Que faire ?
SUR son lit d’hôpital, Gilbert, paralysé, a demandé à son médecin : “ Est-ce que je retrouverai un jour l’usage de mon bras et de ma jambe ? ” Réponse stimulante du praticien : “ Plus vous travaillerez, plus vous le retrouverez, et plus rapide ce sera. ” “ Alors je suis prêt ! ” s’est exclamé Gilbert. La kinésithérapie et l’optimisme ont permis à cet homme de 65 ans de passer du fauteuil roulant au déambulateur, du déambulateur à la canne, et de la canne au travail.
“ La plupart des programmes modernes de rééducation reposent sur l’idée que si une zone du cerveau est endommagée, d’autres centres peuvent prendre le relais, expliquent les chercheurs Florence Weiner, Mathew Lee et Harriet Bell. L’un des buts des médecins est de réveiller le potentiel de ces centres et de créer la stimulation qui permettra au cerveau de se réorganiser et de s’adapter. ” Toutefois, la guérison dépend d’autres facteurs également, tels que le siège et la gravité de l’accident, l’état général de la personne, la qualité des soins et le soutien de l’entourage.
Le soutien de la famille et des amis
Erikka a suivi des séances de rééducation pendant trois ans : elle a réappris à marcher et s’est habituée à faire de la main droite ce qu’elle faisait de la main gauche. Qu’est-ce qui l’a aidée à garder le sourire ? “ Ce qui a été vraiment déterminant, c’est le soutien sans faille de mon mari et de mes amis. Je savais qu’ils m’aimaient, et cela me donnait de la force. Quand ils m’encourageaient à ne pas abandonner, ça me remontait le moral. ”
Les membres de sa famille deviennent des partenaires dans le rétablissement du malade. Ils doivent poser des questions au personnel médical et, parfois, se familiariser avec des traitements qu’il faudra poursuivre à la maison pour que les acquis ne soient pas perdus. La patience, la gentillesse, la compréhension et l’affection de la famille et des amis créent un environnement affectif stable favorable au réapprentissage du langage, de l’écriture et d’autres choses nécessaires dans la vie quotidienne.
John, conscient de l’équilibre nécessaire entre dureté et dorlotement, s’est investi à fond dans la rééducation de sa femme, Ellen. “ Nous ne permettions pas qu’Ellen sombre dans l’apitoiement sur soi-même, dit-il à propos des efforts de sa famille. Parfois, nous étions intraitables, mais nous avons toujours tenu compte de ses limites, et nous l’avons toujours aidée. Comme elle est plus sensible, j’essaie de ne pas la stresser. ”
Ellen suivait des séances d’orthophonie pour réapprendre à parler, et John l’épaulait dans ses efforts : “ Un moyen de l’encourager, c’était de faire des choses ensemble. Nous nous lisions donc la Bible l’un à l’autre, et cela l’aidait dans son élocution. Et puis, tout doucement au début, nous nous sommes mis à prêcher (nous sommes Témoins de Jéhovah). Ellen pouvait ainsi faire connaître aux autres notre espérance pour l’avenir. C’était une thérapeutique en soi. ” Au bout de trois ans, Ellen avait beaucoup progressé.
On ne devrait jamais sous-estimer l’encouragement et la force que peuvent communiquer les amis, car ils contribuent très largement à la guérison du malade. Observation relevée dans la revue médicale Stroke : “ On a constaté qu’un soutien [fort] de la part de l’entourage laissait présager un rétablissement plus rapide et plus complet, même chez les victimes d’accidents vasculaires cérébraux graves. ”
Bernie est très reconnaissant à ses amis de l’aide qu’ils lui ont prodiguée. “ Les visites des amis sont essentielles, dit-il. Une voix compatissante, quelqu’un soucieux d’aider, ça vous remonte le moral. Il n’est pas nécessaire de s’appesantir sur les handicaps du malade, mais on l’encourage beaucoup en le félicitant au moindre progrès. ” Comment chacun d’entre nous peut-il soutenir les victimes d’un accident vasculaire cérébral ? “ Apportez des fleurs, parlez d’une idée ou d’une histoire tirées des Écritures, suggère Bernie. Ces choses-là m’ont vraiment aidé. ”
Melva, une femme âgée, n’oublie pas les prières que faisait avec elle un de ses frères en religion. Gilbert recommande lui aussi la prière en commun : “ Quand quelqu’un prie avec vous, ça prouve qu’il s’intéresse vraiment à vous. ” Peter, qui souffre depuis son accident d’un handicap visuel, apprécie que l’on comprenne ses limites et qu’on prenne le temps de lui faire la lecture.
C’est également un geste d’amour que d’aider le malade à aller aux séances de rééducation et à en revenir. Enfin, il est nécessaire de s’assurer que son logement ne présente aucun danger. Une chute est constamment à craindre si le malade a des troubles de l’équilibre. Gilbert, par exemple, a apprécié l’aide bienveillante de ses amis qui, entre autres choses, lui ont installé une barre d’appui latérale dans la douche.
Comment les aider
Ses sautes d’humeur et sa propension accrue aux pleurs peuvent plonger la victime dans l’embarras, mais aussi déconcerter les observateurs, qui ne sauront pas forcément comment réagir. Toutefois, en apprenant à soutenir le malade, ses amis peuvent l’empêcher de sombrer dans l’isolement qui le guette. Généralement, les crises de larmes s’espacent avec le temps. Mais quand il s’en produit une, gardez votre calme, restez auprès de la personne, et dites-lui les paroles que vous aimeriez entendre si les rôles étaient inversés.
Par-dessus tout, comme Dieu, aimez ceux dont les handicaps ont modifié la personnalité. Ce que vous éprouvez pour eux, ils le sentent, et ils réagissent en conséquence. “ Je ne serai peut-être plus jamais comme avant, dit Erikka, mais personne ne devrait exiger cela d’une victime d’un accident vasculaire cérébral. Les parents et les amis doivent apprendre à aimer la personne telle qu’elle est. S’ils fouillent les recoins de sa personnalité, ils s’apercevront que ses qualités les plus attirantes sont toujours là. ”
L’estime de soi s’effondre quand on ne peut pas parler ou se faire comprendre. En faisant l’effort de leur parler, les amis peuvent consolider l’image qu’ont d’eux-mêmes ceux dont l’élocution a souffert. “ Mes pensées et mes sentiments intimes n’ont pas changé, explique Takashi. Pourtant, les gens ont tendance à m’éviter parce qu’ils ne peuvent pas avoir avec moi une conversation normale. J’ai du mal à aller vers les autres, mais quand quelqu’un vient me parler, cela m’encourage terriblement, je suis folle de joie. ”
Suivent quelques principes qui aideront chacun d’entre nous à soutenir et à encourager ceux qui ont un défaut d’élocution.
La plupart des accidents vasculaires cérébraux n’altèrent pas les facultés intellectuelles. La majorité de ceux qui survivent à un accident vasculaire cérébral restent mentalement alertes, même si leur élocution, elle, est mauvaise. Ne leur parlez jamais sur un ton condescendant ou comme à un bébé. Respectez leur dignité.
Écoutez-les patiemment. Le malade aura peut-être besoin de temps pour réorganiser une pensée ou finir un mot ou une phrase. Souvenez-vous que l’auditeur attentif aux besoins d’autrui n’est pas pressé.
Ne dites pas que vous avez compris si ce n’est pas le cas. Dites gentiment : “ Je suis désolé, mais je ne comprends pas. On essaiera de nouveau tout à l’heure. ”
Parlez lentement et distinctement, sur un ton normal.
Utilisez des phrases brèves et des mots connus.
Posez des questions qui appellent un oui ou un non, et encouragez le malade à répondre. Souvenez-vous qu’il est peut-être incapable de vous comprendre.
Réduisez les bruits ambiants.
L’aide pleine d’amour de Jéhovah
S’il importe de connaître la cause de son accident (on peut ainsi faire le nécessaire pour réduire les risques d’un nouveau drame), il est également essentiel de dominer la peur qu’il génère. “ Isaïe 41:10 me réconforte particulièrement, explique Ellen. Là, Dieu dit : ‘ N’aie pas peur, car je suis avec toi. Ne regarde pas tout autour, car je suis ton Dieu. Oui, je t’affermirai. Oui, je t’aiderai. Oui, vraiment, je te tiendrai ferme par ma droite de justice. ’ Jéhovah est devenu tellement réel pour moi que je n’ai plus peur. ”
La Bible aide également Anand à vaincre le désespoir. “ C’est un soutien incroyable, dit-il. Elle me redonne constamment courage. ” Mais comment Hiroyuki, incapable qu’il était de se concentrer, pourrait-il bénéficier de l’aide des Écritures ? Laissons-le répondre : “ J’ai trouvé du réconfort en écoutant des enregistrements des livres de la Bible. ”
L’apôtre Paul a déclaré : “ Lorsque je suis faible, c’est alors que je suis puissant. ” (2 Corinthiens 12:10). C’est l’esprit de Jéhovah qui a aidé Paul à accomplir ce dont il était incapable de lui-même. Les victimes d’un accident vasculaire cérébral peuvent, elles aussi, s’appuyer sur Jéhovah pour recevoir de la force spirituelle. “ Quand nous sommes en bonne santé, que nous faisons tout de notre propre force, nous ne donnons pas toujours beaucoup d’occasions à Jéhovah de nous aider, explique Erikka. Mon infirmité m’a permis de nouer avec lui des relations très fortes. ”
De l’aide pour les gardes-malades
Les gardes-malades jouent un rôle crucial et ont besoin de soutien. Vers qui peuvent-ils se tourner ? Vers les membres de leur famille. La charge doit être divisée entre tous. Yoshiko explique comment ses fils l’ont aidée sur le plan affectif : “ Ils m’écoutaient parler de mes problèmes comme si ç’avait été les leurs. ” La famille doit disposer de tous les renseignements possibles pour pouvoir prodiguer les soins qui conviennent et savoir comment réagir face aux changements de personnalité de l’être aimé.
Qui encore peut assister les gardes-malades ? David et sa famille, qui doivent s’occuper de Victor, se sont tournés vers leur famille spirituelle au sein de la congrégation des Témoins de Jéhovah. “ Ils ne sont pas restés insensibles à nos besoins. Ils viennent de temps en temps, à tour de rôle, passer la nuit chez nous pour rester au chevet de Victor à notre place. ”
Tout garde-malade a besoin de sentir l’amour et le soutien chaleureux de sa famille spirituelle. Mais certains ont du mal à demander de l’aide. Explication de Haruko : “ On me dit souvent : ‘ Si tu as besoin de quoi que ce soit, n’hésite pas à nous le dire. ’ Mais, sachant que tout le monde est très occupé, je n’ose pas demander. J’aimerais beaucoup qu’on me propose une aide concrète : ‘ Je peux te donner un coup de main pour le ménage. Quel jour serait le mieux ? ’ ‘ Je peux te faire les courses ; c’est bon si je passe chez toi maintenant ? ’ ”
La femme de Kenji a eu un accident vasculaire cérébral. Kenji a pu lui apporter les soins dont elle avait besoin. Il jetait ses fardeaux sur Jéhovah en le priant. Malheureusement, sa femme a par la suite perdu la parole, et lui une compagne à qui parler. Mais Kenji lit la Bible tous les jours. “ Je me remémore ainsi la tendresse dont Jéhovah entoure ceux qui ont l’esprit écrasé. Cela m’empêche d’être déprimé et de me sentir seul. ”
Il est d’un grand secours de se reposer sur l’esprit de Jéhovah quand on se sent craquer. Yoshiko, qui doit supporter le changement de personnalité et les emportements de son mari, raconte : “ J’ai ressenti parfois une envie irrésistible de hurler de toutes mes forces. Dans ces moments, je priais systématiquement Jéhovah, et son esprit m’apaisait. ” Par reconnaissance pour la fidélité de Jéhovah à son endroit, Yoshiko ne permet à rien de perturber ses habitudes chrétiennes. Elle assiste aux réunions chrétiennes, participe à l’œuvre d’évangélisation et étudie la Bible individuellement. “ Je sais que Jéhovah ne m’abandonnera jamais si je fais ma part ”, ajoute-t-elle.
Quand l’inquiétude s’insinue, Jéhovah est toujours là pour écouter. Midori, dont le mari a eu un accident vasculaire cérébral, trouve du réconfort dans le fait que, figurément parlant, Jéhovah met toutes les larmes qu’elle verse dans son “ outre ”. (Psaume 56:8.) Elle se souvient de ces paroles de Jésus : “ Ne vous inquiétez jamais du lendemain. ” “ J’ai décidé d’attendre patiemment le monde nouveau ”, dit-elle. — Matthieu 6:31-34.
Quand on est gravement diminué
Il est vrai que, grâce à la rééducation, certains se remettent fort bien d’un accident vasculaire cérébral. Malheureusement, d’autres resteront l’ombre d’eux-mêmes. Comment peuvent-ils accepter leurs handicaps, si graves et durables soient-ils ?
Bernie, privé d’une grande partie de sa mobilité, répond : “ La joie que me procure mon espérance de vivre éternellement sur une terre transformée en paradis et mes prières à mon Père céleste, Jéhovah, m’ont aidé à accepter mes limites avec calme. ”
Cette même espérance a aidé Erikka et son mari, Georg, à accepter son état et à conserver leur joie de vivre. “ Nous avons de Dieu la promesse d’une guérison complète. Alors nous ne nous focalisons pas sur le handicap d’Erikka. Bien entendu, nous faisons tout ce que nous pouvons pour sa santé. Mais on peut apprendre à vivre avec une mauvaise coordination des muscles et se concentrer sur des choses plus encourageantes. ” — Isaïe 33:24 ; 35:5, 6 ; Révélation 21:4.
Dans les cas où la guérison est très relative, le soutien de la famille et des amis est encore plus nécessaire. Il aidera la victime à supporter son état jusqu’à ce que le temps vienne pour Dieu de guérir toutes les maladies.
Les victimes qui savent qu’un avenir merveilleux les attend, elles et leur famille, peuvent vivre un jour à la fois et, ainsi, attendre patiemment le moment où, dans le monde nouveau que Dieu établira bientôt, elles seront débarrassées de toute souffrance (Jérémie 29:11 ; 2 Pierre 3:13). En attendant, tous ceux qui se tournent vers Jéhovah peuvent être assurés qu’il les aidera à supporter les effets débilitants d’un accident vasculaire cérébral. — Psaumes 33:22 ; 55:22.
[Entrefilet, page 12]
La famille et les amis peuvent aider la victime à supporter son état jusqu’à ce que le temps vienne pour Dieu de guérir toutes les maladies.
[Encadré/Illustration, page 10]
PRÉVENTION
“ LE MIEUX, face à l’accident vasculaire cérébral, est d’essayer de le prévenir ”, dit le professeur Levine. Or la cause numéro un de l’accident vasculaire cérébral est l’hypertension.
Chez beaucoup, l’hypertension peut être combattue par une alimentation riche en potassium et pauvre en sel, en graisses saturées et en cholestérol. Il importerait également de modifier sa consommation d’alcool. En faisant régulièrement de l’exercice (tout en adaptant l’effort à son âge et à sa forme), on se débarrasse plus facilement des kilos en trop, ce qui peut réduire la tension artérielle. Peut-être faudra-t-il prendre des médicaments, mais sur avis médical, car la gamme est vaste.
La maladie thrombo-athéromateuse carotidienne obstrue le principal passage par lequel le sang monte au cerveau et constitue l’une des causes majeures d’accident vasculaire cérébral. Selon la gravité de l’atteinte, l’endartériectomie carotidienne, acte chirurgical destiné à nettoyer les artères obstruées, peut être indiquée. Des études montrent que cette intervention conjuguée à une médication produit de bons résultats chez les sujets présentant des symptômes d’obstruction et aux artères fortement obstruées. Toutefois, cet acte n’est pas sans danger, aussi faut-il bien peser le pour et le contre.
Une maladie cardiovasculaire peut accroître le risque d’accident vasculaire cérébral. La fibrillation auriculaire (irrégularité du rythme cardiaque), susceptible de causer la formation de caillots de sang qui risquent de monter au cerveau, peut se soigner par des anticoagulants. D’autres troubles cardiaques peuvent exiger une intervention chirurgicale et la prise de médicaments pour réduire le risque d’accident vasculaire cérébral. Le diabète étant responsable d’un grand nombre d’accidents, il est à surveiller.
Les accidents ischémiques transitoires sont des signaux d’alarme clairs. Prenez-les au sérieux. Consultez votre médecin, et traitez la cause du mal, car ces accès font augmenter fortement le risque d’accident vasculaire cérébral constitué.
Une vie saine et sans excès peut contribuer grandement à prévenir un accident vasculaire cérébral. Une alimentation équilibrée, une activité physique régulière, une consommation d’alcool réduite au minimum et l’éviction du tabac aident les artères et pourraient même faire du bien à celles qui sont endommagées. Diverses études ont montré qu’une consommation accrue de fruits frais, de légumes et de céréales réduit le risque d’accident vasculaire cérébral.