subir la tribulation à ses serviteurs, amenant une destruction éternelle sur ces adversaires (2Th 1:6-9). Cela s’accordait avec les enseignements du Fils de Dieu qui ne laissa planer aucun doute sur la détermination inflexible de son Père d’anéantir par la force toute méchanceté et ceux qui la pratiquent (Mt 13:30, 38-42 ; 21:42-44 ; 23:33 ; Lc 17:26-30 ; 19:27). Le livre de la Révélation dépeint de nombreuses opérations guerrières autorisées par Dieu. Cependant, tout cela débouche par la sagesse de Jéhovah sur l’établissement d’une paix durable, universelle, solidement fondée sur l’équité et la justice. — Is 9:6, 7 ; 2P 3:13.
Ses rapports avec l’Israël selon la chair et avec l’Israël spirituel. Pareillement, le contenu des Écritures hébraïques et celui des Écritures grecques chrétiennes diffèrent le plus souvent parce que les premières exposent surtout les rapports de Jéhovah avec l’Israël selon la chair, tandis que les dernières introduisent et décrivent dans une large mesure ses rapports avec l’Israël spirituel, la congrégation chrétienne. On a donc d’un côté une nation forte de plusieurs millions d’individus qui en sont membres uniquement en raison de leur ascendance, un mélange de bon et de mauvais. De l’autre côté, on a une nation spirituelle composée de personnes attirées à Dieu par Jésus Christ, des personnes qui aiment la vérité et le bien, et qui de plein gré se vouent personnellement à Jéhovah pour accomplir sa volonté. Logiquement, Dieu allait entretenir avec ces deux groupes des rapports différents, le premier groupe s’attirant davantage de manifestations de la colère et de la sévérité de Jéhovah que le deuxième.
Ce serait pourtant une grosse erreur que de passer à côté de la vision enrichissante et réconfortante de la personnalité de Jéhovah Dieu qu’offrent ses manières d’agir envers l’Israël selon la chair. Elles fournissent des exemples attestant solidement que Jéhovah est le genre de Personne qu’il affirma être lorsqu’il se décrivit à Moïse en ces termes : “ Jéhovah, Jéhovah, Dieu miséricordieux et compatissant, lent à la colère et abondant en bonté de cœur et en vérité, conservant la bonté de cœur à des milliers, pardonnant la faute et la transgression et le péché, mais en aucun cas il n’accordera l’exemption de punition, faisant venir la punition pour la faute des pères sur les fils et sur les petits-fils, sur la troisième génération et sur la quatrième génération. ” — Ex 34:4-7 ; voir aussi Ex 20:5.
Bien qu’équilibrés par la justice, ce sont en réalité l’amour et la patience qui sont les traits dominants de la personnalité de Jéhovah telle que la révèle l’histoire d’Israël, peuple extrêmement favorisé qui dans l’ensemble se montra incroyablement ‘ raide de cou ’ et ‘ dur de cœur ’ envers son Créateur (Ex 34:8, 9 ; Ne 9:16, 17 ; Jr 7:21-26 ; Éz 3:7). Si Jéhovah condamna Israël avec vigueur et à maintes reprises par l’intermédiaire de ses prophètes, cela ne met que plus en évidence la grandeur de sa miséricorde et l’étendue stupéfiante de sa patience. Après avoir supporté cette nation plus de 1 500 ans, et après que les chefs religieux de celle-ci eurent provoqué la mort de son propre Fils, Jéhovah leur accorda encore sa faveur pendant trois ans et demi : dans sa miséricorde, il limita la prédication de la bonne nouvelle à cette nation pour lui donner une possibilité supplémentaire d’accéder au privilège de régner avec son Fils, possibilité dont profitèrent des milliers de Juifs repentants. — Ac 2:1-5, 14-41 ; 10:24-28 ; 34-48 ; voir SOIXANTE-DIX SEMAINES.
Jésus Christ faisait manifestement référence à la déclaration de Jéhovah citée précédemment selon laquelle Dieu ‘ fait venir la punition sur les descendants éloignés des coupables ’ lorsqu’il dit aux scribes et aux Pharisiens hypocrites : “ Vous dites : ‘ Si nous avions été là aux jours de nos ancêtres, nous ne nous serions pas associés à eux pour répandre le sang des prophètes. ’ Donc, vous témoignez contre vous-mêmes que vous êtes fils de ceux qui ont assassiné les prophètes. Eh bien, comblez donc la mesure de vos ancêtres. ” (Mt 23:29-32). Malgré leurs affirmations, ces hommes démontrèrent par leurs actions qu’ils approuvaient les actes iniques de leurs ancêtres et étaient eux-mêmes encore parmi ‘ ceux qui haïssent Jéhovah ’. (Ex 20:5 ; Mt 23:33-36 ; Jn 15:23, 24.) C’est pourquoi, à la différence des Juifs qui se repentirent et qui écoutèrent le Fils de Dieu, ces hommes subirent les conséquences cumulées du jugement divin quand, des années plus tard, Jérusalem fut assiégée puis détruite, et que la majorité de ses habitants périrent. Ils auraient pu en réchapper, mais ils choisirent de ne pas profiter de la miséricorde de Jéhovah. — Lc 21:20-24 ; voir aussi Dn 9:10, 13-15.
Son Fils reflète sa personnalité. Dans tous les domaines, Jésus Christ fut le fidèle reflet de l’admirable personnalité de son Père, Jéhovah Dieu, au nom de qui il vint (Jn 1:18 ; Mt 21:9 ; Jn 12:12, 13 ; voir aussi Ps 118:26). Jésus déclara : “ Le Fils ne peut rien faire de sa propre initiative, mais seulement ce qu’il voit faire au Père. Car ce que Celui-là fait, cela, le Fils aussi le fait pareillement. ” (Jn 5:19). Il s’ensuit que la bonté et la compassion, la douceur et la cordialité, ainsi que l’amour puissant de la justice et la haine de la méchanceté (Hé 1:8, 9) que manifesta Jésus sont autant de qualités que le Fils avait observées chez son Père, Jéhovah Dieu. — Comparer Mt 9:35, 36 avec Ps 23:1-6 et Is 40:10, 11 ; Mt 11:27-30 avec Is 40:28-31 et Is 57:15, 16 ; Lc 15:11-24 avec Ps 103:8-14 ; Lc 19:41-44 avec Éz 18:31, 32 ; voir aussi Éz 33:11.
Toute personne éprise de justice qui lit les Écritures inspirées et en vient vraiment à “ connaître ” et à comprendre la pleine signification du nom de Jéhovah (Ps 9:9, 10 ; 91:14 ; Jr 16:21) a donc toutes les raisons d’aimer et de bénir ce nom (Ps 72:18-20 ; 119:132 ; Hé 6:10), de le louer et de l’exalter (Ps 7:17 ; Is 25:1 ; Hé 13:15), de le craindre et de le sanctifier (Ne 1:11 ; Ml 2:4-6 ; 3:16-18 ; Mt 6:9), de mettre sa confiance en lui (Ps 33:21 ; Pr 18:10), et de dire comme le psalmiste : “ Je veux chanter pour Jéhovah durant ma vie ; je veux exécuter des mélodies pour mon Dieu tant que je serai. Que ma méditation à son sujet soit agréable. Moi, je me réjouirai en Jéhovah. Les pécheurs seront supprimés sur la terre ; et les méchants, eux, ne seront plus. Bénis Jéhovah, ô mon âme ! Louez Yah ! ” — Ps 104:33-35.
[Illustration, page 1251]
Objet d’argent sur lequel figure le nom divin ; trouvé à Jérusalem et datant sans doute du VIIe ou du VIe siècle av. n. è.
[Illustration, page 1252]
Extraits des Psaumes, Rouleau de la mer Morte. Le Tétragramme y figure plusieurs fois, différencié par les caractères hébreux anciens.
[Illustrations, page 1256]
(Voir la publication)
Quelques-unes des nombreuses traductions des Écritures grecques chrétiennes qui ont inséré le nom divin.
Novum Testamentum Domini Nostri Iesu Christi, traduit par Elias Hutter (partie hébraïque) ; publié à Nuremberg ; 1599 ; Éphésiens 5:17.
The New Testament of Our Lord and Saviour Jesus Christ, traduit par John Eliot (en massachusett) ; publié à Cambridge, Massachusetts ; 1661 ; Matthieu 21:9.
A Literal Translation of the New Testament [...] From the Text of the Vatican Manuscript, par Herman Heinfetter ; publié à Londres ; 1863 ; Marc 12:29, 30.
Sämtliche Schriften des Neuen Testaments, traduit par Johann Jakob Stolz (en allemand) ; publié à Zurich ; 1781-1782 ; Romains 15:11.