Chapitre 4
La grande apostasie
“UN SEUL Seigneur, une seule foi.” (Éph. 4:5). À l’époque où l’apôtre Paul a écrit ces mots sous l’inspiration divine, c’est-à-dire vers 60-61 de notre ère, il n’y avait qu’une seule foi chrétienne. Or, aujourd’hui, il existe une profusion d’Églises, de sectes et de cultes qui se réclament du christianisme tout en enseignant des doctrines incompatibles et en ayant des principes de conduite différents. Qu’on est loin de la congrégation chrétienne unie et unique qui a vu le jour à la Pentecôte de l’an 33! Comment ces divisions sont-elles apparues? Pour le savoir, il nous faut remonter au Ier siècle de notre ère.
Dès le début, l’Adversaire, Satan, a essayé d’étouffer le témoignage des témoins chrétiens de Jéhovah en faisant fondre sur eux la persécution de gens étrangers à la congrégation (1 Pierre 5:8). Cette persécution est venue d’abord des Juifs, puis de l’Empire romain. Les premiers chrétiens ont triomphé de toute sorte d’opposition (voir Révélation 1:9; 2:3, 19). Mais l’Adversaire ne s’en est pas tenu là. S’il ne pouvait réduire les chrétiens au silence par l’oppression de gens du dehors, pourquoi ne pas les corrompre de l’intérieur? Voilà comment, à peine née, la congrégation chrétienne a vu son existence menacée par un ennemi interne: l’apostasiea.
Mais l’apostasie ne s’est pas infiltrée par surprise dans la congrégation. Le Christ, Chef de la congrégation, a veillé à ce que ses disciples en soient prévenus bien à l’avance. — Col. 1:18.
“Il y aura (...) parmi vous de faux enseignants”
“Soyez sur vos gardes, avertit Jésus, avec les faux prophètes qui viennent à vous en vêtements de brebis.” (Mat. 7:15). Il savait que Satan essaierait de diviser et de corrompre ses disciples. C’est pourquoi, dès le début de son ministère, il les mit en garde contre les faux enseignants.
D’où viendraient ces faux enseignants? “Du milieu de vous”, a dit l’apôtre Paul vers 56 aux surveillants d’Éphèse. De l’intérieur de la congrégation, en effet, ‘se lèveraient des hommes qui proféreraient des choses tortueuses, afin d’entraîner les disciples à leur suite’. (Actes 20:29, 30.) Ces apostats égoïstes ne se contenteraient pas de faire leurs disciples; ils essaieraient “d’entraîner les disciples”, c’est-à-dire les disciples du Christ.
L’apôtre Pierre (vers 64) a prédit aussi la corruption interne et a même décrit de quelle façon ces apostats s’y prendraient: “Il y aura (...) parmi vous de faux enseignants. Ceux-ci introduiront discrètement des sectes destructrices. (...) Par convoitise, ils vous exploiteront avec des paroles artificieuses.” (2 Pierre 2:1, 3). Comme des espions ou des traîtres dans un camp ennemi, les faux enseignants, bien que venant de l’intérieur de la congrégation, feraient pénétrer leurs opinions corruptrices d’une manière secrète ou camouflée.
Ces avertissements de Jésus et de ses apôtres n’étaient pas superflus. L’opposition interne dans la congrégation chrétienne a eu des débuts insignifiants, mais elle est apparue très tôt.
“Déjà à l’œuvre”
Moins de 20 ans après la mort de Jésus, l’apôtre Paul a indiqué que les efforts de Satan pour causer des divisions et détourner les hommes de la vraie foi étaient “déjà à l’œuvre”. (2 Thess. 2:7.) Dès 49, dans une lettre envoyée aux congrégations, le collège central faisait cette remarque: Nous avons “appris que quelques-uns de chez nous vous ont jetés dans le trouble par des discours, essayant de bouleverser vos âmes, alors que nous ne leur avions pas donné d’instructions”. (Actes 15:24.) Ainsi, à l’intérieur de la congrégation, certains exprimaient haut et fort leurs opinions subversives. En l’occurrence, manifestement, ils se prononçaient sur la nécessité ou non pour les chrétiens d’origine gentile d’observer la Loi mosaïque et de se faire circoncire. — Actes 15:1, 5.
Dans le cours du Ier siècle, des idées provoquant la division se sont répandues comme la gangrène (voir 2 Timothée 2:17). Vers 51, à Thessalonique, des individus prédisaient que “la présence” du Seigneur Jésus était imminente, ce qui était faux (2 Thess. 2:1, 2). Vers 55, certains Corinthiens avaient rejeté le clair enseignement chrétien au sujet de la résurrection des morts (1 Cor. 15:12). Vers 65, d’autres prétendaient que la résurrection avait déjà eu lieu, qu’elle était de nature symbolique et survenait du vivant des chrétiens. — 2 Tim. 2:16-18.
Quant à ce qui s’est passé dans la congrégation au cours des 30 années qui ont suivi, on n’en a aucune trace écrite sous l’inspiration divine. Toujours est-il qu’à l’époque où l’apôtre Jean a écrit ses lettres (vers 98), il y avait “beaucoup d’antichrists”, des personnes qui niaient “que Jésus est le Christ” et qu’il est le Fils de Dieu qui vint “dans la chair”. — 1 Jean 2:18, 22; 4:2, 3.
Pendant plus de 60 ans, les apôtres avaient “fait obstacle”, s’efforçant d’endiguer la vague d’apostasie (2 Thess. 2:7; voir 2 Jean 9, 10). Mais à l’aube du IIe siècle, vers l’an 100, Jean, le dernier apôtre, mourut. L’apostasie, qui jusque-là s’était infiltrée lentement dans la congrégation, était maintenant prête à l’envahir sans obstacle; elle allait avoir des répercussions désastreuses dans les domaines de l’organisation et de la doctrine.
Clergé et laïcs
“Vous êtes tous frères, avait dit Jésus à ses disciples. Un seul est votre Conducteur, le Christ.” (Mat. 23:8, 10). Il n’y avait donc pas de clergé dans les congrégations chrétiennes du Ier siècle. Étant frères du Christ, oints de l’esprit, tous les premiers chrétiens avaient la perspective de devenir des prêtres dans le ciel avec le Christ (1 Pierre 1:3, 4; 2:5, 9). Dans le domaine de l’organisation, chaque congrégation était dirigée par un collège de surveillants, ou anciens au sens spirituelb. Tous les anciens avaient une autorité égale, et aucun d’eux n’était habilité à ‘commander en maître’ au troupeau qui lui était confié (Actes 20:17; Phil. 1:1; 1 Pierre 5:2, 3). Toutefois, à mesure que l’apostasie s’étendait, les choses ont changé, et très vite.
Au nombre des premières déviations, il y a eu la distinction entre les termes “surveillant” (gr. épiskopos) et “ancien” (gr. présbutéros), qui ont cessé d’être interchangeables, ne désignant plus la même fonction ou responsabilité. À peine une dizaine d’années après la mort de l’apôtre Jean, Ignace, “évêque” d’Antioche, a écrit dans une lettre aux Smyrniotes: “Suivez tous l’évêque [le surveillant], comme Jésus Christ suit son Père, et le presbytérium [le collège d’anciens] comme les apôtres.” Par ces mots, Ignace recommandait que chaque congrégation soit dirigée par un seul évêquec, ou surveillant, homme que l’on devait distinguer des presbytres, ou anciens, et auquel on devait reconnaître une plus grande autorité.
Mais comment cette distinction s’est-elle opérée? Voici comment Auguste Neander explique les choses (dans Allgemeine Geschichte der christlichen Religion und Kirche [Histoire générale de la religion chrétienne et de l’Église]): “Au IIe siècle (...), la fonction permanente de président des presbytres a dû se former; comme il avait en particulier la surveillance de toute chose, on lui a donné le nom d’[épiskopos], en conséquence de quoi on l’a distingué du reste des presbytres.”
Ainsi ont été jetées les bases d’un clergé, qui s’est imposé peu à peu. Environ un siècle plus tard, Cyprien, “évêque” de Carthage, en Afrique du Nord, a été un énergique défenseur de l’autorité des évêques. Selon lui, ils devaient être un groupe à part des presbytres (qui sont devenus les prêtresd), des diacres et des laïcs. Par contre, Cyprien n’était pas pour la primauté d’un évêque sur les autrese.
À mesure que les évêques et les presbytres gravissaient l’échelle hiérarchique, ils laissaient au dessous d’eux le reste des croyants de la congrégation, ce qui a eu pour résultat la séparation entre le clergé (ceux qui étaient à la tête) et les laïcs (l’ensemble passif des croyants). Voici une explication de la Cyclopedia de McClintock et Strong: “À partir de Cyprien [qui mourut vers 258], le père du système hiérarchique, la distinction entre clergé et laïcs prit de l’importance et, très vite, fut universellement admise. Pour preuve, à partir du IIIe siècle, le terme clerus (...) fut presque exclusivement appliqué au ministère pour le distinguer de la laïcité. À mesure que se formait la hiérarchie [catholique] romaine, le clergé ne devint pas seulement un ordre distinct, (...) mais il finit aussi par être reconnu comme l’unique prêtrise.”
Ainsi, en quelque 150 ans à compter de la mort du dernier apôtre, deux profonds changements avaient modifié l’organisation de la congrégation: d’abord, la séparation entre l’évêque et les presbytres, l’évêque occupant le sommet de l’échelle hiérarchique; ensuite, la séparation entre le clergé et les laïcs. Ce n’étaient plus tous les croyants engendrés de l’esprit qui formaient “une prêtrise royale”, mais le clergé qui était désormais “reconnu comme l’unique prêtrisef”. — 1 Pierre 2:9.
Ces changements ont marqué une déviation par rapport à la façon de diriger les congrégations telle qu’elle était définie dans les Écritures et avait cours aux jours des apôtres. Mais les conséquences de l’apostasie ne se sont pas limitées à des changements en matière d’organisation.
L’infiltration d’enseignements païens
Les purs enseignements du Christ sont conservés dans les Saintes Écritures. Par exemple, Jésus a clairement enseigné que Jéhovah est “le seul vrai Dieu”, et que l’âme humaine est mortelle (Jean 17:3; Mat. 10:28). Pourtant, après la mort des apôtres et l’affaiblissement des structures d’organisation, des doctrines païennes sont venues corrompre ces enseignements clairs en s’infiltrant dans le christianisme. Comment cela a-t-il pu arriver?
Un facteur essentiel a été l’influence subtile de la philosophie grecque. “À partir du milieu du IIe siècle de l’ère chrétienne, des chrétiens qui avaient une certaine connaissance de la philosophie grecque commencèrent à éprouver le besoin d’exprimer leur foi selon les termes de cette philosophie, tant pour leur satisfaction intellectuelle que pour convertir des païens instruits.” (The New Encyclopædia Britannica). Une fois que des personnes éprises de philosophie sont devenues chrétiennes, il n’a pas fallu longtemps pour que la philosophie grecque et le “christianisme” soient indissociables.
À la suite de cette union, des doctrines païennes comme la Trinité et l’immortalité de l’âme ont pénétré dans le christianisme souillé. Mais ces enseignements étaient bien plus vieux que les philosophes grecs. En fait, les Grecs les avaient empruntés à des cultures plus anciennes, car on les retrouve dans les religions de l’Égypte et de la Babylone antiques.
À mesure que les doctrines païennes s’infiltraient dans le christianisme, d’autres enseignements bibliques étaient déformés ou abandonnés.
L’espérance du Royaume se perd
Les disciples de Jésus savaient très bien qu’ils devaient continuer à guetter la “présence” promise de Jésus et la venue de son Royaume. Avec le temps, on a compris que ce Royaume gouvernera la terre pendant mille ans et la transformera en paradis (Mat. 24:3; 2 Tim. 4:18; Rév. 20:4, 6). Les rédacteurs chrétiens de la Bible ont exhorté les témoins du Ier siècle à rester spirituellement éveillés et à se tenir séparés du monde (Jacq. 1:27; 4:4; 5:7, 8; 1 Pierre 4:7). Mais, après la mort des apôtres, l’attente chrétienne de la présence du Christ et de la venue de son Royaume s’est relâchée. Pourquoi?
Un facteur de ce relâchement a été la corruption spirituelle amenée par la doctrine grecque de l’immortalité de l’âme. Comme celle-ci s’imposait parmi les chrétiens, l’espérance d’un millénium a été peu à peu abandonnée. Pourquoi? Voici la réponse d’un dictionnaire (The New International Dictionary of New Testament Theology): “La doctrine de l’immortalité de l’âme fit son entrée et supplanta l’eschatologie [l’enseignement des ‘fins dernières’] du NT [Nouveau Testament] avec son espérance de la résurrection des morts et la nouvelle création (Rév. 21 et 22 suivant), de sorte que l’âme passe en jugement après la mort et entre dans un paradis que l’on situe désormais dans un autre monde.” Autrement dit, les chrétiens apostats pensaient qu’à la mort l’âme survivait au corps et que les bienfaits du Règne millénaire du Christ devaient par conséquent appartenir au domaine spirituel. Ils ont ainsi transféré le Paradis de la terre au ciel, endroit où, selon eux, l’âme sauvée accède quand on meurt. Dans ces conditions, ils n’avaient pas besoin de guetter la présence et la venue de son Royaume, puisqu’ils espéraient tous rejoindre le Christ au ciel quand ils mourraientg.
Toutefois, un autre élément encore a fait paraître inutile de guetter la venue du Royaume du Christ. Voici ce qu’explique une encyclopédie (The New Encyclopædia Britannica): “L’[apparent] retard de la Parousie entraîna un affaiblissement de l’attente ardente dans l’Église primitive. Au cours de cette ‘déseschatologisation’ [fléchissement de l’enseignement des ‘fins dernières’], l’Église officielle s’est de plus en plus substituée au Royaume de Dieu attendu. La formation de l’Église catholique en institution hiérarchique est directement liée au relâchement de cette attente ardente.” (C’est nous qui soulignons). Ainsi, non content de transférer les bienfaits du Millénium de la terre aux cieux, on reléguait le Royaume céleste à la terre. Ce “déménagement” a été parachevé par Augustin d’Hippone (354-430), notamment dans son célèbre ouvrage La Cité de Dieu, où il affirme: “Maintenant l’Église est le royaume du Christ et le royaume des cieux.”
Pendant ce temps, vers 313, sous le règne de l’empereur romain Constantin, le christianisme, dont la pensée était en grande partie devenue apostate, s’est vu accorder un statut officiel. Les chefs religieux étaient disposés à se mettre au service de l’État, et au début l’État dirigeait les affaires religieuses. (Avant longtemps, la religion allait diriger les affaires de l’État.) Ainsi est née la chrétientéh, dont une partie (la religion catholique) a fini par devenir la religion officielle de Rome. Maintenant, le “royaume” n’était pas seulement dans le monde: il faisait partie du monde. On était bien loin du Royaume que le Christ avait prêché. — Jean 18:36.
La Réforme: retour au vrai culte?
Comme de la mauvaise herbe envahissant et étouffant le blé, l’Église de Rome, avec le pape pour chef, a dominé les affaires du monde pendant des siècles (Mat. 13:24-30, 37-43). Faisant de plus en plus partie du monde, l’Église s’éloignait de plus en plus du christianisme du Ier siècle. Au fil des siècles, des sectes “hérétiques” ont demandé des réformes dans l’Église, mais l’Église a continué d’abuser de son pouvoir et d’amasser des richesses. Puis, au XVIe siècle, la Réforme protestante, révolte religieuse, a éclaté avec violence.
Des réformateurs tels que Martin Luther (1483-1546), Ulrich Zwingli (1484-1531) et Jean Calvin (1509-1564) ont attaqué l’Église sur plusieurs points: Luther sur la vente des indulgences, Zwingli sur le célibat des prêtres et la mariolâtrie, et Calvin sur la nécessité d’un retour aux principes originaux du christianisme. Qu’ont apporté leurs efforts?
Il est sûr que la Réforme a rendu des services, le plus grand étant la traduction de la Bible dans les langues du peuple. Le vent de liberté soufflé par la Réforme a amené à plus d’objectivité dans la recherche biblique et à une plus grande compréhension des langues de la Bible. Pourtant, la Réforme n’a pas marqué un retour au culte et à la doctrine authentiquesi. Pourquoi donc?
Les effets de l’apostasie avaient atteint la chrétienté en profondeur, jusque dans ses fondements. C’est pourquoi les divers groupes protestants qui se sont soustraits à l’autorité du pape de Rome ont néanmoins emporté avec eux certaines des erreurs fondamentales de l’Église catholique romaine, erreurs qui résultaient de l’abandon du vrai christianisme. Par exemple, si les Églises protestantes étaient dirigées quelque peu différemment, elles ont quand même conservé la division fondamentale de l’Église en un clergé dominant et des laïcs dominés. Elles ont aussi gardé des doctrines non bibliques comme la Trinité, l’immortalité de l’âme et les tourments éternels après la mort. En outre, à l’instar de l’Église romaine, les Églises protestantes ont continué à faire partie du monde: elles étaient étroitement liées avec les systèmes politiques et les élites dirigeantes.
Qu’en était-il pendant ce temps de l’attente chrétienne, l’attente de la présence de Jésus et de la venue de son Royaume? Durant les siècles qui ont suivi la Réforme, les Églises — catholique et protestantes — se sont profondément engagées dans le pouvoir séculier et ont eu tendance à éclipser les espérances en la venue du Royaume du Christ.
Regain de vigilance
Mais, au XIXe siècle, le climat religieux a provoqué un regain de vigilance chrétienne. Avec les investigations que des ecclésiastiques et des biblistes ont menées sur la Bible, des enseignements comme l’immortalité de l’âme, les tourments éternels après la mort, la prédestination et la Trinité ont été réétudiés. En outre, des étudiants de la Bible se sont penchés de près sur des prophéties bibliques relatives aux derniers jours. C’est ainsi que plusieurs groupes de personnes ont commencé à se soucier sérieusement du retour promis du Seigneur. — Mat. 24:3.
Aux États-Unis, William Miller a prédit le retour du Christ sous forme visible pour 1843 ou 1844. En Allemagne, le théologien J. Bengel en a fixé la date à 1836; en Angleterre, les Irvingiens ont désigné d’abord 1835, puis 1838, 1864 et 1866. En Russie, il y a eu un groupe mennonite qui a songé d’abord à 1889, puis à 1891.
Ce regain de vigilance chrétienne a eu pour effet d’éveiller beaucoup de gens à la perspective du retour du Seigneur. Mais ils n’ont abouti qu’à la déception, et ce, en grande partie parce que les groupes en question faisaient trop confiance à des hommes et pas assez aux Écritures. Quelques dizaines d’années après, la plupart de ces groupes avaient disparu.
Pendant ce temps, d’autres choses se passaient qui ont eu une incidence sur les espérances des humains.
Une époque marquée par la “lumière” et l’industrialisation
En 1848, Karl Marx et Friedrich Engels ont publié le Manifeste du parti communiste. Au lieu de prôner la religion, que Marx appelait “l’opium du peuple”, ils prônaient l’athéisme. Tout en s’opposant ostensiblement à toute religion, ils ne faisaient, en réalité, que promouvoir une religion: le culte de l’État et de ses chefs.
Une dizaine d’années plus tard, en 1859, Charles Darwin a publié son ouvrage L’Origine des espèces, qui a influencé profondément la pensée scientifique et religieuse d’alors. Avec les théories de l’évolution, on a remis en question la véracité du récit biblique sur la création et l’introduction du péché par la désobéissance du premier couple humain (Gen. chaps 1 à 3). La foi de beaucoup en la Bible a été ébranlée.
Dans le même temps, la révolution industrielle battait son plein. On délaissait l’agriculture pour l’industrie et la fabrication de machines. L’apparition de la locomotive à vapeur (au début du XIXe siècle) a amené la multiplication des réseaux ferroviaires nationaux. La deuxième moitié du XIXe siècle a vu l’invention du téléphone (1876), du phonographe (1877), de la lumière électrique (1878-1879) et l’emploi de la linotype en imprimerie pour composer des lignes de caractères (1884).
L’humanité entrait dans la phase des plus grandes innovations de l’Histoire en matière de transports et de communication. Certes, on allait utiliser ces bienfaits à des fins commerciales et politiques, mais ils allaient aussi profiter au domaine religieux. Les conditions étaient donc réunies pour l’initiative modeste qu’allait prendre un petit groupe d’étudiants de la Bible et qui aurait des répercussions mondiales.
[Notes]
a Dans les Écritures grecques chrétiennes, le nom “apostasie” (gr. apostasia) a le sens de “désertion, abandon ou rébellion”. (Actes 21:21, note.) Il a ici principalement trait à la défection religieuse; au fait de renoncer au vrai culte, de l’abandonner.
b Dans les Écritures, les termes “surveillant” et “ancien” désignent la même fonction (Actes 20:17, 28; Tite 1:5, 7). “Ancien” insiste sur la maturité de celui qui est nommé tel, et “surveillant” sur la responsabilité inhérente à la nomination, responsabilité de veiller sur les personnes qu’on lui a confiées, et à leurs intérêts.
c Le mot français “évêque” dérive du mot grec épiskopos (“surveillant”) selon cette étymologie: evesque, de ebisque (Xe siècle), du latin ecclésiastique episcopus, du grec épiskopos.
d Le mot français “prêtre” dérive de présbutéros (“ancien”) selon cette étymologie: prestre (XVIIe siècle), du bas latin presbyter, emprunté au grec présbutéros.
e Avec le temps, l’évêque de Rome, affirmant être le successeur de Pierre, a été considéré comme l’évêque suprême et pape. — Voir L’humanité à la recherche de Dieu, édité par la Watchtower Bible and Tract Society of New York, Inc., 1990, pp. 270-272.
f A. Neander a fait une remarque intéressante: “On en a conclu à tort que, tout comme il y avait eu dans l’Ancien Testament une prêtrise visible associée à une classe particulière d’hommes, il devait aussi y en avoir une dans le Nouveau [Testament] (...). La comparaison erronée de la prêtrise chrétienne avec la prêtrise juive a encore contribué à l’élévation de l’épiscopat au-dessus de la fonction des presbytres.” — Allgemeine Geschichte der christlichen Religion und Kirche.
g Cette conception erronée part du principe qu’à la mort tous les chrétiens vont au ciel. Toutefois, la Bible enseigne que seulement 144 000 personnes sont appelées à gouverner avec le Christ dans le ciel (Rév. 7:4-8; 20:4-6). D’autres, innombrables, peuvent avoir l’espoir de la vie éternelle dans le Paradis sur terre régi par le Royaume du Christ. — Mat. 6:10; Rév. 7:9, 15.
h Le terme “chrétienté” dans cet ouvrage désignera le prétendu christianisme, par opposition au vrai christianisme de la Bible.
i Pour un examen plus approfondi de la Réforme et de ce qu’elle a apporté, voir le livre L’humanité à la recherche de Dieu, au chapitre 13 intitulé “La Réforme: Un nouveau tournant dans la recherche”.
[Entrefilet, page 33]
À peine née, la congrégation chrétienne a vu son existence menacée par l’apostasie.
[Entrefilet, page 34]
L’opposition interne a eu des débuts insignifiants.
[Entrefilet, page 37]
Non contents de transférer les bienfaits du Millénium de la terre au ciel, les apostats ont relégué le Royaume céleste à la terre.
[Encadré/Illustration, page 36]
Platon et le “christianisme”
Le philosophe grec Platon (né vers 428 av. n. è.) ne pouvait pas savoir qu’un jour ses enseignements se feraient une place dans le christianisme apostat. Les principaux apports de Platon au “christianisme” se retrouvent dans les enseignements de la Trinité et de l’immortalité de l’âme.
Les idées de Platon sur Dieu et la nature ont eu une influence sur la doctrine de la Trinité qu’a forgée la chrétienté. Le “Nouveau Dictionnaire universel” explique ceci: “La trinité platonique, qui ne fut elle-même au fond qu’une sorte d’arrangement, de disposition nouvelle, des trinités plus anciennes des peuples qui avaient précédé, nous paraît bien être la trinité philosophique, rationnelle, c’est-à-dire la trinité d’attributs qui a donné naissance à la triplicité d’hypostases ou de personnes divines des Églises chrétiennes. (...) Cette conception de la trinité divine du philosophe grec (...) se trouve partout dans les anciennes religions [païennes].” — Volume 2, page 1467.
Au sujet de la doctrine de l’âme immortelle, la “New Catholic Encyclopedia” dit: “Le concept chrétien d’une âme spirituelle créée par Dieu et infusée dans le corps au moment de la conception pour faire de l’homme un tout vivant est le fruit d’une longue démarche de la philosophie chrétienne. C’est seulement avec Origène [mort vers 254] en Orient et saint Augustin [mort en 430] en Occident que l’âme a été définie comme une substance spirituelle et qu’on a formé un concept philosophique de sa nature. (...) La doctrine [d’Augustin] (...) devait beaucoup (y compris des failles) au néo-platonisme.” — Volume XIII, pages 452, 454.
[Illustration, page 35]
Pour Cyprien, “évêque” de Carthage, les évêques devaient être un groupe à part des presbytres, des diacres et des laïcs.
[Illustration, page 38]
“Maintenant l’Église est le royaume du Christ et le royaume des cieux.” (Augustin d’Hippone).
[Illustrations, page 39]
Des réformateurs qui ont attaqué l’Église sur différentes questions.
Martin Luther
Jean Calvin
Ulrich Zwingli
[Illustrations, page 40]
Le “Manifeste du parti communiste” de Karl Marx n’a fait que promouvoir le culte de l’État. “L’Origine des espèces” de Charles Darwin a influencé profondément la pensée scientifique et religieuse de son temps.
[Illustration, page 41]
La locomotive à vapeur
[Illustration, page 41]
La lumière électrique
[Illustration, page 41]
Le premier téléphone
[Illustration, page 41]
Une des premières linotypes
[Illustration, page 41]
Le phonographe